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La Caméra de Claire, un film réalisé par Hong Sang-soo, avec Isabelle Huppert, Kim Min-hee et Jeong Jin-yeong, présenté spécialement au 70e Festival de Cannes
La collaboration avec des réalisateurs d'Asie
Jia Zhangke : Isabelle, vous avez travaillé avec de nombreux réalisateurs européens, mais aussi du reste du monde, avec notamment plusieurs coopérations en Asie. Par exemple, vous venez de travailler avec Hong Sang-soo. Lorsque vous abordez ces collaborations avec des réalisateurs dans une langue et un sens esthétique complètement différents, comment vous adaptez-vous tout en restant vous-même ?
Isabelle Huppert : Enfant, je voulais être actrice parce que je voulais aller ailleurs, que ce soit géographiquement ou non, explorer et voir le monde. Je veux explorer mon monde, le monde intérieur de chaque réalisateur, les idées différentes de chacun sur le monde. Pour moi, être actrice, c'est aller ailleurs avec son esprit. Il est vrai que l'expérience est différente avec des réalisateurs d'Asie, comme Hong Sang-soo, qui travaille sans script. Beaucoup décriraient son style comme improvisé, chaque matin on jouait directement une nouvelle scène, et il réalisait tout en écrivant le script au fur et à mesure. Il a tourné des films en neuf jours, en six jours. Nous nous sommes retrouvés à Cannes après une expérience de tournage de six jours. Certains pensent que tout est complètement improvisé, que l'on ne sait pas où cela va mener, mais je ne crois pas que ce soit le cas. Son style va parfois être de prendre beaucoup de temps pour les répétitions et de filmer énormément. Pendant une scène, il n'arrête pas de filmer, parfois pendant vingt heures sans interruption. Il ne pense pas que les moments d'improvisation le sont vraiment, parfois beaucoup de choses changent. Il a un rapport tout à fait différent au temps, il aime allonger le temps, mais il place une réflexion différente dans chaque moment. Aux Philippines, il y a souvent un sentiment d'immersion qui donne des scènes très réalistes, dans lesquelles on aura le reflet de l'acteur dans le feu ou dans une explosion, beaucoup de choses.
La coopération est différente avec chaque réalisateur en fonction de son style, mais cela me donne aussi beaucoup de nouvelles expériences. Avec Hong Sang-soo, nous avions souvent des perceptions très différentes, tous les acteurs autour de moi parlaient coréen, je ne comprenais pas, cela a donc été un nouveau style d'interprétation. Il y a un sentiment de solitude durant un tournage dans un pays étranger, mais j'aime vraiment la solitude, parce que cela permet de penser. Selon Hong Sang-soo, il se produit des choses folles aux Philippines, et chaque endroit amène les gens à être différents, parce que les stimuli sont différents. Pendant cette expérience, je n'ai ressenti de la solitude qu'à un moment, car tourner avec l'équipe m'a donné un sentiment très intense, j'ai pu ressentir pleinement le rôle que le réalisateur m'avait donné et devenir ce personnage.
Source: french.china.org.cn |
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