Inquiétudes autour du resserrement des restrictions américaines sur les puces

Le dernier durcissement des restrictions sur les exportations de puces électroniques vers la Chine par le gouvernement américain souligne une fois de plus l’utilisation par Washington de son pouvoir politique pour perturber la coopération commerciale normale et risque de porter un nouveau coup dur à l’industrie mondiale des semi-conducteurs, ont déclaré plusieurs experts et des dirigeants d’entreprises.

Ceux-ci notent que de telles restrictions pousseront les entreprises chinoises à consacrer davantage de ressources à la recherche et au développement, afin de réaliser des percées dans des composants clés et d’établir une tête de pont dans des technologies stratégiques plus orientées vers l’avenir.

Ces commentaires surviennent alors que les dernières règles révisées des Etats-Unis, qui comptent 166 pages, doivent entrer en vigueur jeudi.

D’après l’agence d’information Reuters, le durcissement des restrictions va rendre plus difficile pour la Chine l’accès aux marchés américains des puces d’intelligence artificielle et des outils de fabrication de semi-conducteurs. Washington a par ailleurs étendu les restrictions aux ordinateurs portables contenant des puces d’IA.

« Malgré le changement de rhétorique de Washington du découplage à la réduction des risques dans les principales chaînes d’approvisionnement, le gouvernement américain continue de renforcer ses contrôles sur les exportations de puces vers la Chine. […] Cette décision est la dernière preuve que le gouvernement américain utilise tous les moyens possibles pour contenir l’essor technologique de la Chine, quel que soit le préjudice causé aux entreprises américaines », constate Wei Jianguo, ancien vice-ministre du Commerce.

Dimanche, le ministère chinois du Commerce (MOFCOM) a noté que cette dernière révision des contrôles à l’exportation de semi-conducteurs intervenait moins de six mois après l’introduction de la règle par les Etats-Unis en octobre 2023.

Selon le ministère, l’élargissement du concept de sécurité nationale par les Etats-Unis, associé à des changements arbitraires de règles et à des mesures de contrôle renforcées, crée non seulement davantage d’obstacles à la coopération économique et commerciale normale entre la Chine et les Etats-Unis, mais impose également des coûts de conformité plus élevés aux entreprises mondiales.

Ce dernier durcissement des restrictions sur l’exportation des puces électroniques va entrer en vigueur, alors même que les grandes entreprises américaines de semi-conducteurs font tout leur possible pour consolider leurs liens avec la Chine, qui est le plus grand marché de semi-conducteurs au monde. 

Contrairement à Washington, qui a décidé de perturber l’activité du secteur, les milieux d’affaires aux Etats-Unis considèrent toujours la Chine comme un élément central de leur paysage commercial mondial. Les PDG d’entreprises américaines de semi-conducteurs, telles que Qualcomm, Micron ou encore AMD, se sont ainsi rendus en Chine pour assister au Forum sur le développement de la Chine à Beijing, soulignant leur engagement à long terme sur le marché chinois.

Cristiano Amon, le PDG de Qualcomm, a rappelé qu’au cours des 30 dernières années, son entreprise avait établi des relations solides, de confiance et mutuellement bénéfiques avec ses partenaires chinois. Aujourd’hui, alors que sa technologie s’étend à de nombreuses nouvelles industries, Qualcomm établit constamment de nouveaux partenariats en Chine.

Dans le même temps, Micron Technology a inauguré mercredi sa nouvelle usine de Xi’an dans la province du Shaanxi, dans le cadre de son plan d’investissement de 4,3 milliards de yuans (554 millions d’euros) annoncé en juin 2023.

Selon Bai Ming, un chercheur de l’Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique (CAITEC) basée à Beijing, malgré le bruit politique du gouvernement américain, les entreprises américaines font leur possible pour accroître leur présence en Chine, car « ce marché est trop grand pour que quiconque puisse l’ignorer ».

La partie continentale de la Chine consomme plus de la moitié des semi-conducteurs au monde, lesquels sont ensuite assemblés en produits technologiques pour être réexportés ou vendus sur le marché intérieur, indique le cabinet d’études Daxue Consulting.

Xiang Ligang, le directeur général de l’Alliance pour la consommation d’informations (une association chinoise de défense du secteur des télécommunications), estime que les restrictions américaines sur les puces électroniques ne feront qu’accélérer les efforts des entreprises chinoises pour réaliser des percées technologiques.