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« À mes yeux, Dunhuang est bleu-vert »
Passionné d'art, le père de Laurence a très tôt conté à son fils l'histoire de Dunhuang. C'est pourquoi, aux yeux de Laurence, Dunhuang est un « temple sacré » des beaux-arts qu'il n'a pas osé visiter des années durant, de peur de le « profaner » par sa présence. Il a fallu attendre que ses créations obtiennent une reconnaissance mondiale et qu'il se fasse un nom dans le cercle de la mode pour qu'il se pose la question suivante : suis-je suffisamment « qualifié » pour aller à Dunhuang ?
Dunhuang était une ville animée au commerce florissant sur la Route de la Soie, voie de communication majeure qui reliait la Chine à l'Asie centrale jusqu'à l'Europe. C'est dans cette ville en plein désert que se trouvent aujourd'hui le patrimoine mondial des grottes de Mogao et l'extrémité de la Grande Muraille, avec les passes Yangguan et Yumen. De nos jours, les grottes de Dunhuang, avec leurs fresques mondialement connues, sont considérées comme la plus précieuse découverte du XXe siècle.
Les peintures murales de Dunhuang ont été restaurées sous diverses dynasties. C'est la raison pour laquelle elles revêtent plusieurs couches. Si une couche s'écaille, elle laisse apparaître une autre fresque splendide. Laurence a été profondément impressionné par l'art de Dunhuang. Il raconte : « Je me suis senti traverser les âges, découvrant de mes propres yeux comment le temps a sculpté et peaufiné les œuvres. » Il s'est beaucoup inspiré des totems, de l'architecture, des vêtements et des ornements sur les fresques de toutes les dynasties. « Dunhuang évoque à chacun des couleurs différentes. À mes yeux, il est bleu-vert, notamment parce que depuis les dynasties des Tang (618-907) et des Song (960-1279), la plupart des totems présentent cette teinte. Par ailleurs, je garde un profond souvenir des magnifiques apsaras volantes. Tous ces éléments se retrouvent dans les robes que je dessine. »
En 2015, Laurence a participé pour la deuxième fois à la Fashion Week haute couture de Paris et a choisi Dunhuang pour thème de ses créations. Ainsi a-t-il fait rayonner l'art de Dunhuang, ville emblématique sur la Route de la Soie, en direct de Paris, capitale de la mode située à des milliers de kilomètres.
Ji Xianlin, célèbre écrivain, historien et linguiste chinois, a souligné un jour : « Dans notre monde se distinguent seulement quatre systèmes culturels indépendants dotés d'une longue histoire, d'un vaste territoire ainsi que d'une influence profonde et durable : la Chine, l'Inde, la Grèce et le monde musulman. Il n'en existe pas un de plus. La région couvrant Dunhuang et le Xinjiang est la seule où se côtoient ces quatre systèmes culturels. Il n'en existe pas une de plus. » À l'instar de Dunhuang, les créations de Laurence naissent de la fusion entre cultures orientales et occidentales. Le couturier chinois a beaucoup voyagé et a même suivi des études en France. Il a appris à maîtriser la combinaison des couleurs et la découpe tridimensionnelle auprès d'artistes français. « Les Occidentaux utilisent l'écart entre le tour de poitrine et le tour de taille, ainsi que le contour de la jupe, pour marquer la taille et souligner les formes. En comparaison, les vêtements traditionnels chinois suivent un modèle droit. C'est par l'aspect ample de la tenue que l'on fait ressortir la beauté du corps humain. De mon côté, j'exploite la coupe plus étudiée des Occidentaux pour présenter les conceptions artistiques propres à la culture traditionnelle chinoise. »
Source:La Chine au Présent |