Envoyer [A A]

Passé et avenir de la Chine, observations d’un Chinois d’outre-mer

French.china.org.cn | Mis à jour le 29. 10. 2019 | Mots clés : Chinois d’outre-mer

En 1978, Deng Xiaoping, lassé des querelles idéologiques, lança la politique de réforme et d’ouverture. Dès lors, d’année en année, on a pu assister aux progrès fulgurants de la Chine, tant sur le plan économique, scientifique que culturel. On a vu les Chinois reprendre confiance en eux. L’esprit d’initiative et d’entreprendre s’épanouit partout, aussi bien dans les grandes villes qu’à la campagne.

Guangzhou, capitale de la province du Guangdong, ville d’origine de mes parents, en est le parfait exemple. La ville a connu un boom faramineux : dans tous les quartiers et recoins, des immeubles poussèrent comme des champignons après une pluie d’automne ; la ville se fut bientôt retrouvée sillonnée de larges boulevards et d’avenues.

Faisant suite à la tournée dans le sud de Deng Xiaoping en 1992, au cours de laquelle il se rendit à Shenzhen et annonça urbi et orbi cette phrase devenue célèbre :  « peu importe qu’un chat soit noir ou blanc, pourvu qu’il attrape des souris ! », la région s’était métamorphosée à vue d’œil. Guangzhou changea de visage ; les transformations furent si profondes et rapides que chaque année, on avait l’impression de découvrir une ville nouvelle. D’ailleurs, lorsqu’on achetait un plan de la ville, il n’était déjà plus valable l’année suivante. Des rues et des avenues ont surgi de nulle part, des quartiers ont été complétement rénovés et sont devenus méconnaissables. Les villes secondaires comme Foshan ou Shunde suivirent la même trajectoire et connurent le même essor.

Chinois d’outre-mer né à la fin des années 1940 sur l’île de La Réunion (territoire français), j’ai été témoin direct de ces profonds changements.

Mes souvenirs sont encore vivaces de ma première prise de contact avec la Chine. C’était en mai 1976, je m’y suis rendu en compagnie de mes parents qui étaient tout fiers de présenter leur fils chirurgien à la famille restée en Chine. Au passage de la frontière à Luohu, séparant Hong kong de la partie continentale de la Chine, nous étions chargés de 5 gros ballots contenant toute sorte de vivres (des biscuits, des saucisses sèches, du canard confit, du saindoux en boîte, des condiments de toute sortes, etc.), ainsi que des coupons de tissu, une machine à coudre avec tout le nécessaire (aiguilles, fils, boutons etc.), des fils et ampoules électriques, des réveils, des montres, des ventilateurs etc., et aussi deux vélos de la marque « hirondelle ». C’était l’époque de la fin de la Révolution Culturelle, la Chine manquait de tout.

La petite ville de Luohu constituait une zone frontière où les rares bâtiments étaient occupés par la douane et la police des frontières. Du fait de la lenteur des services de douane, nous avions été retardés et du coup nous avions raté notre train. il a fallu chercher à nous loger sur place. Mais le seul hôtel de Luohu était déjà complet. Nous avons dû nous rabattre vers un petit village nommé Futian situé à quelques kilomètres et peuplé essentiellement de quelques milliers de pêcheurs. Dire que des années plus tard, ce village a fusionné avec d’autres villages pour former le district de Shenzhen devenu en moins de deux décennies une véritable mégalopole.

Une fois arrivée à Guangzhou, pour se déplacer dans cette ville à l’époque de seulement 4 millions d’habitants, il fallait soit emprunter le bus, soit prendre le taxi. Les bus étaient généralement bondés, dans un état épouvantable et roulaient en faisant un bruit infernal ; quant aux taxis, mieux valait les réserver à l’avance auprès de l’hôtel, car les chauffeurs n’obéissaient pas aux clients mais aux directives de l’hôtel. Autant dire que ce n’était pas simple. Il y avait aussi des vélos tripousse en grand nombre qu’il était plus commode d’emprunter faute de taxi disponible. Mais l’on se sentait plutôt gêné quand on voyait au bout de 30 minutes le conducteur suer à grosses gouttes… Heureusement, nous avions acheté deux vélos à l’entreprise China Travel à Hong Kong.  

Aussi, avant de les offrir à la famille, avons-nous eu la bonne idée de les utiliser dans les rues de Guangzhou, larges et peu fréquentées où nous ne croisions guère que quelques vieilles voitures, sorte de guimbardes ambulantes, quelques antiques camions émettant une épaisse fumée noire, et quelques bus brinquebalants. Ces rues étaient quasi désertiques après 16 heures.

Ma tante, la sœur cadette de ma mère, vivait en Chine avec ses 5 enfants. En 1976, nous l’avons revue pour la première fois après plusieurs décennies de séparation. Nous l’avons invitée avec toute sa famille au restaurant de l’hôtel Orient, endroit à l’époque inaccessible aux locaux, réservé uniquement aux étrangers ou aux Chinois d’outre-mer. Lors du premier repas que nous avons pris ensemble, nous avons commandé un nombre de plats incalculable et je fus effaré de les voir engloutir autant de nourriture en un si court laps de temps. Comme s’ils n’avaient rien mangé depuis des lustres! C’était évidemment lié à la dure réalité de pénurie chronique de l’époque et au système de tickets de rationnement ; les gens n’avaient le droit qu’à quelques kilos de riz par mois, une centaine de grammes de viande, un peu de sucre et de sel, des légumes séchés. Les rares magasins étaient peu achalandés quand ils l’étaient !

1   2   >  


Suivez China.org.cn sur Twitter et Facebook pour rejoindre la conversation.
Source:La Chine au Présent