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Le Sommet du G20 qui va se tenir les 4 et 5 septembre en Chine à Hangzhou, chef-lieu de la province orientale du Zhejiang, survient à un moment crucial. La croissance mondiale reste poussive et la Chine tente de procéder à un atterrissage en douceur de son économie après des décennies de développement effréné. C'est dans cette configuration qu'un nouveau paradigme doit prendre jour, et Beijing entend bien prendre les devants pour jouer un rôle moteur et faire valoir son modèle de développement qui peut se résumer en trois mots clés : innovation, inclusion et interconnexion.
La Chine, deuxième économie mondiale, se classe au premier rang mondial en termes de volume des échanges commerciaux. Le pays a pleinement bénéficié de la mondialisation depuis son accession à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) au début des années 2000 et est même devenu un des principaux moteurs de l'économie mondiale depuis la crise financière de 2008. Depuis l'accession au pouvoir de Xi Jinping, la Chine déploie des efforts incessants pour transformer le modèle qui a prévalu au cours de ces trente dernières années.Il s'agit principalement d'éviter de tomber dans le piège du revenu intermédiaire, un phénomène identifié par Barry Eichengreen, professeur à l'université de Cambridge et à l'université de Californie à Berkeley. Ses travaux montrent comment le développement des économies émergentes plafonne lorsque le PIB par habitant atteint la tranche de 10 mille à 11 mille dollars par an (15 mille à 16 mille dollars dans certains cas).
Pour éviter de s'engouffrer dans ce piège, la Chine s'est engagée dans la mise en place d'un ambitieux programme de réformes structurelles et dans le renforcement de la mondialisation. Le pays veut ainsi faciliter et accroître à la fois la flexibilité des marchés et la circulation des biens et des capitaux. Ces initiatives reposent dans une large mesure sur une refonte de l'environnement international. La redéfinition de la gouvernance économique mondiale est à cet égard essentielle. Li Baodong, le vice-ministre chinois des Affaires étrangères l'a d'ailleurs rappelé : le Sommet du G20 doit porter sur la gouvernance économique mondiale, le commerce et les investissements. « Le Sommet du G20 à Hangzhou porte sur l'économie. Nous sommes convenus de nous focaliser sur le développement économique, et de ne pas nous laisser distraire par d'autres sujets. Si nous voulons réussir à parvenir à quelque chose, nous devons y consacrer toute notre énergie. Le Sommet de Hangzhou doit donc se concentrer sur les questions économiques, sur les moyens de parvenir à une croissance durable, soutenue et équilibrée. » , a-t-il déclaré le 15 août à Beijing
L'innovation est considérée comme une des clés qui permettront de résoudre les principaux problèmes auxquels le monde est confronté et qui chaque jour se posent de manière plus aiguë, qu'il s'agisse du changement climatique, de la pénurie d'énergie et de la raréfaction des ressources, comme de la santé ou du vieillissement de la population. L'innovation ne doit pas avoir uniquement pour objet de prolonger les cycles en cours et maintenir les structures existantes, mais doit surtout ouvrir des voies radicalement neuves, substituer des techniques inédites à celles héritées du passé. L'innovation est ainsi plus que jamais la panacée de notre temps : tout comme l'Union européenne dans les années 2000, la Chine en a fait une priorité et le président chinois Xi Jinping souhaite que le pays devienne une économie orientée vers l'innovation d'ici à 2020. Elle est censée stimuler la croissance, repousser les limites des sciences et des technologies, protéger la planète et assurer la transition énergétique, mais il est nécessaire de s'assurer que ces buts soient compatibles avec les valeurs de la société et que les changements induits soient opportuns. C'est ce que le XIIIe Plan quinquennal (2016-2020) prend en considération et c'est un des principaux volets de la politique de l'offre mise en place depuis l'an passé.
Francis Bacon (1561-1626), le père de l'empirisme, a fait entrer le mot « progrès » dans le vocabulaire de la modernité au début du XVIIème siècle : même si nous sommes juchés sur les épaules des géants, nous pouvons voir plus loin à condition de progresser, pensait-il. Son essai « De l'innovation » est frappant d'actualité : l'innovation lutte contre les effets corrupteurs du temps. « Certainement chaque médicament est une innovation, et celui qui ne s'applique pas de nouveaux remèdes doit s'attendre à de nouveaux maux car le temps est le plus grand innovateur, et si le temps, bien sûr, change les choses pour le pire, et que la sagesse et le conseil ne les modifient pas pour le meilleur, quelle sera la fin ? »
L'innovation sera ce remède qui permettra d'entrer de plain-pied dans une nouvelle ère de croissance durable, soutenue et équilibrée. À Hangzhou, la Chine veut faire profiter au monde de sa sagesse et ses conseils et se poser en champion d'une nouvelle approche de la gouvernance économique mondiale en favorisant l'inclusion et l'interconnexion. L'initiative « Ceinture et route » (la Ceinture économique de la Route de la Soie et la Route maritime de la Soie du XXIème siècle) et la création de la Banque asiatique d'investissementdans les infrastructures (BAII) n'en sont que les composantes les plus visibles. Comme le faisait remarquer à Beijing à la mi-août Clare Pearson, présidente de la Chambre de commerce britannique en Chine, ce 11ème Sommet du G20 à Hangzhou est ainsi « le bon forum, au bon moment et au bon endroit ».
par Jacques Fourrier (l'auteur est un journaliste et commentateur basé à Beijing)
Source: french.china.org.cn |
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