Les effets des hausses de taux de la Fed sur la zone euro et les pays en voie de développement sont néfastes (INTERVIEW)

Par : Laura |  Mots clés : Fed-zone euro-taux
French.china.org.cn | Mis à jour le 24-11-2022

Les politiques budgétaires et monétaires adoptées par les Etats-Unis ont mis dans une fâcheuse situation l'Europe et les pays en voie de développement, a estimé Ray Dalio, investisseur fondateur de Bridgewater Associates, dans une interview écrite récemment accordée à Xinhua.

Depuis le début de la pandémie de nouveau coronavirus, les Etats-Unis ont mis en place des politiques budgétaires et monétaires expansionnistes, ce qui a accru de 40% la masse monétaire M2 (devises en circulation, dépôts à vue et à terme) dans les deux ans qui ont suivi février 2020, tandis que l'actif total des banques fédérales de réserve ont plus que doublé au cours de la même période.

L'offre excessive de monnaie est considérée comme une cause importante de l'inflation aux Etats-Unis, laquelle a atteint en juin son niveau le plus élevé en 40 ans.

La Fed, dans ses efforts de lutte contre l'inflation, a durci sa politique monétaire. Or, selon Ray Dalio, un resserrement monétaire ne suffit pas à lui seul à freiner l'inflation.

En commentant les politiques inflationnistes en vigueur aux Etats-Unis, telles que le "friendshoring" (la délocalisation stratégique), les subventions intérieures et les restrictions à l'exportation, notamment dans la high tech, M. Dalio a dit s'attendre à une perpétuation de l'inflation galopante à cause de la démondialisation qui restreint l'offre et enflamme l'inflation monétaire.

"Un durcissement monétaire avec pour objectif de lutter contre l'inflation est de nature à remplacer un mal par un autre. L'inflation réduit le pouvoir d'achat et le durcissement monétaire finit aussi par réduire le pouvoir d'achat, mais il contient également l'inflation grâce à l'affaiblissement de la demande dont il est responsable", a-t-il analysé, avant d'estimer que les banques centrales doivent choisir un juste équilibre entre les deux maux .

D'après M. Dalio, bien que la zone euro injecte moins de liquidités dans l'économie par rapport aux Etats-Unis, la Banque centrale européenne (BCE) est aujourd'hui mise en concurrence avec la Fed pour atteindre les taux les plus attractifs.

"Il est vrai que les Etats-Unis ont imprimé et distribué beaucoup plus d'argent, créant par conséquent davantage d'inflation. Mais par la suite, les Etats-Unis ont beaucoup resserré leur politique monétaire. Or, l'Europe n'a pas assez resserré la sienne en comparaison et ses taux réels demeurent bas, entraînant une dépréciation de l'euro et une inflation plus grave qu'aux Etats-Unis", a-t-il noté.

Du point de vue d'un investisseur, M. Dalio prévoit des sorties importantes de capitaux de l'Europe et un affaiblissement de l'euro si l'Europe n'arrive toujours pas à suivre les hausses des taux américains.

Le 2 novembre, la Fed a relevé ses taux de référence de 0,75 point pour la quatrième fois de l'année, tandis que le 27 octobre, la BCE a haussé ses taux d'intérêt directeurs pour la troisième fois depuis juillet dernier, soit une progression globale de deux points de pourcentage depuis le début de l'année.

Compte tenu de la vaste disparité dans la zone euro, il y a un équilibre délicat à établir entre l'intérêt des créanciers et celui des débiteurs. L'incertitude inquiète les marchés dans une conjoncture économique déjà défavorable, a noté l'investisseur réputé.

"La BCE et les décideurs responsables des politiques budgétaires se trouvent donc dans une situation difficile : ils doivent choisir parmi des alternatives indésirables, ce qui donnera lieu à une stagflation, ainsi qu'aux dépenses fiscales qui nécessiteront la vente de titres. Ce scénario est défavorable aux marchés obligataires, à l'euro, aux marchés actionnaires, ainsi qu'aux économies européennes", a-t-il poursuivi.

Pour M. Dalio, les économies en développement sont les plus fragilisées dans un monde où les politiques monétaires se sont resserrées en raison du poids de leurs fardeaux financiers, alourdis par le renchérissement du dollar et des marchandises. Et il s'attend à ce que ce problème s'aggrave.

A la fin de ce cycle de resserrement des politiques monétaires, il prévoit "une baisse importante" du dollar par rapport à l'or.

En outre, "pour de nombreuses raisons, notamment la crainte d'une transformation du dollar en arme, l'attractivité du dollar, qui est détenu sous forme de dettes libellées en dollars, sera affaiblie. Ce qui va le remplacer, à la fois comme un bon moyen d'échange et une bonne réserve de richesse, c'est pour moi difficile à prédire", a conclu M. Dalio.

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Source: Agence de presse Xinhua
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