Le son de cloche de Cizhong

Par : Lisa |  Mots clés : Tibet,église catholique
French.china.org.cn | Mis à jour le 23-02-2017
Le son de cloche de Cizhong

La plupart des croyants qui vont à l'église Cizhong sont des Tibétains âgés. (YU XIANGJUN)

LU RUCAI, membre de la rédaction

Cizhong est un petit village lové au cœur du département autonome tibétain de Diqing, dans le Yunnan. Malgré sa taille microscopique, ce village de 1 000 habitants seulement est connu de nombreux touristes et religieux.

Voici cent ans que des missionnaires français entreprirent ici la construction d'une église catholique, et celle-ci est aujourd'hui un haut lieu pour les catholiques des environs, mais aussi un site historique prisé des touristes chinois et étrangers. Même s'il est difficile, pour quelqu'un qui ne l'a pas vue, d'imaginer une église catholique dans un village tibétain, celle-ci rythme la vie quotidienne des villageois.

Une église catholique dans un village tibétain

Les sommets enneigés de Meili, l'une des huit montagnes sacrées du bouddhisme tibétain, situés dans le district de Dêqên entourent le col qui sépare le Yunnan du Tibet. Au pied de la montagne, le fleuve Lancang s'écoule dans un flot rapide. La vallée est entourée de parois abruptes. Une situation géographique qui fait que les villageois d'ici vivent depuis des siècles isolés du monde extérieur.

L'église de Cizhong est construite dans le style gothique et trône au centre du village. Sa construction s'est achevée en 1921 et elle fut consacrée siège du doyenné du Yunnan.

Parmi le millier d'habitants de Cizhong, on compte des Han, des Tibétains, des Lisu, des Naxi, etc. 60 % d'entre eux sont catholiques. Xiao Jieyi, 88 ans, est l'une des personnes qui connaît le mieux l'histoire du catholicisme dans ce village.

Xiao Jieyi est né en 1929 et son nom de baptême catholique est François. D'après lui, le Tibet est un haut lieu de la religion pour les Européens et il a toujours attiré des missionnaires catholiques qui espéraient y implanter leur religion. Malgré leurs efforts, ils ne parvinrent pas à convertir le Tibet, et c'est vers le Yunnan qu'ils tournèrent leur travail de prosélytisme.

Entre les vignes de derrière l'église reposent le prêtre Ouvrard, ainsi qu'un prêtre suisse. (YU XIANGJUN)

Xiao Guo'en, le père de Xiao Jieyi, a accompagné le missionnaire français Jean-Baptiste-Pierre-Victor Ouvrard de l'actuelle Kangding au Sichuan jusque dans le district de Weixi dans le Yunnan. Il s'est marié avec une Tibétaine du couvent du village de Dongba. Xiao Jieyi est le quatrième des cinq enfants de la famille. Son père connaissait bien le latin et se montra un assistant efficace pour plusieurs prêtres successifs, qui s'efforçaient, avec difficulté, de convertir au catholicisme les villageois. Avant le prêtre Ouvrard, des missionnaires catholiques apprenaient le tibétain en se faisant passer pour des marchands dans les temples du bouddhisme tibétain. Ils y ont apporté des notions de médecine occidentale et créé des écoles. Ayant gagné la confiance des habitants de la région, ils utilisèrent un phonographe pour tenter de diffuser les dogmes catholiques traduits en tibétain par les lamas des temples du bouddhisme tibétain. Peu à peu, dans ce village traditionnellement bouddhiste, le catholicisme a commencé à attirer de nouveaux croyants.

Tsering Quzong habite dans la maison qui jouxte l'église. Elle est la descendante d'un tusi naxi. On appelle tusi les seigneurs féodaux d'autrefois dans les régions frontalières chinoises peuplées d'ethnies minoritaires. C'est eux qui assuraient la gouvernance dans leur fief. La maison de Tsering Quzong présente une architecture tibétaine typique. Comme l'église qu'elle côtoie, cette construction témoigne de cent ans d'histoire. D'après Tsering Quzong, le terrain de l'église appartenait jadis à sa famille puisqu'à l'époque toutes les terres appartenaient au tusi. Un étroit passage derrière sa maison mène à quelques pieds de vigne qui poussent au Sud de l'église. « Les vignes de ce lopin de terre et celles d'un autre tout près d'ici furent plantées par les missionnaires d'autrefois », précise-t-elle, le missionnaire français Francis Goré et le missionnaire suisse Angelin Lovey arrivés à Cizhong en 1930. C'est eux qui importèrent de France la culture de la vigne. Après 1949, le gouvernement chinois a commencé à rapatrier chez eux les missionnaires étrangers, et ces deux prêtres, ainsi qu'un de leurs collègues suisse, ont été renvoyés dans leur pays en 1951.

Selon Tsering Quzong, cette vigne appartient aujourd'hui au Bureau de sylviculture de Cizhong, mais c'est elle qui s'occupe de ces terres. « J'ai entendu dire que cette variété appelée ''Miel de la rose'' a disparu en France, raconte-elle. Voici quelques années, un vigneron est venu de France pour récupérer des boutures du vignoble et tenter de les réimplanter en France. » Aujourd'hui, dans le village de Cizhong et dans les villages aux environs, la plupart des familles plantent des vignes et font du vin. En plus de la consommation locale, la plus grande partie du vin est vendue aux touristes de passage.

Depuis son enfance, Xiao Jieyi a appris le tibétain à l'église. à l'âge de 13 ans, il a été envoyé dans un institut de propédeutique dépendant de l'École catholique de Hualuoba dans le district de Weixi pour y étudier le latin, le chinois et les dogmes catholiques. « C'est pour nous transformer en religieux », explique Xiao Jieyi. En 1945, il a été envoyé à l'Institut Joseph à Kunming pour y faire des études approfondies. Il y apprit le français et le latin, avant de revenir, trois ans plus tard, à Cizhong. Il se souvient avec émotion du charisme extraordinaire du prêtre français Francis Goré et des autres prêtres. Il raconte que Francis Goré avait étudié la médecine, parlait bien le tibétain et était l'auteur d'un grand nombre de dictionnaires tibétains et de textes religieux. Ce prêtre publia même les Notes sur les marches tibétaines du Sseu-Tch'ouan et du Yun-nan. Le prêtre Lovey maîtrisait assez bien la langue des Lisu. Des textes de la Bible et les chansons religieuses en langue lisu compilés par lui connurent un certain succès parmi les Lisu. Un autre prêtre, Andrew, connu pour son caractère difficile, dirigea pourtant la construction d'une route reliant Cizhong à l'église Baihanluo près du fleuve Nujiang. Cette route continue jusqu'à aujourd'hui d'assurer la liaison entre les deux sites.

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Source: La Chine au Présent
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