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L'éducation est aussi cruciale en France qu'en Chine

French.china.org.cn | Mis à jour le 31. 05. 2013 | Mots clés : éducation,  Sciences Po,  INALCO, Célestin Freinet, ZHONGJUN

La souplesse du cadre de l'instruction obligatoire ouvre de manière spectaculaire la voie à l'éducation de la créativité et à l'innovation pédagogique, générant une série importante d'expérimentations et de pratiques pédagogiques. Ces nouvelles pédagogies mettent souvent l'élève au centre de l'éducation et mettent en valeur son développement autonome et responsable, son esprit d'initiative et son adaptabilité sociale.

« La main à la pâte » est sans doute la méthode qui a le plus influencé l'instruction dans l'école publique. Initiée en 1996 par trois membres de l'Académie des Sciences, tous physiciens, cette méthode s'est développée autour de l'enseignement des sciences, à travers l'investigation scientifique, pour enseigner non seulement les sciences et les technologies, mais aussi l'exploration du monde, les connaissances scientifiques, l'expérimentation et le raisonnement, les capacités linguistiques, les débats publics et l'éducation civique. Afin d'encourager de plus en plus les instructeurs à utiliser cette méthode, la fondation « la main à la pâte » a fait établir un prix national au Ministère de l'Éducation afin de récompenser les projets « la main à la pâte » de la maternelle jusqu'à l'université. Cette pédagogie a été introduite en Chine dès l'an 2000 dans des classes expérimentales à Nanjing, Shanghai, Xi'an et Shantou et se développent dans un nombre croissant d'écoles maternelles et primaires. Malgré les succès de certaines expérimentations, la plupart s'avèrent assez décevantes tant au niveau quantitatif qu'au niveau qualitatif, en raison d'une part d'un système éducatif trop rigide, et de l'autre d'un esprit trop conservateur des dirigeants d'institutions.

« L'école moderne » ou « technique Freinet », initiée par Célestin Freinet, est sans doute la méthode la plus répandue dans l'instruction privée. Cette technique développe une série de méthodes ancrées dans la réalité sociale, en vue de l'émancipation de l'enfant. Les principes de base sont l'adaptation au rythme de l'enfant, le développement de son esprit critique, la latitude laissée à l'enfant de créer spontanément des connaissances avec adultes et enfants, le fait de s'exprimer, d'assumer des responsabilités, de coopérer, et de s'ouvrir à la société extérieure. La Calendreta, réseau d'écoles combinant l'école moderne et le bilinguisme français-occitan, se répand largement dans tout le Sud de France. Historiquement, la dominance de la langue nationale, à cause d'un certain nombre d'amalgames législatifs et politiques depuis la Révolution française, a mis sur le côté les langues régionales, de la même façon que les dialectes chinois ont été mis sur le côté par le mandarin. Le gouvernement chinois continue à promouvoir le mandarin au détriment des dialectes après l'avoir rendu obligatoire dans l'école, alors que la France aujourd'hui accorde de plus en plus d'importance aux langues régionales au nom de la sauvegarde du patrimoine culturel. Elle soutient largement ces initiatives éducatives aux côtés de l'Union européenne, des régions et des municipalités. Un centre Freinet a été créé à Hangzhou, chef lieu de la province côtière du Zhejjiang depuis quelques années, mais, pour des raisons légales et administratives, il reste pour l'heure limité à la maternelle.

La pédagogie Montessori, autre forme de ‘Nouvelle Éducation' qui participe au même mouvement que la technique Freinet, est appliquée dans certaines écoles surtout privées où la pédagogie mutuelle est en train de gagner du terrain. Ces méthodes sont connues en Chine et de nombreuses publications leur sont consacrées, mais dans la pratique, son application reste rare, sans doute à cause de la rigidité du cadre légal.

Dans les quatre coins du monde, on croit que les parents chinois accordent une importance inégalée à l'éducation de leur enfant. En réalité, le souci des parents pour leurs enfants est plutôt un phénomène universel. Les parents français aiment tout autant leurs enfants, certains ne les gâtent peut-être pas tant, mais ne s'inquiètent pas moins pour les devoirs et l'école que les parents chinois. Pour placer leur enfant dans une meilleure école, les parents déménagent plus souvent que la maman de Mencius. Le système de la carte scolaire ne les limite heureusement pas comme le Hukou (registre familial attachant les droits des citoyens à leur lieu d'origine, séparant notamment les citadins des ruraux), ce qui facilite grandement leur migration à l'intérieur du pays. Par ailleurs, le gouvernement français s'est enfin rendu compte de la charge scolaire de ses élèves, qui est la plus élevée d'Europe, et décidé de modifier dès la rentrée prochaine le rythme scolaire, en limitant la durée journalière de l'école et en augmentant les périodes de repos (une demi-journée de repos supplémentaire par semaine, soit désormais des semaines de quatre jours de travail scolaire) et les activités périscolaires.

Du fait d'une abondance relative et d'une plus grande diversité de l'offre éducative en France, la compétition entre les élèves est plus faible, mais la compétition pour entrer dans des « universités d'élite » (grandes écoles d'ingénieurs et de commerce notamment) s'accroit d'année en année. Les universités publiques n'ont pas le droit de faire passer des examens d'entrée, mais elles doivent pratiquer une forme de sélection quand les candidats à l'inscription sont nombreux et ont obtenu les mêmes résultats au baccalauréat. Les écoles dites « d'élite », entre autres Polytechnique, Sciences Po, école des Mines, Ponts-et-Chaussées, etc. ne se gênent pas pour faire passer des concours supplémentaires. Une récente réforme a « dézoné » les lycées parisiens en leur donnant le droit de sélectionner les élèves, tout en les sortant du système de la carte scolaire, ce qui met la vie des collégiens français « sous pression à la chinoise ».

La répartition géographique des ressources éducatives est également une question difficilement évitable. L'État s'efforce de répartir les ressources nationales de manière juste entre les régions et les institutions, mais en dehors du salaire des enseignants, une grande partie des financements viennent des régions et des municipalités. Le degré de richesse des régions et des municipalités a donc un impact sur les écoles. L'inégalité entre les régions est souvent due à la répartition sociale de la population -- pour des raisons économiques et en raison de l'immigration, certains lieux concentrent la pauvreté, le chômage et les problèmes sociaux, ce qui affecte le niveau des élèves et leurs résultats scolaires. Cette question se pose presque de la même façon pour les zones défavorisées de certaines grandes villes de Chine, en plus des questions liées à la politique du Hukou. Le gouvernement chinois a obtenu des résultats très significatifs depuis 2008 dans la réduction des différences villes-campagnes en matière éducative et dans la scolarisation des travailleurs migrants, mais d'autres formes d'inégalité dans l'éducation se posent inévitablement au nouveau gouvernement.

*Ecrit par ZHONGJUN, enseignant à Sciences Po et à l'INALCO de Paris

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Source: french.china.org.cn

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