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Lisa parcourt la Chine, et quand la Chine s'expatrie, Lisa se déplace aussi. Je suis actuellement dans la patrie de George Sand, afin de m'imprégner de son atmosphère pour mieux écrire un roman dont elle est la protagoniste, roman que je prépare depuis quinze ans.
Chaque été a lieu à Nohant, au cœur de la France, le festival Chopin. On se rappellera que Chopin fut pendant sept ans le compagnon de Sand. Au concert de clôture du 24 juillet, j'ai été transportée par le talent de trois jeunes hommes : Valentin Cotton, un pianiste de 20 ans ; le violoncelliste de 18 ans Florian Pons ; et le cadet, un Chinois de 17 ans, Shi He (史贺) qui a interprété le Concerto no 1 opus 11 en mi mineur, avec le professeur Yves Henry au second piano.
Shi est né à Changchun en 1995. Très jeune, il a entendu un camarade de classe jouer du piano, ce qui l'a fasciné, et il a dit à ses parents qu'il voulait apprendre lui aussi.
Il a d'abord étudié auprès de Zhang Peng, Geng Jian et Zhang Wei au département de piano de l'École normale du Nord-Est. Son immense talent s'est bientôt révélé. Conquis par la musique de Chopin, il a décidé d'adopter le prénom français Frédéric. Lors d'une tournée en Chine, le maitre Yves Henry – de renommée internationale – l'a découvert, et le jeune homme a décidé de consacrer son avenir à la musique.
Avec sa mère, il est venu, dès l'âge de treize ans, s'installer à Paris, laissant derrière son père, un artiste peintre, et sa sœur ainée. Il étudie à l'École normale Alfred-Cortot sous la direction de la pédagogue et concertiste renommée Françoise Buffet.
Arrivé dans l'Hexagone avec quelques notions de français, Frédéric Shi continue d'étudier la langue et la musique, ce qui ne lui laisse pas de temps pour les études ordinaires ; la vie impose des choix.
Frédéric Shi aime Chopin parce qu'il le « ressent bien et naturellement », dit-il. Voilà qui m'étonne, car je crois que Chopin est le compositeur occidental le plus difficile à percer.
On n'a pas fini d'entendre parler de ce jeune talent !
Un message à laisser à ses compatriotes ? Frédéric dit : « Si l'on veut vraiment apprendre la musique occidentale, il faut venir l'étudier en Europe. » Les institutions françaises sont tout à fait remarquables à cet effet, rappelle la professeure Buffet-Arsenijevic.
Pour terminer le festival en beauté, les Gâs du Berry sont montés sur scène pour interpréter quelques airs populaires à la vielle et à la cornemuse. Je me sentais alors en Italie, dans la Molise où nous avons aussi ces instruments. Le public, qui ne pouvait danser la petite valse, battait des mains avec enthousiasme.
Nous les avons ensuite suivis dans le parc, puis dans leur Salle où, depuis 1888, ils forment une association permanente. Après les guerres de 1870, me raconte Daniel Pingault, un des 64 membres actuels, les campagnes se trouvaient en pleine léthargie, et Augras et Baffier, respectivement pâtissier et sculpteur, décidèrent de sortir des granges et greniers les vieux instruments, afin de remonter le moral des habitants ruraux par des pistons et instruments bruyants.
Ils connurent un beau succès, et de neuf qu'ils étaient au début, les Gâs du Berry sont actuellement 64, incluant des femmes depuis 1954. Aux vielles et cornemuses se sont ajoutés clarinettes, violons, accordéons diatoniques pour le plus grand plaisir des amateurs de musique folklorique, laquelle n'a pas manqué d'inspirer des compositeurs comme Chopin et Liszt. George Sand évoque aussi ces musiques dans ses romans.
Lisa Carducci, 25 juillet 2013
Source: french.china.org.cn |