Retour sur les zones sinistrées
Tout le monde aura vu et revu les images de dévastation causée par la force aveugle de la nature, et chacun vient au Sichuan avec ces horreurs en tête. Pourtant, la réalité qu'on y trouve est tout autre que ce à quoi l'on pourrait s'attendre. À l'instar des opérations de sauvetage, le plan de reconstruction de la région, décidé dès que la situation s'est stabilisée, a été appliqué avec une célérité stupéfiante et a démontré la capacité du gouvernement chinois à organiser des projets sur une très vaste échelle. Dès la réunion du Conseil des Affaires d'Etat du 21 mai 2008, plus de 70 milliards de yuans ont été débloqués pour les opérations de secours et de reconstruction. Au total, plus de 100 milliards de yuans ont été investis dans les travaux de reconstruction.
Prenons le district de Beichuan de la ville de Mianyang, seul district autonome de la minorité qiang de Chine, qui a payé le plus lourd tribut lors du séisme (environ 16 000 victimes, soit près de 10 % de la population). Il y a trois ans, cet endroit n'était plus que grabats, poussières et désolation. Compte tenu de sa position encaissée entre d'abruptes montagnes, Beichuan a été sujet aux destructions directes du séisme mais également à des glissements de terrain. Prenant en considération cette situation géographique particulière, les autorités ont décidé de déplacer entièrement le district à quelques kilomètres de son ancien emplacement, sur une friche traversée par la rivière Anchang. Pour ce faire, Beichuan a bénéficié de l'aide massive de la région du Shandong. Il faut rappeler en effet que le gouvernement central, dans un souci d'utilisation efficace de la solidarité interprovinciale, a attribué pour chaque projet de reconstruction un investisseur attitré. C'est ainsi que le Shandong a apporté à Beichuan une contribution de 1,2 milliard de yuans et affecté 35 000 personnes au projet.
Quand nous avons visité la nouvelle ville, l'essentiel des travaux de reconstruction était achevé. À Beichuan, les autorités ne se sont pas contentées de reconstruire une ville sur le modèle de la ville disparue. Elles ont vu les choses en grand et ont fait le pari, tout comme l'ensemble des villes frappées par le séisme, que le malheur subi devait être aussi l'occasion d'amorcer un nouveau départ. Pari tenu : la nouvelle ville est un modèle d'urbanisme moderne. La maquette exposée dans le musée de la ville permet d'apprécier la manière dont a été pensé l'avenir. La ville se divise en différents pôles : quartiers d'habitations dits « de réinstallation » pour les familles originaires de Beichuan, immeubles à vocation commerciale pour les personnes désirant s'y installer, quartier culturel comprenant une bibliothèque, un musée d'art et un centre culturel, pépinière d'entreprises destinées à accueillir les entreprises venant investir à Beichuan, stades et gymnase, complexe hospitalier et centre-ville à vocation touristique, s'inspirant de l'architecture traditionnelle des Qiang. Comme nous l'explique M. Han Guijun (韩贵钧), responsable de la communication du district, et comme nous le répèteront bon nombre de responsables politiques locaux, le principe présidant aux travaux était que « les plus beaux édifices soient les habitations, les plus avancées soient les hôpitaux, et les plus sûrs, les écoles. »
Le nouveau collège, bénéficiant de l'appui de l'UNESCO, où enseignent des professeurs venus de leur propre chef de tous les coins de Chine, n'a rien à envier en termes d'équipement aux établissements des grandes villes. Dans chaque salle de classe, le traditionnel tableau noir dissimule derrière ses panneaux coulissants un équipement audiovisuel de pointe. Terrains de sports, dortoirs, salles de classe, toutes les installations de l'établissement ont été construites en s'appuyant sur les règles antisismiques les plus avancées.
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