Un économiste met en garde contre l'apparition de nouveaux pauvres à Madagascar due à la crise sanitaire et à l'inflation (INTERVIEW)

Par : Norbert |  Mots clés : Madagascar-Inflation-pauvreté
French.china.org.cn | Mis à jour le 24-08-2022

Patrick Randriamisata, un économiste malgache spécialisé dans la gouvernance, a mis en garde, dans un entretien accordé récemment à Xinhua, contre l'apparition de nouveaux pauvres à Madagascar en raison de la crise sanitaire et de l'inflation.

Dans une récente mise à jour, la Banque mondiale a fait état d'un nouveau record du taux de pauvreté dans la Grande île, à savoir 81% en 2020, sur la base de son seuil international de pauvreté fixé depuis 2015 à 1,90 dollar par jour et par habitant.

Cette mise à jour "ne fait donc que confirmer la réalité sur l'accroissement du nombre des gens pauvres à Madagascar", constate M. Randriamisata, par ailleurs coordinateur national du Cercle de réflexion des économistes de Madagascar (CREM).

Evoquant la pandémie de nouveau coronavirus, il juge que "l'effet de cette urgence sanitaire est beaucoup plus élevé que la crise en 2009". "Cela signifie qu'un nombre important de gens sont requalifiés de pauvres."

"Beaucoup de Malgaches vivaient déjà dans la pauvreté avant la crise. L'urgence sanitaire ne fait que la renforcer. Nombreux sont les gens qui ont subi une perturbation de leurs activités économiques. Cela réduit en conséquence leur revenu et diminue par la suite leur bien-être", observe l'économiste.

La paupérisation pourrait s'aggraver avec une double pression. "Sûrement, l'inflation galopante engendrée par l'augmentation du prix du carburant va fortement (se) répercuter sur le pouvoir d'achat des ménages", poursuit M. Randriamisata.

"On peut s'attendre en conséquence à une augmentation du prix sur le court terme et puis une récession économique engendrée par l'inflation", redoute-t-il, en soulignant que le lien avec le conflit entre la Russie et l'Ukraine d'une part et la demande énergétique induite par la relance économique mondiale d'autre part est avéré.

En mai, le gouvernement malgache a décidé d'augmenter le salaire minimum à 250.000 ariarys (environ 62 dollars), notamment dans le secteur privé, devant une inflation générée par les crises successives.

"Cette augmentation a été juste un rattrapage face à l'inflation précédente, mais moins opérante dans l'optique de relèvement de pouvoir d'achat, surtout pour amortir le choc de l'inflation actuelle", note Patrick Randriamisata.

Face aux difficultés socio-économiques du pays, l'économiste propose "une stratégie pouvant relancer son économie tout en priorisant les bases de son développement".

En qualifiant l'agriculture d'"option pertinente" et l'autosuffisance alimentaire de "grande chose" pour le pays, il martèle que l'Etat malgache "doit s'y approprier rapidement afin d'avoir plus d'effet tangible d'ici peu de temps".

M. Randriamisata met également l'accent sur l'industrialisation. "L'Etat doit déployer tant d'efforts pour soutenir les unités de production nationale pouvant aider le pays à basculer progressivement dans la substitution des produits d'importation qui risquent toujours de déséquilibrer la balance commerciale", plaide-t-il.

Cependant, il souligne que cette industrialisation "ne peut être soutenue sans que l'on parvienne à disposer des ressources énergétiques suffisantes et qui ne dépendent pas des ressources non renouvelables".

"L'économie bleue et le tourisme vont de pair avec l'industrialisation et constituent une voie incontournable pour renforcer le développement durable à Madagascar", conclut-il.

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Source: Agence de presse Xinhua
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