Le Mali est-il comme la Libye ?
L'opération militaire au Mali est placée sur le même plan que la guerre en Libye de 2011, car c'est aussi la France qui avait mené des raids aériens en premier, sans l'admettre. S'il y a une différence, c'est qu'en Libye, l'Occident a frappé le pouvoir de Mouammar Kadhafi qui réprimait les opposants pour mettre fin à la menace humanitaire, alors qu'au Mali, il s'agit de combattre le terrorisme afin de préserver l'intégrité territoriale d'un pays souverain. Il ne faut pas négliger les rapports intrinsèques entre les deux guerres malgré leurs différences extérieures : dans la guerre libyenne, une bonne partie des mercenaires combattant pour Kadhafi étaient des Touaregs venus d'Afrique de l'Ouest, et ce sont justement eux qui sont partis au Nord-Mali à la fin de la guerre libyenne pour s'opposer au gouvernement malien. Par ailleurs, les nombreux mercenaires survivants originaires du Soudan et d'Égypte qui avaient servi de chair à canon sous le régime de Kadhafi, après les combats en Libye, ont traversé le Sahara, sont arrivés au Mali, en y amenant une quantité considérable d'armes sophistiquées. Décidément, on peut y voir une suite de l'intervention militaire occidentale en Libye. Le champ de bataille a été transféré, dans un sens, de la Libye au Mali. La France qui a été à la pointe de l'intervention militaire en Libye ressent encore l'euphorie de la victoire. Elle n'avait pourtant pas prévu de retrouver, un an plus tard, quasiment les mêmes adversaires au Mali.
L'incertitude de cette opération militaire suscite un intérêt général. Un pilote d'hélicoptère militaire français a été tué le premier jour des raids. Selon des personnalités du quartier général français, les forces de l'opposition ont une capacité combative plus forte que prévu, des armes sophistiquées, ainsi qu'une volonté ferme, sans crainte de mourir. Des analystes indiquent qu'au Nord-Mali, dont la superficie est le double du territoire français, les forces armées peuvent se déplacer librement, ce qui fait que même les armes et équipements sophistiqués auront du mal à les atteindre. D'autres vont jusqu'à craindre que le Mali devienne le « deuxième Afghanistan ». Les autorités militaires françaises admettent que la guerre pourrait être de longue durée, car aucun calendrier de retrait n'est prévu pour leur opération au Mali. Cependant, mener une guerre prolongée au Mali n'est pas une chose facile, car avec la saison des pluies qui commencera en mars, les actions militaires se déploieront difficilement. La fin de la guerre est aujourd'hui le problème auquel doit faire face le président François Hollande.
Par Shen Xiaoquan, maître de recherches au Centre d'étude des problèmes mondiaux, de l'agence Xinhua
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