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Economie chinoise : le choc de compétitivité

French.china.org.cn | Mis à jour le 16. 04. 2015 | Mots clés : Economie chinoise : le choc de compétitivité

À Xinyi (province du Jiangxi), l'industrie de la tannerie se met à jour pour aider au développement du secteur. On voit des ouvrières qui confectionnent des vêtements en cuir.

Depuis plus de vingt ans maintenant la presse économique internationale s'étonne et s'inquiète du « miracle chinois ». Feu de paille pour les uns, esbroufe, « bulle spéculative » pour les autres, simple effet des délocalisations occidentales pour les troisièmes, la plupart des économistes s'accordent depuis bien des années à dire que cela ne pourra pas durer. Les faits vont enfin leur donner raison. Le modèle économique chinois construit sur la main d'œuvre bon marché a assuré le décollage du pays. Après trois décennies de succès assez remarquables, ce modèle s'essouffle. Il doit se transformer.

Un modèle bizarrement décrié en Occident, où se trouvent ses principaux bénéficiaires. D'abord les consommateurs, qui ont profité d'une inflation historiquement basse en partie grâce à l'essor des produits « made in China » qui allégeaient le panier de la ménagère au fur et à mesure qu'ils le remplissaient. Les grandes entreprises d'Europe et des États-Unis ensuite, qui ont, souvent grâce à de judicieuses délocalisations ou à leur implantation sur le marché chinois en forte croissance, enregistré des profits record. Cerise sur le gâteau, les politiciens démocratiques ont pu se targuer à peu de frais de progrès écologiques, lancer et réaliser des programmes de « lutte contre le réchauffement » principalement basés sur le fait que la pollution industrielle et les émissions de CO2 s'en allaient vers la Chine.

La Chine, elle, prenait son mal en patience en fourbissant son outil industriel. Automobile, avions de ligne, vins, électronique, pétrochimie, elle accueillait les investisseurs et se contentait d'un rôle de figurant, attirant sur son territoire et donc auprès de ses citoyens, technologies, savoir-faire et brevets. Un rôle de figurant ? Il faut savoir qu'un iPad par exemple, à sa sortie de l'usine à Shenzhen, ne revient qu'à 33 % de son prix de vente, soit $165. Une fois payés les coûts de l'énergie et des matières premières, de main-d'œuvre et d'amortissement, la marge bénéficiaire de son inventeur Apple est de 30 %. L'agence américaine d'études de marché iSuppli a révélé qu'Apple paie 11,2 dollars US à Foxconn pour l'assemblage. Le coût total de ses composants est de 219,35 dollars. Le processeur A4, développé par Apple, coûte 26,8 dollars, la mémoire flash de 16 gigaoctets, 29,5 dollars. Le plus cher dans l'iPad, c'est son écran tactile de 9,7 pouces, fabriqué par LG pour 95 dollars. Selon les modèles, la marge d'Apple varie donc, une fois la distribution rémunérée, entre 30 et 40 % du prix de détail.

Ce cas d'école montre bien l'intérêt qu'il y a à s'élever dans la pyramide de la chaîne de valeur : les plus gros bénéfices reviennent au propriétaire de la marque et des innovations. Ensuite vient le commerce de détail. Puis les fournisseurs de produits à forte valeur ajoutée, sud-coréens et taïwanais. On ignore quelle est la marge des fournisseurs de matières premières et d'énergie, mais ce qui est sûr, c'est que tout en bas de l'échelle, on retrouve les malheureux employés chinois de Shenzhen qui assemblent, dans des conditions de travail très dures et les tensions sociales typiques des industries low-tech, ces babioles dont rêvent les consommateurs.

Ce cas d'école se répète, avec des variantes, dans toutes les industries innovantes globalisées. Enfin, il se répétait, car la situation est en train d'évoluer.

Thomas Piketty nous rappelle dans son livre Le capital au XXIe siècle que, historiquement, sur une longue période, la croissance économique ne dépasse guère 1 % par an. Les fortes croissances sont toujours (comme aujourd'hui en Chine ou hier en France) des phénomènes de rattrapage limités dans le temps. Les dirigeants chinois ne disent pas autre chose lorsqu'ils évoquent la « nouvelle normalité », celle où la croissance économique va s'assagir, où la population va entrer dans une prospérité moyenne, et surtout où va très rapidement se tarir dans le pays l'appoint de forces low-cost des campagnards et des jeunes diplômés.

Quel modèle pour l'économie chinoise d'après-2015 ?

Dividende démographique négatif, élévation du niveau de qualification, croissance des salaires conduisent déjà dans certaines régions et dans certains secteurs à des pénuries de main d'œuvre. Les salariés chinois, moins nombreux et de plus en plus qualifiés, vont demander et obtenir un adoucissement de leurs conditions de travail. De nombreuses entreprises, étrangères ou chinoises, l'ont compris et redirigent leurs investissements vers des pays désormais moins chers : Vietnam, Bangladesh, … France, même, car dans certains cas les économies de logistique compensent la différence des salaires.

L'appréciation progressive du yuan, qui devrait se poursuivre, aura des effets importants : non seulement la baisse des prix des produits importés pour le consommateur chinois, mais aussi renchérissement des produits chinois sur le marché mondial. Double défi : il faudra désormais séduire des consommateurs plus riches, donc plus exigeants, dans un contexte où les produits nationaux verront leur avantage-prix se réduire. Seule solution : monter de plusieurs crans dans l'échelle de la valeur ajoutée.

Mission impossible ? Voire. La Chine commence à voir poindre les fruits d'un effort entrepris de longue date, alliant investissements dans la recherche et développement, dans l'enseignement, la coopération internationale et les produits développés localement. Il y a l'exemple de la cigarette électronique, inventée en Chine et revendue à un fonds d'investissement US. Ou de WeChat, le service de messagerie qui croise téléphonie et réseau social. Ou de Xiaomi, le smartphone bon marché qui, de l'avis de ses utilisateurs, dépasse en ergonomie son prestigieux concurrent à la pomme… L'effet de rattrapage technologique joue à plein. Dans d'autres secteurs, nucléaire, génétique, chimie, c'est la recherche, avec moins de contraintes budgétaires, légales et d'opinion, qui progresse à pas de géant.

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Source: french.china.org.cn

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