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par Lisa Carducci
Depuis la plus haute Antiquité, les humains se sont parés de divers bijoux. Si les hommes des cavernes et les générations suivantes portaient des bracelets aux chevilles, des anneaux au nez, de lourds colliers faits de fruits et de coquillages, plus on avance vers notre époque, plus les ornements se raffinent, se diversifient, et deviennent un apanage plutôt féminin.
Au début de cette chronique, j’ai parlé des vêtements brodés et des accessoires de tissu qui leur servaient de parure. Il y aurait dans la parure toute une philosophie à découvrir; mais puisqu’il faut nous résumer, je m’en tiendrai aux bijoux mêmes, et parmi eux, à ceux que je possède et qui ont pour moi une histoire.
On aura vu au cours de voyages au sud-ouest de la Chine, à la télé ou dans des livres, les immenses parures de tête en argent des Miao (sud-ouest du pays).
Dès la naissance d’une fille, son père commence à fabriquer la parure lourde de symboles ethniques. Le jour des noces, la jeune femme brille de tous ses rayons comme un soleil d’argent.
Un jour d’hiver, peu avant la fête du Printemps, je visitais le marché Panjiayuan de Beijing. J’aperçus une jeune fille Miao qui n’avait à vendre que ces énormes boucles d’oreilles.
Elles avaient dû briller, auparavant, avant que la couche d’argent appliquée sur l’étain ne disparaisse à force de nettoyage. De plus, elles étaient particulières, mais me semblaient trop volumineuses pour être portées. La jeune fille en demandait 200 yuans, une somme considérable à l’époque. Elle me dit que c’était pour son billet de train, et qu’aussitôt récolté le prix, elle quitterait pour la gare. « Combien te manque-t-il pour ton billet ? », lui demandai-je. Elle répondit « 60 yuans ». Je lui donnai les 60 yuans et lui souhaitai bon voyage. Tandis que je remettais mes gants, elle m’offrit les boucles: « Tenez, prenez-les si vous les aimez. »
De tous les bijoux, ce sont les boucles d’oreilles que je préfère. Aussi c’est ce que je rapporte comme souvenir de tous les pays que je visite. Du Xinjiang, par exemple, où toutes les ethnies minoritaires du pays sont représentées, j’ai rapporté ces boucles que je voyais aux oreilles des femmes ouigoures, et les plus petites par toutes les Kirghizes.
Or, les premières ont une histoire émouvante. De retour à Beijing, je les portai plusieurs fois, puis j’en perdis une dans le métro. Déplorant ce malheur, je demandai au propriétaire du restaurant ouighour ou je dinais souvent s’il retournerait voir sa famille au Nouvel An qui approchait. Il me dit qu’un de ses employés retournerait. Alors, je lui expliquai où j’avais acheté ces boucles faites à la main. Je dis qu’on m’en avait demandé 200 yuans, mais que je les avais obtenues à 70. Il n’en croyait pas ses yeux de mon habileté à négocier. Je lui laissai la boucle orpheline comme modèle à remettre au voyageur, et lui dis que j’étais prête à payer ce qu’on me demanderait, car il doutait du prix. Or, après le Chunjie, je retournai prendre des nouvelles. Comme il n’en restait plus du même modèle, le commissionnaire avait dû acheter une paire complète, pour 50 yuans seulement; je me fis un plaisir d’en verser le double.
Quand je suis allée sur place écrire Ces gens merveilleux de Mongolie intérieure, en 2009, on m’a fait visiter de façon privilégiée la capitale des Yuan (1271-1368). J’ai aussieu l’occasion de visiter le musée/atelier privé de Zhang Jun et son épouse Zhang Ruilan, et de déambuler parmi des milliers de pièces entières, partielles, ou reconstituées des antiques capitales. Plusieurs bijoux anciens sont ornés de jade, mais aussi de corail, comme ces boucles d’oreilles en argent. Les crochets ne sont pas d’époque.
Il faut se souvenir que dans l’évolution de la Terre, cette région a déjà été couverte par la mer. Aussi, Zhang m’a-t-il fait cadeau d’une bague en bronze avec incrustation d’une pièce de corail, remontant à la dynastie des Liao (916-1125) Ces bijoux, dans leur plus simple expression, comptent parmi mes trésors.
Les Tibétains aussi utilisent des pierres anciennes et du corail dans la composition de leurs bijoux. Nombreux sont les touristes qui se laissent leurrer par de fausses pièces, en particulier l’étrange cylindre rayé de blanc et de noir, naturellement creux, comme on peut en voir deux pièces (authentiques) dans ce collier.
Source:french.china.org.cn |