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Jeune couple : pour les enfants de l'ethnie jingpo.

French.china.org.cn | Mis à jour le 03. 09. 2013 | Mots clés : rêve chinois; jingpo; Chine

À l'origine j'étais avocat dans une multinationale des techniques informatiques. En 2005 j'ai démissionné de ce poste pour me faire défenseur de l'environnement pour le fonds mondial pour la nature (WWF). Ces huit dernières années, je me suis consacré à des activités de communication et à des campagnes de diffusion pour cette dernière organisation ainsi que pour l'organisation américaine Conseil de défense des ressources naturelles (NRDC). Ma tâche consistait à construire des ponts entre les spécialistes de l'environnement d'une part, les médias et le grand public de l'autre.

En 2009, un nouveau chapitre s'est ouvert dans mon histoire personnelle. Au printemps de cette année là, j'ai pour la première fois suivi mon mari Anton Lustig au village jingpo à la frontière du Yunnan et de la Brimanie.Là j'ai été profondément charmée par le mode de vie en harmonie avec la nature et la joie intérieure qui rayonnait sur le beau visage des membres de l'ethnie jingpo ; pour la première fois j'ai participé au chant Munaozong du festival de l'eau (le magnifique festival annuel des gens de la minorité jingpo, où des milliers de gens effectuent une danse pendant plusieurs jours et nuits d'affilée), et j'ai été stupéfiée par le mystérieux rythme musical et la culture ethnique locale. Anton Lustig disait de lui-même qu'il était un « membre de l'ethnie jingpo né aux Pays-Bas par inadvertance », il sait parler couramment le zaiwa (le dialecte de l'ethnie jingpo). Il a obtenu un doctorat en langues chinoise et tibétaine à l'université de Leyde aux Pays-Bas. En 1991 il pénètre profondément dans la région de Dehong et entame ses recherches linguistiques et culturelles. Il devient ainsi le premier chercheur à enregistrer et décrire de manière complète, systématique et détaillée le dialecte zaiwa de l'ethnie jingpo. Il a publié un recueil de 1 700 pages intitulé : « Vocabulaire et grammaire de la langue zaiwa », permettant à cette langue méconnue d'occuper une petite place dans les bibliothèques des grands instituts et des centres de recherche linguistique de réputation mondiale.

Anton Lustig a déjà fini ses recherches depuis longtemps, mais il y a trop de choses qui l'attachent à cette terre où il a passé vingt ans de sa jeunesse. Il disait : « Je voulais toujours laisser au Jingpo hollandais que je suis la chance de continuer à faire quelque chose pour sa seconde patrie .» En juin 2012 lui et moi nous nous sommes donc installés à Dehong. Au départ je voulais seulement construire une maison en bambou dans la montagne, dessiner, écrire, éduquer les enfants, et je ne voulais pas mettre trop de monde au courant. Nous profitions des vacances pour faire des allers-retours entre Beijing et Dehong, tenter de lire des histoires aux enfants locaux et suivre des cours de peinture créative. Progressivement des amis en ont entendu parler et se sont joints à nous avec enthousiasme.

Dehong est l'une des régions de Chine les plus affectées par le trafic de drogue et le virus du sida. Les enfants jingpo de la montagne vivent dans un cadre naturel beau et diversifié, dans un endroit qui possède une riche culture, une langue propre et dont les habitants sont dotés de talents artistiques remarquables. Mais en même temps, se débattant au milieu de toutes sortes de problèmes sociaux, la région ne peut déployer librement ses atouts. La pauvreté n'est pas la cause principale du décrochage scolaire des enfants, et la seule fourniture de biens et de matériel, ainsi que le soutien à l'éducation, ne peuvent empêcher la rapide disparition de la culture traditionnelle ni le choc et la perplexité qu'amènent les radicaux bouleversements sociaux. Ils ne peuvent pallier au désespoir des jeunes en perte d'identité, qui ne voient pas à quoi peut leur servir de finir leurs études et même se désespèrent par rapport à leur futur. On ressentait de manière de plus en plus impérieuse ce qu'il nous fallait faire, et on avait aussi de plus en plus la capacité et le professionalisme pour le faire. Donc nous avons fondé un organisme de bien public que nous avons appelé « racine de banian ». Pourquoi « racine de banian » ? L'élégant et mystérieux banian, du haut de ses grosses branches, produit des racines aériennes qui descendent jusqu'au sol et absorbent les nutriments de la terre. Elles s'y enfoncent en profondeur et de jour en jour s'épaississent, jusqu'à former un solide soutien pour les lourdes branches au dessus d'elles. L'arbre a pourvoyé de l'ombre et du réconfort sur plusieurs générations, et est vénéré comme une déité par les Jingpo. Dans plusieurs villages de montagne il est un lieu symbolique où on se rassemble.

Le projet d'utilité publique de « racine de banian », en utilisant la forme de cours de théâtre traditionnel de marionnettes, de cours de vidéo, de peinture, de création naturelle et d'autres activités, va fondre la culture ethnique dans l'enseignement de la langue et de l'art, va aider les enfants à comprendre leur propre peuple, à se connaître eux-mêmes, à élargir leurs horizons, à élever leur intérêt pour l'étude, et à établir leur confiance en eux. Il va les encourager à s'exprimer par le biais de l'art, à poursuivre courageusement leur rêve, à ériger face à la drogue une résistance naturelle qui s'appuie sur l'optimisme.

Après cinq années d'efforts, le projet « racine de banian » a jeté des racines profondes et durables sur la terre des Jingpo. Le projet est actif depuis un an dans l'école primaire de Yingpan, et déjà des résultats positifs se manifestent auprès des élèves. Un centre d'activités « racine de banian » pour jeunes qui possède à la fois un style jingpo traditionnel et les caractéristiques modernes de construction, a été érigé à Dehong dans un village jingpo. Ce centre qui constitue un paradis de la jeunesse où l'on offre gratuitement aux enfants de la montagne un enseignement de la langue et de l'art, a officiellement ouvert ses portes. Ce jour là, selon la coutume des Jingpo, on a organisé une cérémonie « d'entrée dans la nouvelle habitation », tous les habitants du village ont participé en commun aux préparatifs : l'offrande au dieu de la montagne, le banquet offert à la verdure et aux eaux, les chants et les danses jingpo ou encore l'exposition des dessins d'enfants. En tout plus de 200 personnes, venues de villages proches ou lointains, ont participé.

Moi et Anton avons tous deux déjà quitté notre travail à Beijing, pour nous consacrer à plein temps au projet « racine de banian ». Malgré tout, chaque jour, jusque tard dans la nuit, nous devons en sus de cela nous acquitter à distance des tâches supplémentaires de notre second travail, afin de rembourser ce qu'il reste de l'emprunt contracté pour construire le centre d'activités de la jeunesse et de résorber l'actuel déficit dans la gestion du projet. Mais pour les enfants de l'ethnie jingpo, nous sommes prêts à persévérer résolument sur la voie que notre rêve trace devant nous.

Ecrit par LI YANG, co-fondatrice du projet d'utilité publique « racine de banian » pour l'éducation de la jeunesse.

Source: La Chine au Présent

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