LOUISE CADIEUX
IL y a mille façons de découvrir Guangzhou, cette ville qui s'enorgueillit d'une histoire aussi longue que celle de Rome et dont la seule évocation faisait jadis rêver les commerçants de la route maritime de la Soie. Aujourd'hui, Guangzhou offre tant à admirer, à toucher et à humer qu'il faudrait des semaines pour arriver à s'en faire une idée plus complète. Qu'on l'aborde par le biais de l'économie, de la culture ou de la nature, qu'on s'y rende en voyage d'affaires ou pour y flâner en touriste, Guangzhou présente les multiples facettes d'une ville qui bouillonne d'activités à tous les plans. Sans contredit, elle sait faire et elle sait plaire.
…sa vie quotidienne
Avec un revenu annuel moyen par habitant de 12 000 yuans, selon les dires des locaux, on y aurait la réputation d'aimer dépenser et bien vivre. Une température douce à longueur d'année, des jardins et des squares où les fleurs s'épanouissent au fil des saisons, des rues bordées de boutiques minuscules ou de vastes magasins, des ruelles sinueuses, flanquées d'appartements avec des cages d'oiseaux suspendues aux fenêtres, des architectures qu'il fait bon admirer, des restaurants de renom, des musées commémoratifs et historiques, d'innombrables étals et maisons de thé….. il est facile de comprendre pourquoi les gens de Guangzhou aiment tant « se la couler douce.»
Motos vrombissantes, autobus bondés, métro particulièrement moderne et bien entretenu, voitures de toutes sortes, piétons aux vêtements décontractés, c'est toutefois un tourbillon de va-et-vient qui anime Guangzhou dès l'aube jusqu'à très tard en soirée. Il n'y a qu'à visiter l'un des marchés du soir (en passant, les vêtements y sont très bon marché) pour se convaincre que la vie ne s'y arrête pas à 17 h ! Comme beaucoup de personnes à Guangzhou tirent leur subsistance du commerce et sont leur propre patron, les horaires de travail peuvent donc débuter ou s'étirer selon leur gré.
Au milieu de cette animation urbaine, la rivière des Perles offre en tout temps un agréable répit: une croisière qui fait découvrir ses rives, ce qui est particulièrement agréable lorsqu'elles celles-ci sont illuminées de mille néons.
Si c'est la bonne bouffe qui vous regaillardit, des restaurants modestes ou des adresses célèbres vous attendent: mentionnons, entre autres, l'Hôtel White Swan qui permet de manger tout en s'offrant une vue imprenable sur la ville et sur les bateaux qui sillonnent doucement la rivière des Perles. Le restaurant Panxi est également un grand nom qui attire les connaisseurs. C'est le plus grand restaurant-jardin de Chine, celui qui a accueilli des sommités comme Deng Xiaoping, George Bush, Henry Kissinger et Helmut Kohl. On peut y déguster des plats qui représentent la quintessence de la cuisine cantonaise qui se caractérise par la diversité et la fraîcheur des ingrédients, de même que par le soin jaloux à préserver leur goût distinct.
…quelques sites naturels et culturels
Si l'on voulait évoquer tous les sites intéressants de Guangzhou, il faudrait sûrement des pages et des pages pour les décrire à leur juste valeur. De la célèbre sculpture des chèvres, monument emblématique de la ville devant lequel les touristes aiment se faire photographier, au quartier consulaire Shammian à l'architecture européenne, en passant par les musées et les jardins, c'est l'embarras du choix, au gré de sa fantaisie.
Les musées historiques et commémoratifs y sont particulièrement nombreux. Le plus connu, le Musée de Guangzhou, est abrité depuis 71 ans dans une structure construite en 1380 et qui servait alors de défense de la ville. C'est la construction symbole de Guangzhou. De nombreux objets qui y sont conservés témoignent de la présence arabe en Chine et des échanges qui avaient lieu, plus particulièrement avec les Philippines et l'Indonésie, à l'époque où Guangzhou était le seul port ouvert sur l'extérieur. On y trouve encore la plus ancienne carte du monde dessinée par Matteo Ricci, la plus grande horloge à eau en bronze de l'époque des Yuan (1279-1368), la première Bible introduite à Guangzhou, un bateau construit sans aucun clou et qui est évoqué dans Les Mille et une nuits.
L'Académie du clan Chen, où se trouve le Musée des arts folkloriques du Guangdong, est une magnifique architecture remontant à 1894, renommée non seulement pour ses gravures sur bois et sur pierre, ses sculptures en céramique et en chaux, ses moulages et ses peintures, mais aussi pour la variété et la richesse des objets d'art folklorique présentés. L'endroit est maintenant un arrêt recherché des itinéraires touristiques. J'avais rarement vu autant de trésors rassemblés sous un même toit: des sculptures miniatures sur perle, sur noix de coco, sur jade, sur trompe de rhinocéros, des oeuvres d'art en ivoire ou gravées dans du bois d'arbres précieux, des porcelaines, des broderies, des théières richement décorées, un éblouissement!
Le Musée d'art de Guangzhou, qui est le plus grand musée du genre en Chine, offre un véritable panorama des peintures de toutes les dynasties de Chine, et, à cet égard, constitue pour les jeunes, un formidable trésor permettant d'apprendre les techniques des anciens peintres. Le musée nous permet également de découvrir l'influence importante qu'a exercé l'art occidental sur la peinture de la région de Guangzhou: contrairement aux autres peintures chinoises, celle-ci est plus colorée.
Grâce à son climat doux à longueur d'année, Guangzhou abonde en magnifiques jardins: les jardins Yutai et Baomo compte parmi ceux-là. Le premier est le plus grand jardin botanique de Chine et ses 120 000 m2 sont divisés en 14 jardins thématiques différents. La promenade y est particulièrement agréable. Quant au jardin Baomo, c'est un jardin, tel que nos imaginations occidentales les ont toujours rêvés: des étangs où nagent des poissons rouges, des rocailles, des ponts, des arbres centenaires (et parfois millénaires), des sculptures, des fleurs odorantes, de la verdure à profusion, une intangible sérénité chez les promeneurs…. En fait, ce jardin, bâti à la fin de la dynastie des Qing (1644-1911), est typique de l'art jardinier du Sud de la Chine et des paysages d'eau du delta de la rivière des Perles. En outre, on peut y admirer un mur écran en céramique, d'une longueur de 52,8 m, listé au Guinness Book of Records. Quarante-six artisans ont mis trois ans à édifier ce mur.
… sa foire de produits d'exportation
Visiter Guangzhou sans pouvoir tâter le pouls de sa célèbre foire commerciale, la Foire des articles chinois d'exportation, ce serait un peu comme passer à côté de l'un des aspects uniques de cette ville. Deux fois l'an, au printemps et à l'automne, les marchands du monde entier s'y rencontrent pour commander ce que les consommateurs d'un peu partout dans le monde achèteront par la suite. Les hôtels de l'endroit sont bondés, l'animation commerciale est à son comble. Grâce aux bonnes « relations » de notre guide local, nous avons pu voir de près ce haut lieu du commerce mondial.
Plusieurs immenses pavillons à étages, des étalages de marchandises du plancher au plafond, une foule grouillante de commerçants et d'acheteurs, calculatrice et bons de commande à la main: on a l'impression d'entrer dans le plus grand magasin du monde. L'événement est tellement connu que, l'automne dernier, Guangzhou accueillait la 88e édition de cette foire. Encore une fois, celle-ci semble avoir été couronnée de succès: en douze jours, des exportations de plus de 14 milliards de dollars US, et plus de 105 000 hommes d'affaires venus de 174 pays et régions.
On dit souvent que Beijing n'est pas la Chine. Rien n'est plus vrai; il s'agit d'en sortir pour le constater. Guangzhou le serait-elle alors? Non plus, bien qu'elle incarne la richesse de la culture chinoise. Cependant, pour bien des Occidentaux, elle est une superbe porte d'entrée qui fait faire une douce transition entre la Chine imaginée et celle qui peu à peu va dévoiler tous ses aspects.
