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par Lisa Carducci
Cette année, le 5e jour du 5e mois lunaire tombe le 25 juin. Ce sera la fête des Bateaux-Dragons, appelée en chinois « Duanwujie », ce qui signifie littéralement la fête du Double Cinq.
Comme vous avez dû vous en rendre compte, à chaque grande fête chinoise correspond un mets; en l’occurrence, les zongzi pour la fête des Bateaux-Dragons. Mais pourquoi donc?
Une ethnie qui vivait dans les actuelles provinces du Jiangsu et du Zhejiang célébrait son totem, le Dragon céleste, en lui offrant des zongzi.
Puis, Duanwujie est devenu la commémoration de Qu Yuan, un poète patriote qui a vécu il y a 2500 ans. Dégouté de la dépravation de l’aristocratie d’État, Qu Yuan proposa des réformes afin que l’on puisse choisir uniquement des personnes honnêtes et compétentes pour diriger l’État, mais il rencontra l’opposition des forces corrompues et fut exilé. Une dizaine d’années plus tard, âgé de 62 ans, il serra une énorme pierre entre ses bras et se jeta dans le fleuve Miluo, dans la province du Hunan actuelle, afin de ne pas voir sa patrie vaincue par l’ennemi. Les habitants, qui l’aimaient bien, se mirent à chercher son corps à bord de nombreuses barques et jetèrent des zongzi aux poissons afin qu’ils épargnent la dépouille du poète. De là vient la course traditionnelle à l’occasion de la fête des Bateaux-Dragons.
À Jingzhou, au Hubei, j’ai eu une fois l’occasion d’assister à la course annuelle et internationale des bateaux-dragons. Le plus grand bateau-dragon du monde mesure 69 m de long sur 2,38 m de large et 70 cm de profondeur. Il pèse 23 tonnes et peut accueillir à bord 178 personnes.
Comme je suis retenue à Montréal par le COVID-19 et que mes photos imprimées (avant l’ère de la photo électronique) sont à Beijing, je vous laisse imaginer l’évènement.
On peut acheter des zongzi tout prêts, si l’on ne voit pas le plaisir de les confectionner à la maison.
Les zongzi sont faits de farine de riz glutineux, farcis de divers ingrédients et enveloppés de larges feuilles de bambou (parfois d’autres plantes à feuilles larges et plates). Quel que soit le côté d’où on les regarde, ils ont la forme d’un triangle. On les fait cuire à la vapeur, puis on les déballe au moment de les consommer.
Voici une petite anecdote sur « mon » aventure d’un jour de fête des Bateaux-Dragons.
À l’approche de la fête, une collègue de travail m’avait invitée chez elle, dans l’ouest de Beijing. Si j’avais déjà consommé des zongzi depuis plusieurs années, je n’en avais pourtant jamais confectionné moi-même; mais j’étais prête à apprendre.
Nous étions déjà à l’œuvre, chez elle, quand elle reçut un appel – une urgence; elle me laissa donc confectionner les petits paquets triangulaires avec son mari, mais à vrai dire, il n’était pas très doué… Nous avions déposé nos confections sur deux assiettes séparées, et quand sa femme est revenue, elle a rendu son verdict: « Lisa manque évidemment d’expérience! », jugeant que les moins beaux étaient ceux de ma confection. Pourtant, ils étaient très acceptables, les miens, ne trouvez-vous pas ?
Cette histoire me rappelle les années où j’habitais Shunyi, un arrondissement au nord-est de Beijing. La veille du Chunjie (le Nouvel An chinois), ma voisine chinoise m’apportait toujours une portion de jiaozi (raviolis). J’en confectionnais aussi, mais je n’osais jamais lui rendre la pareille pour ne pas lui faire « perdre la face », car les miens étaient (je le dis en toute humilité) bien plus beaux que les siens. Chaque fois que je montre cette photo, on dit, en voyant les moins jolis : « C’est évident, c’est une étrangère qui les a faits ! »
Qu’en dites-vous? Les plus égaux, ce sont les miens; les « infirmes », ceux de la Chinoise!
Cette année, je suis confinée à Montréal à cause de la pandémie. Il n’y aura ni fête, ni zongzi. Premièrement, les marchands chinois de produits alimentaires n’auront surement pas reçu de cargaison de feuilles de bambou, donc les Chinois de Montréal ne pourront ni en confectionner ni en acheter des surgelés. Deuxièmement, les zongzi ne sont pas un mets que l’on consomme au restaurant. Et troisièmement, à ce que je sache, cette tradition chinoise n’a pas encore franchi le seuil du continent américain.
Source:french.china.org.cn |