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La France a franchi la « ligne rouge » dans les relations sino-françaises en vendant des armes à Taïwan

French.china.org.cn | Mis à jour le 19. 05. 2020 | Mots clés : relations sino-françaises

Un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères s’est exprimé le 13 mai sur les ventes d’armes de la France à Taïwan, disant que la Chine s’opposait résolument aussi bien aux ventes d’armes de pays étrangers à Taïwan qu’aux échanges sécuritaires dans les affaires militaires avec Taïwan. La Chine a fait part de ses préoccupations sérieuses à la France. La Chine exhorte une fois de plus la France à respecter strictement le principe d’une seule Chine, à retirer son projet de ventes d’armes à Taïwan et à éviter de nuire aux relations sino-françaises.

Le 15 mai, un porte-parole du ministère chinois de la Défense nationale a souligné qu’il n’y a qu’une seule Chine et que Taïwan est une partie inaliénable de la Chine. La Chine s’oppose résolument à la vente d’armes à Taïwan de quelque pays que ce soit et s’oppose résolument à ce qu’un pays quel qu’il soit développe des liens militaires avec Taïwan. La Chine exige que la France résilie immédiatement son projet de vente d’armes à Taïwan pour éviter de nuire davantage aux relations entre les deux pays et les deux armées. L’armée chinoise possède une volonté ferme, une confiance totale et des capacités suffisantes pour contrecarrer toute forme d’ingérence extérieure et d’actions séparatistes pour l’ « indépendance de Taïwan », défend fermement la souveraineté nationale et l’intégrité territoriale, et maintient fermement la paix et la stabilité dans le détroit de Taïwan.

Le journal français Le Monde a récemment rapporté qu’en 1991, la compagnie française Thomson-CSF (aujourd’hui Thales) avait vendu à Taïwan six frégates non armées de classe « Lafayette » pour 2,8 milliards de dollars. Le 7 avril de cette année, Taïwan a annoncé son intention de procéder à une mise à niveau de ces frégates de fabrication française afin de les équiper d’un système de lancement de leurres pour les protéger des attaques de missiles. Le contrat a été obtenu par la société française DCI-DESCO pour un montant d’environ 25 millions d’euros. La Chine a fait part de son mécontentement de la signature de ce contrat, et exhorté la France à « annuler » le contrat en question. La Chine estime qu’une telle transaction commerciale entre la France et Taïwan « nuira aux relations sino-françaises ». 

Selon les médias, le ministère français des Affaires étrangères a publié le 13 mars une déclaration selon laquelle « la France respecte le principe d’une seule Chine », mais « se conforme également strictement à l’accord contractuel conclu avec Taïwan ».

Dans les années 1990, le gouvernement français avait ignoré la forte opposition de la Chine et vendu à deux reprises des armes à Taïwan, ce qui avait entraîné une régression grave des relations sino-françaises. Les gens ont gardé un souvenir vivace de cet épisode historique. 

Dès la fin de 1989, les médias français avaient annoncé que la compagnie française Thomson livrerait six frégates à Taïwan, et le cabinet du Premier ministre français avait également confirmé cette information. Le ministère chinois des Affaires étrangères avait rencontré en urgence l’ambassadeur de France en Chine et exprimé sa ferme opposition, demandant l’arrêt de la transaction. L’ambassade de Chine en France avait également négocié avec le ministère français des Affaires étrangères. Selon l’ambassade, l’ambassadeur de Chine en France à l’époque, Zhou Jue, avait transmis les propos du dirigeant suprême chinois au Ministre français des Affaires étrangères Roland Dumas, disant que « les Chinois n’avaleront jamais cette pilule amère ». Après avoir pesé le pour et le contre, les autorités françaises avaient décidé de ne pas continuer les transactions sur les navires de guerre à Taïwan. Le 6 janvier 1990, le Ministre français des Affaires étrangères avait informé l’ambassadeur de Chine en France de la décision du Président François Mitterrand.

Cependant, en avril 1991, M. Dumas a de nouveau soulevé la question de la vente des navires de guerre à Taïwan. Le 7 mai, Cai Fangbai, qui avait pris la suite de Zhou Jue au poste d’ambassadeur de Chine en France, avait immédiatement exprimé son mécontentement à l’égard de la France et demandé à M. Dumas de respecter son engagement personnel envers l’ambassadeur de Chine le 6 janvier 1990, à savoir qu’il ne continuerait pas à effectuer des transactions sur des navires de guerre avec Taïwan. La Chine et la France avaient ensuite entamé des négociations au niveau des vice-ministres des Affaires étrangères. Le 4 juillet, M. Dumas avait rencontré Tian Zengpei, Vice-Ministre des Affaires étrangères, qui participait aux négociations, et confirmé la déclaration suivante : « Taïwan fait partie du territoire chinois, et la France ne change pas de position, c’est-à-dire qu’il n’y aura aucune forme de relations officielles et aucune forme de contact officiel avec Taïwan ; dans le développement commercial avec l’île, la France n’a pas l’intention d’affecter la situation sécuritaire du détroit de Taïwan. » Mais les faits ont prouvé qu’il ne s’agissait que d’une déclaration hypocrite de la partie française. Le 27 septembre de la même année, le gouvernement français publiait en effet un communiqué annonçant que la France et Taïwan étaient parvenus à un accord sur la vente de six frégates.

L’encre de la signature du contrat de vente de navires de guerre entre la France et Taïwan n’était pas encore sèche qu’en novembre, le gouvernement français autorisait Dassault à négocier avec Taïwan pour la vente chasseurs Mirage 2000-5. En février 1992, lorsque le Ministre français des Affaires étrangères avait rencontré le Ministre chinois des Affaires étrangères Qian Qichen à New York, le plan français de vente des Mirage 2000-5 à Taïwan avait été soulevé. Qian Qichen avait réitéré la position constante de la Chine et averti la France que cette question était d’une grande importance et qu’il fallait faire preuve de prudence. Le 8 novembre, les médias français avaient rapporté des informations de Taïwan selon lesquelles le contrat avait été signé le jour même. La Chine avait immédiatement demandé au ministère français des Affaires étrangères de clarifier cette question. La France s’est montrée déraisonnable et a adopté une tactique dilatoire. Ce n’est que le 22 décembre, sous les appels répétés de la Chine, que le ministère français des Affaires étrangères a reconnu que le gouvernement français avait approuvé un contrat de vente de 60 chasseurs Mirage 2000-5 à Taïwan.

La France avait ignoré l’opposition de la Chine à deux reprises et vendu des navires de guerre et des avions de chasse à Taïwan, nuisant gravement aux relations sino-françaises, et la Chine avait naturellement réagi avec force. Le 23 décembre, le ministère chinois des Affaires étrangères rencontrait d’urgence l’ambassadeur de France en Chine et annonçait quatre mesures. Primo, demander au gouvernement français de fermer son consulat général à Guangzhou dans un délai d’un mois ; secundo, résilier les grands projets en cours de négociation entre les deux pays, dont le métro de Guangzhou, le projet de phase II de la centrale nucléaire de la baie de Daya et l’achat de blé français, et ne plus discuter de nouveaux projets économiques et commerciaux à grande échelle avec la France ; tertio, contrôler strictement les échanges de personnel entre les niveaux sous-ministériels et au-dessus entre les deux pays, et quarto, prendre des mesures pour cesser les contacts avec quatre entreprises française d’armement, dont Dassault. 

La forte réaction du gouvernement chinois a complètement rompu les vœux pieux de la France de prendre ses désirs pour des réalités, de plaire à tout le monde et de tirer profit de ses relations à la fois avec la partie continentale et Taïwan, que le pays sache que le jeu n’en vaut pas la chandelle au niveau économique, et sombre dans la passivité sur le plan de la moralité politique. Cela a également fait office de mise en garde pour les pays qui tentaient de vendre des armes à Taïwan, afin qu’ils n’osent pas agir à la légère. 

En 1993, le parti au pouvoir en France, le Parti socialiste, a subi une terrible défaite aux élections législatives, et Edouard Balladur est devenu Premier ministre. A la fin de l’année, l’envoyé spécial du Premier ministre s’est rendu en Chine pour discuter de la normalisation des relations entre les deux pays. Le 22 janvier 1994, les deux gouvernements ont publié un communiqué conjoint dans lequel la France s’engageait à ne pas approuver la participation des entreprises françaises à l’armement de Taïwan à l’avenir. Le communiqué annonçait la reprise des relations amicales et de coopérations traditionnelles entre les deux pays. En avril, le Premier ministre Balladur se rendait en Chine et les relations sino-françaises tournaient une nouvelle page.

Des leçons tirées du passé, on tire des enseignements pour l’avenir. Avec le recul, il n’est pas difficile de voir que les ventes d’armes à Taïwan sont une « ligne rouge » infranchissable dans les relations sino-françaises. Si elle est franchie, la Chine réagira inévitablement avec force. C’était vrai dans les années 1990, et c’est encore vrai aujourd’hui.

Attendons maintenant de voir comment la France va agir. 


Par Shen Xiaoquan, chercheur au Centre de recherche des questions mondiales de l’Agence de presse Xinhua.


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Source:french.china.org.cn