Liu Mingjiu : présenter la littérature française à la Chine
French.china.org.cn | Mis à jour le 20-06-2014
Échanges avec le milieu littéraire français
Liu Mingjiu, qui a étudié la littérature française, a été invité en France, en 1981, en 1988. « En visite académique à Paris, chaque fois, j'ai été accueilli en roi. La partie français a fait tout son possible pour m'accueillir dans des conditions favorables, organisant pour moi des rencontres et entretiens avec les plus fameux écrivains contemporains français. » Liu Mingjiu énumère un à un les noms de ces érudits avec qui il a pu communiquer : Marguerite Yourcenar, Alain Robbe-Grillet, Nathalie Sarraute, Michel Butor, Simone de Beauvoir, Hervé Bazin, Michel Tournier, Pierre Gascar, Philippe Sollers, Roger Grenier, Pierre Seghers, etc...
« Non seulement j'ai eu des contacts conviviaux et chaleureux avec ces grands maîtres littéraires et personnalités culturelles, mais j'ai tenu avec eux un dialogue savant approfondi. Ces rencontres restent au sein de ma carrière des épisodes particulièrement heureux et instructifs qu'il convient de chérir », a déclaré Liu Mingjiu. Il a retiré beaucoup de ses voyages en France, malgré leur faible nombre et leur durée limitée. À son retour en Chine, il a écrit trois livres dans lesquels il a partagé sa perception et ses idées sur l'ambiance de Paris et ses monuments : Dialogue avec Paris (rebaptisé Impressions de Paris la bohème puis J'ai rencontré les maîtres de la littérature française), L'eau sous le pont Mirabeau et Esquisses de Paris.
« Ces deux séjours en France m'ont également été d'une grande aide pour écrire Collection des œuvres littéraires françaises du XXe siècle, un pavé où sont présentés presque tous les grands hommes de lettres français du XXe siècle, ainsi que l'essence créative et les textes phares des divers courants littéraires de l'époque. » Un travail de deux à trois décennies que de composer ces 70 volumes, dont il a lui-même écrit la quasi-totalité des préfaces. D'après lui, « il est rare dans le monde actuel de transmettre d'un pays à un autre la littérature contemporaine de manière si complète. » L'influence de la littérature
Liu Mingjiu est persuadé que la littérature française a influencé la Chine. Par exemple, les philosophes des Lumières du XVIIIe siècle ont agi sur le cours de l'histoire chinoise. Au sortir du XIXe siècle, De l'esprit des lois de Montesquieu a été publié en Chine. À la fin de la dynastie des Qing, ce livre est devenu un ouvrage d'inspiration politique, voire un manuel, pour les groupes réformistes, prenant pour idéal politique le principe de la séparation des pouvoirs. Après l'introduction en Chine Du contrat social de Jean-Jacques Rousseau, les doctrines politiques populaires du droit naturel et de la souveraineté au peuple ont trouvé un écho encore plus puissant en Chine. À la Révolution de 1911, ces principes étaient devenus les idéaux des classes révolutionnaires bourgeoises se battant pour la démocratie, une lutte qui a eu de profondes répercussions sur les générations futures. Sous la République de Chine, c'est davantage dans les cercles littéraires que s'est manifesté le rayonnement des écrits français sur la société chinoise. Beaucoup d'auteurs chinois ont grandi et mûri en se nourrissant de cette manne française. La réflexion et la créativité de certains auteurs chinois sont indissociables de l'influence de la littérature française. La sincérité qui se dégage des Confessions de Rousseau se retrouve chez plus d'une plume chinoise, notamment Ba Jin et Yu Dafu ! Les Essais de Montaigne ont guidé plusieurs générations de maîtres chinois de la prose, comme Zhou Zuoren et Liang Zongdai. Émile Zola a aussi directement inspiré nombre d'écrivains chinois, dont Mao Dun. Après la réforme et l'ouverture, la philosophie anticonformiste de Sartre s'est largement diffusée parmi l'élite intellectuelle chinoise.
Néanmoins, Liu Mingjiu admet qu'à l'heure actuelle, cette influence décroît : « Que ce soit en France ou en Chine, il n'y a pas actuellement de grand penseur ou grand écrivain qui se démarque. Dans le cas de la France, personne n'a pris la relève depuis Malraux, Sartre, Camus ou Yourcenar... »
Liu Mingjiu espère que la littérature continuera de prétendre au perfectionnement de soi-même, s'insinuera aisément et naturellement dans la réalité sociale, et permettra un vrai regard sur la société, l'existence humaine, un éclairage de la pensée, ainsi que l'appréciation des belles lettres.
Liu Mingjiu mène une vie humble. Avec sa femme, ils tentent néanmoins de transmettre leur savoir à celle qu'ils appellent leur petite-fille, malgré le manque de lien de parenté. « C'est la fille d'un couple de travailleurs migrants, mais elle est née sous ce toit et a toujours grandi auprès de nous. »
LU RUCAI
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