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Balade dans le quartier chinois de Paris

French.china.org.cn | Mis à jour le 14. 01. 2014 | Mots clés : quartier chinois, Paris, restaurant asiatique

Un restaurant asiatique parmi les nombreux qui peuplent le quartier chinois de Paris. (PHOTOS : ANAÏS CHAILLOLEAU)

Après une année de travail à La Chine au présent à Beijing, je suis rentrée un mois dans mon pays d'origine pour des vacances bien méritées. Mais poussée par la curiosité et un brin de mélancolie, j'ai profité du fait d'être en France pour partir en vadrouille dans le « triangle d'or », situé dans le XIIIe arrondissement de la capitale française et délimité par les avenues de Choisy, d'Ivry et le boulevard Masséna. En d'autres termes, le quartier chinois de Paris.

Un peu d'histoire...

Tout d'abord, il convient de corriger cette appellation de « quartier chinois » par « quartier asiatique », car toute une variété de peuples venus d'Asie s'y sont installés et y ont laissés leurs empreintes.

Alors, pourquoi une telle concentration d'Asiatiques à cet endroit précis ? Tout a commencé sur une erreur marketing. Dans les années 1960, Italie 13 a été lancé dans le XIIIe arrondissement de Paris, un vaste plan d'urbanisme destiné à moderniser cette zone pour y attirer de jeunes cadres. Les bâtiments insalubres ont ainsi été rasés et remplacés par d'imposants gratte-ciel. Mais l'opération fut un échec, ces immeubles au style new-yorkais n'étant pas au goût du public parisien visé. Ainsi, le projet fut arrêté, laissant dans le paysage urbain de grandes tours vides d'occupants.

Une aubaine à l'époque pour les Asiatiques du Sud-Est, qui dans les années 1970 fuyaient notamment la guerre au Vietnam et la dictature de Pol-Pot au Cambodge. Des Asiatiques (Cambodgiens, Vietnamiens, Laotiens mais aussi bien sûr Chinois) trouvèrent alors refuge dans ces appartements nouvellement construits. À proximité, ils ouvrirent des restaurants et boutiques tout en restant fidèles à leurs origines et ainsi, redonnèrent peu à peu vie à cette zone en déclin.

Et un Asiatique peut en cacher un autre ! Au fil du temps, certains ont été rejoints par leur famille, voire leurs amis, ce qui a agrandi un peu plus cette communauté. À l'heure actuelle, ce quartier constitue souvent une première étape pour les nouveaux arrivants asiatiques qui craignent d'avoir le « mal du pays » en France et qui cherchent à se faire des contacts.

On estime aujourd'hui entre 20 000 et 40 000 le nombre d'Asiatiques vivant dans le XIIIe arrondissement. Un chiffre non négligeable, mais bien faible en proportion du nombre total de résidents, s'élevant à 170 000. Effectivement, lorsque l'on se promène dans ce quartier, c'est principalement le poids commercial – et non démographique – de cette communauté asiatique que l'on observe : dans la rue, les piétons restent majoritairement « blancs », mais il semblerait que plus d'un magasin sur deux soit géré par un Asiatique.

Un vent d'Asie dans un environnement français

Accompagnée de mes amis Emmanuelle et Nicolas, un couple de Français partis étudier à Beijing en 2009 puis travailler en 2012, je me suis engagée sur l'avenue d'Ivry. Et directement, il fut clair que nous étions au bon endroit : les restaurants asiatiques abondent, des caractères chinois ornent les devantures de chaque magasin et beaucoup de passants ont les yeux bridés. Difficile de dire qu'on se croirait à Beijing, mais tout de même, ces particularités diffusent une certaine atmosphère comparable. Les odeurs alléchantes à l'entrée des restaurants nous ont également bien rappelé la capitale chinoise.

Mais ce quartier ne se résume pas à un condensé de restaurants asiatiques. Nous avons été surpris d'y trouver des commerces en tout genre, tels que maroquineries, salons de coiffure, agences immobilières, pharmacies et j'en passe, qui tous possédaient des noms bilingues. Comme l'explique Lai Rui, organisatrice des activités du XIIIe arrondissement dans une interview pour RFI, « les premiers immigrés chinois en France étaient majoritairement des hommes d'affaires, qui à leur arrivée à Paris, ont ouvert des restaurants grâce à leurs économies. C'était la solution la plus facile pour eux. » Mais au fil du temps, en parallèle avec l'essor fulgurant de la Chine elle-même, le quartier s'est développé et les activités se sont diversifiées.

D'autres éléments originaux ont par ailleurs retenu notre attention. Par exemple, le McDonald's, dont la façade a été revue selon l'architecture impériale chinoise ; la présence d'un temple bouddhiste, édifié par l'Amicale des Teochew (une association de Chinois en France) ; ou encore la mise à disposition, en libre accès, d'un journal en chinois au beau milieu de la rue.

Toutefois, le dépaysement n'est pas total, comme nous l'espérions. Mes amis m'ont avoué être un peu déçus : « À vrai dire, nous nous attendions à des petites rues piétonnes plus animées. Nous voulions retrouver les hutong ! » à la place, de grandes avenues au style haussmannien, sur lesquelles manquent les petits vendeurs des rues hélant les clients, comme en Chine.

Et vu que nous nous sommes aventurés dans ce quartier un dimanche après-midi, la majorité des boutiques étaient fermées, faute de la législation française sur le travail dominical. Les deux principaux supermarchés asiatiques, les chaînes Tang Frères et Paris Store, n'ont malheureusement pas pu nous accueillir. Tang Frères est plus réputé pour sa large variété de fruits et légumes naturels, ainsi que son personnel chaleureux. Paris Store est en revanche à privilégier pour dénicher objets de décoration et vaisselle raffinés. Le jour de notre venue, seul le supermarché Big Store était ouvert, et ce dernier grouillait de monde.

« Je n'habite pas dans ce quartier. Je viens ici pour faire des courses. J'y trouve à peu près tout ce dont j'ai besoin », nous explique dans un très bon français Sun Jingjin, une étudiante chinoise arrivée en France il y a près de trois ans. Effectivement, sont entassés – en plus de la foule – des produits chinois, vietnamiens, coréens, japonais... Sur l'étale de fruits reposent des longanes, des fruits du dragon, des jujubes... Bref, tout ce qui pourrait manquer aux Chinois dans les commerces français ordinaires. Emmanuelle commente : « Les Chinois doivent être vraiment heureux ici. Ils retrouvent un peu de leur chez-eux et peuvent facilement s'intégrer. »

Nœud des liens entre nations

Ce « Chinatown » parisien est le plus grand en Europe et le second plus grand au monde après celui de San Francisco. Ce quartier chinois a ouvert aux habitants de la capitale française un portail sur la Chine et les autres pays d'Asie. Les Parisiens ont peu à peu découvert les diverses spécialités culinaires, céramiques, soieries en provenance de l'Orient, un premier contact avec ses populations lointaines qui a éveillé pour la plupart leur curiosité envers l'Asie.

Ce « triangle d'or » est le plus important quartier asiatique de la ville, mais il faut savoir qu'il est loin d'être l'unique : son « petit frère » se prénomme Belleville et ses deux « petites sœurs » logent dans le IIIe arrondissement (près de la rue au Maire, ainsi qu'autour des rues Sainte-Anne et des Petits-Champs).

D'ailleurs, dans ces trois zones, des évènements sont organisés chaque année à l'occasion des fêtes du Printemps (Nouvel An chinois fin janvier-début février) et de la Lune (mi-automne). Ces célébrations annuelles attirent de nombreux visiteurs, ravis de pouvoir admirer danses de dragons, défilés de lanternes, concerts et expositions.

Ces échanges culturels resserrent l'amitié et la compréhension entre les peuples, mais sont également sources d'échanges économiques. À l'échelle de la ville, les Asiatiques ont tout d'abord insufflé une nouvelle vitalité au XIIIe arrondissement de la capitale à travers l'ouverture de leurs commerces. À l'échelle internationale, ce quartier promeut l'import-export entre la France et l'Asie. Et les jeunes Asiatiques, de plus en plus nombreux à venir étudier en France, garantissent l'augmentation future de ses échanges commerciaux.

Le XIIIe arrondissement de Paris est de surcroît jumelé avec la ville de Lanzhou et l'arrondissement Tianhe de Guangdong. Lai Rui indique que les visites sont fréquentes et que des projets de coopération sont en cours. À son niveau, elle essaie également d'aider les entreprises chinoises qui souhaitent investir en France à mener à bien leurs initiatives. Mais c'est désormais tout le pays qui s'efforce de suivre cette voie. Lors de sa visite en Chine en avril dernier, le président François Hollande s'est dit prêt à lever « tous les obstacles, tous les freins » aux investissements chinois, notamment en facilitant les procédures nécessaires. Une promesse qu'a réitérée fin novembre le ministre de l'Économie Pierre Moscovici, juste avant son déplacement en Chine.

 

ANAÏS CHAILLOLEAU

 

Source: La Chine au Présent

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