Xi Jinping tend la main de l’amitié et de la coopération en Europe

Le président chinois Xi Jinping a effectué des visites d’Etat en France, en Serbie et en Hongrie du 5 au 10 mai 2024, répondant à l’invitation du président français Emmanuel Macron, du président serbe Aleksandar Vučić, ainsi que du président hongrois Tamás Sulyok et du premier ministre hongrois Viktor Orbán. 

Il s’agissait pour M. Xi de marquer le 60e anniversaire des relations entre la Chine et la France lors de la première étape de son voyage et le 75e anniversaire des relations officielles avec la Hongrie lors de sa dernière étape. Ce voyage en Europe était donc placé sous le signe de la célébration des relations amicales avec les nations européennes dans un contexte éminemment tendu, notamment depuis que la Commission européenne a été jusqu’à qualifier la Chine de « partenaire, concurrent stratégique et rival systémique » en 2019, et plus récemment encore, avec l’ouverture en avril 2024 des enquêtes anti-subventions visant des groupes chinois.

La coopération sino-française a le vent en poupe

En France, lors de la réunion conjointe de MM. Xi et Macron avec la presse le 6 mai, M. Xi a déclaré que les relations sino-françaises ont « une histoire précieuse, des valeurs uniques et une mission importante. » Il a appelé à passer le bâton de relais de l’histoire, défendre l’esprit à l’origine de l’établissement des relations diplomatiques pour l’enrichir des caractéristiques de la nouvelle ère. Selon M. Xi, il faut consolider la stabilité stratégique des relations bilatérales, explorer plus en avant le grand potentiel de la coopération mutuellement bénéfique, accroître les échanges entre les populations des deux pays, et parvenir à un plus grand consensus sur la coopération mondiale.

La question des relations commerciales était au centre des discussions, sachant que la balance commerciale de la France à l’égard de la Chine est fortement déficitaire. M. Xi a dit vouloir parvenir à un équilibre positif dans le commerce bilatéral en élargissant la coopération dans l’agroalimentaire et la finance notamment, et faire progresser conjointement la R&D et l’innovation dans l’aéronautique et le nucléaire civil. Il a appelé à arrimer plus étroitement les stratégies de développement et élargir leur coopération dans les secteurs émergents comme les énergies nouvelles, la fabrication intelligente, la biomédecine, l’intelligence artificielle et les marchés tiers. M. Xi a aussi voulu donner des gages de sincérité, précisant que la Chine avait déjà complètement ouvert son secteur manufacturier et accélérera son élargissement de l’accès au marché dans le secteur des services comme les télécommunications et les services médicaux. Au cours de cette visite, la Chine et la France ont signé 18 accords de coopération entre agences gouvernementales, couvrant l’aviation, l’agriculture, le développement vert et la coopération avec les PME.

Les échanges humains sino-français bénéficieront d’un formidable coup de pouce, M. Xi précisant que la Chine avait décidé de prolonger la politique d'exemption de visa de court séjour pour les ressortissants de 12 pays dont la France jusqu’à fin 2025. Dans les trois prochaines années, a-t-il aussi annoncé, la Chine souhaite porter le nombre total d’étudiants français en Chine à plus de 10 000 et doubler le nombre de jeunes Européens en programme d’échange en Chine.

Dans le domaine des questions internationales, la recherche de la consolidation du consensus entre la Chine et la France reste primordiale, notamment dans la lutte contre le changement climatique et la protection de la biodiversité. M. Xi souhaite aussi approfondir le dialogue sur la gouvernance mondiale de l’intelligence artificielle et la réforme du système financier international. Par ailleurs, et dans le contexte plus général de la géopolitique mondiale, M. Xi a tenu à souligner lors de ses discussions avec M. Macron dans l’après-midi du 6 mai à l’Elysée que la Chine et la France devaient préserver leur indépendance et empêcher ensemble une nouvelle guerre froide ou une nouvelle confrontation de blocs. Il a appelé à adopter une vision à long terme et à œuvrer ensemble à un monde multipolaire égal et ordonné, à rechercher les bénéfices partagés, et à rejeter ensemble le « découplage » et la rupture des chaînes d’approvisionnement. 

Un accueil triomphal en Serbie et en Hongrie 

Les deux dernières escales en Serbie et en Hongrie ont été l’occasion de montrer à l’Europe un exemple réussi de coopération gagnant-gagnant, et de laisser entendre que la suspicion et la confrontation était un jeu à somme nulle. 

En Serbie, le président Vučić avait promis une surprise pour la visite de M. Xi. Il lui a en effet fait les honneurs d’une escorte de deux chasseurs de l’armée de l’air serbe quand l’avion spécial de M. Xi Jinping a fait son entrée dans l’espace aérien du pays. 

Lors de leur rencontre avec la presse à Belgrade le 8 mai, MM. Xi et Vučić ont annoncé leur intention de construire une communauté de destin sino-serbe dans la nouvelle ère et convenu de renforcer la communication stratégique pour en guider le processus. C’est une avancée cruciale sachant qu’il y a huit ans, la Serbie était devenue le premier partenaire stratégique global de la Chine en Europe centrale et orientale. 

Les deux dirigeants ont assisté ensemble à la signature de documents de coopération qui permettront une coopération gagnant-gagnant entre les deux pays. Tous deux ont salué la coopération de haute qualité dans le cadre de l’initiative « la Ceinture et de la Route » entre la Chine et la Serbie, qui a produit des résultats substantiels pour devenir un exemple concret de mondialisation économique universellement bénéfique et inclusive.

Enfin, MM. Xi et Vučić ont fait part de leur souhait de mettre conjointement en œuvre l’Initiative de développement mondial, l’Initiative de sécurité mondiale et l’Initiative de civilisation mondiale, et faire progresser la construction d’une communauté de destin pour l’humanité. 

M. Xi a ensuite passé deux jours, les 9 et 10 mai, en Hongrie, pour la dernière étape de sa tournée. Ce pays d’Europe central et oriental (PECO) sert de pont entre la Chine et l’Union européenne ainsi qu’entre la Chine et les PECO depuis l’adoption de la mise en place de la stratégie dite « Ouverture à l’Est » en 2010 du premier ministre Viktor Orbán et de son arrimage avec l’Initiative « la Ceinture et la Route » en 2015. Les deux pays ont convenu de renforcer cette synergie et décidé d’élever les relations bilatérales au rang de partenariat stratégique global à toute épreuve dans la nouvelle ère. La coopération, qui concerne traditionnellement les infrastructures, a aussi été considérablement élargie aux domaines émergents comme les énergies propres et l’intelligence artificielle. 

En cinq jours, le président chinois aura tendu la main de l’amitié et de la coopération à trois pays européens aux histoires, cultures et systèmes différents, montrant ainsi la volonté de la Chine à parvenir à un consensus au-delà des divergences en tant que grande puissance responsable, et indiquant le cap à suivre pour bâtir une communauté de destin pour l’humanité à la fois viable et prospère. 

Par Jacques Fourrier (L’auteur est un journaliste et commentateur français basé à Beijing depuis les années 1990)

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