Des responsables chinois exhortent l'UE à éviter les mesures protectionnistes

Des responsables chinois ont plusieurs fois exhorté Bruxelles à éviter de prendre des mesures protectionnistes contre les véhicules électriques chinois, avertissant que de telles actions pourraient conduire à une spirale incontrôlable de tensions commerciales, et mettant en avant les droits et les capacités de la Chine à prendre des contre-mesures si l'Union européenne (UE) prenait des mesures qui nuisent aux intérêts chinois.

« Ces avertissements de hauts responsables chinois du commerce, qui se trouvaient en Europe pour diverses activités, ont démontré une fois de plus la détermination de la Chine à prendre des mesures concrètes pour sauvegarder les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises, alors que l'UE se rapproche de la décision d'imposer ou non des droits de douane sur les véhicules électriques chinois », ont affirmé lundi des experts chinois.

Des responsables et des experts chinois ont également mis en avant les répercussions plus profondes que causerait toute action protectionniste de l’UE, étant donné l’ampleur des échanges commerciaux entre la Chine et l’UE dans le secteur automobile. Même s'il y a concurrence, les intérêts mutuels sont bien plus grands, ont-ils souligné, appelant l'UE à revenir sur la voie de la coopération.

Samedi, le ministre chinois du Commerce, Wang Wentao, a présidé à Barcelone une table ronde réunissant des entreprises espagnoles à capitaux chinois. Tout en saluant la rationalité, le pragmatisme et l'amabilité de l'Espagne envers la Chine, M. Wang a également critiqué « la décision récente de l'UE de citer diverses fausses allégations telles que la “surcapacité” et d'utiliser de manière discriminatoire divers outils tels que les recours commerciaux pour lancer des enquêtes sur un grand nombre de produits chinois, dont les véhicules électriques, les locomotives et les panneaux photovoltaïques ».

« Cela a conduit à une augmentation continue du risque de frictions économiques et commerciales entre la Chine et l'UE », a déclaré M. Wang, selon un communiqué publié dimanche par le ministère du Commerce. « Nous espérons gérer correctement les frictions économiques et commerciales par le dialogue et la consultation, répondre aux préoccupations légitimes des deux parties et éviter une escalade incontrôlée des frictions commerciales. »

La partie chinoise a souligné le fait que des responsables français, allemands et de l'UE avaient déclaré à plusieurs reprises leur intention d'éviter une « guerre commerciale » et de soutenir un système commercial multilatéral basé sur des règles et un environnement concurrentiel équitable.

M. Wang a en outre averti que « si les actions de l'UE ne correspondent pas aux paroles de ses dirigeants et si l'UE continue de réprimer les entreprises chinoises, la Chine prendra toutes les mesures nécessaires pour sauvegarder fermement les intérêts légitimes des entreprises chinoises ».

Dimanche, M. Wang a visité une usine de la coentreprise entre le constructeur chinois Chery Automobile et l'espagnol Ebro-EV Motors, où il a souligné que « même s'il existe une concurrence entre la Chine et l'UE dans le secteur des véhicules électriques, la coopération est encore plus grande. Nous espérons que l'UE abandonnera le protectionnisme et reviendra sur la bonne voie du dialogue et de la coopération. »

Dimanche également, Ling Ji, vice-ministre chinois du Commerce, a présidé un symposium sur les entreprises à capitaux chinois dans la capitale grecque, Athènes. M. Ling a exhorté les entreprises chinoises « à reconnaître pleinement les dommages que pourraient causer les actions protectionnistes de l'UE » et a affirmé que « la Chine ne permettra pas à l'UE de saper la coopération sino-grecque ».

« Nous espérons que les actions de l’UE reflèteront ses paroles et qu’elle ne fera rien qui pourrait provoquer une escalade incontrôlable des frictions commerciales. Si l'UE persiste à suivre sa propre voie et continue de réprimer les entreprises chinoises, la Chine se réserve le droit et dispose d’une capacité suffisante pour prendre des mesures afin de défendre les intérêts légitimes des entreprises chinoises », a averti M. Ling.

Alors que l'UE serait en train de réfléchir à des actions potentielles contre les véhicules électriques chinois, dont des mesures tarifaires, « les avertissements clairs des responsables chinois sont importants pour faire connaître à Bruxelles les profondes répercussions de ses mesures protectionnistes », ont soutenu des experts chinois.

« Il semble que les résultats de l'enquête seront bientôt connus. En ce moment, il est nécessaire que les responsables chinois dans ce domaine fassent ces remarques et clarifications », selon Gao Lingyun, expert à l'Académie chinoise des sciences sociales.

Des contre-mesures résolues

Même s'il reste à voir quelles actions l'UE annoncera et quand, des experts chinois ont avancé qu'« étant donné le protectionnisme et l'hostilité croissante de certains responsables politiques européens à l'égard de la Chine, ainsi que la pression des États-Unis, Bruxelles pourrait prendre des mesures protectionnistes contre les véhicules électriques chinois, y compris des éventuels tarifs douaniers provisoires. Et étant donné les intérêts massifs en jeu, la Chine prendra résolument des contre-mesures pour protéger ses propres intérêts ».

« La Chine doit être préparée à l’avance. Si l'UE prend des mesures protectionnistes, la Chine prendra certainement des contre-mesures », a averti M. Gao.

Des experts ont également souligné que la décision de l'UE aurait des répercussions bien plus importantes que les hausses de droits de douane annoncées précédemment par les États-Unis sur les véhicules électriques chinois, car la Chine exporte une quantité beaucoup plus importante de véhicules électriques vers l'UE, par rapport au très petit nombre d'exportations vers les États-Unis.

Si l'UE impose un droit de douane de 20% sur les véhicules électriques chinois, cela pourrait coûter à la Chine près de 4 milliards de dollars en échanges commerciaux avec le bloc européen, alors que le nombre de véhicules électriques chinois importés dans l'UE pourrait diminuer d'un quart, soit quelque 125 000 voitures, a rapporté Bloomberg vendredi, citant une analyse de l'Institut Kiel pour l'économie mondiale, un groupe de réflexion allemand.

Les industries automobiles chinoises et européennes sont étroitement liées, de nombreux constructeurs automobiles européens investissant également massivement sur le marché chinois, et toute éventuelle contre-mesure chinoise pourrait également avoir un impact important sur l’UE, ont noté des experts.

Dans une interview exclusive accordée au Global Times publiée le 21 mai, un éminent conseiller politique de l'industrie automobile chinoise a proposé que la Chine envisage d'augmenter le taux de droits de douane temporaires sur les voitures importées équipées de moteurs de plus de 2,5 litres, afin de réduire les importations dans le cadre des efforts plus larges du pays pour réduire les émissions et promouvoir le développement vert de l’industrie automobile.

Une telle décision aurait un impact majeur sur les importations de voitures en provenance de l'UE, ont estimé des experts.