Marguerite Duras et la Chine, une histoire d'amour

Par : Yann |  Mots clés : Marguerite Duras, Chine, Fu Lei
French.china.org.cn | Mis à jour le 13-08-2014

Affiche du film L'Amant, adapté du roman du même nom, lauréat du prix Goncourt en 1984.

Les livres de Marguerite Duras semblent être assez bien connus du public chinois. Évidemment, L'Amant, dont le personnage principal est un Chinois aisé relie la Chine à cet auteur dont les racines prennent de ce côté de la Terre.

C'est à l'Institut Français de Chine (Beijing), réouvert il y a peu qu'ont eu lieu les célébrations pour l'ouverture du centenaire de Marguerite Duras. En juin dernier, deux invités de poids : Laure Adler, biographe et amie de Marguerite Duras et Jean-Jacques Annaud, cinéaste et réalisateur du film L'Amant ont été invités à partager leur connaissance de Marguerite Duras et de son œuvre. Un bon moyen pour les spectateurs chinois présents de découvrir un peu plus le monde de cet auteure dont tous les romans ont été traduits en chinois.

La discussion porta donc sur la relation entre Marguerite Duras et les deux invités, sur le tournage de L'Amant, la traduction des romans de Duras en chinois et la relation de l'auteur avec l'Asie. Ces célébrations étaient composées de deux évènements importants : la diffusion en public du film L'Amant après la discussion du vendredi et un colloque sur la traduction et l'écriture organisé par le Club Fu Lei le samedi.

On croise le fer

Pour commencer, Laure Adler, journaliste, amie et biographe de Marguerite Duras a fait l'exposé de sa rencontre avec celle-ci et de leur amitié qui dura plus de dix ans. Laure Adler s'est toujours intéressée à l'histoire des femmes, qu'elles soient « artistes, politiques ou prostitutées ». Marguerite Duras lui fit confiance. Laure Adler a raconté au début de la discussion qu'elle n'était pas une « durassienne » avant de la rencontrer. Au contraire, elle était, comme beaucoup de gens, excédée par « le mythe Marguerite Duras » : « J'avais des amis qui étaient capables de réciter des passages entiers de ses livres et qui parlaient de sa littérature de façon très prétentieuse. Je trouvais la réputation de Duras surfaite ». Comme beaucoup de personnes tombées dans Duras, c'est à la lecture d'un de ses romans, en l'occurence Un Barrage contre le Pacifique que la révélation a lieu. Laure Adler lui envoit une lettre, Marguerite Duras lui répond, l'invite à venir chez elle. « Elle n'était pas du tout comme on la décrit souvent : antipathique, fière, ou imbue d'elle même. Avec moi, elle était très simple, on mangeait dans sa cuisine. Cela arrivait qu'elle me téléphonait en pleine nuit après la parution d'un de ses livres pour avoir mon avis, elle était très fragile et doutait constamment sur ses œuvres. »

Pour le réalisateur de L'Amant, la relation est plus compliquée. On a tous plus ou moins entendu parler de l'histoire du tournage de ce film. Jean-Jacques Annaud décrit au public chinois, une Marguerite Duras « contradictoire, séductrice et assassine ». D'après lui, « le rapport était d'une très, très grande violence ». « La bataille de L'Amant » était celle de la propriété artistique du film. Marguerite Duras avait obtenu le Prix Goncourt, elle était elle-même cinéaste. Elle avait ses propres vues sur comment devait être le film. « Elle voulait faire le film », déclare Jean-Jacques Annaud. À l'écoute du témoignage de ce dernier, on se rend compte que le choc des deux caractères devait effectivement faire des étincelles. Elle n'était pas d'accord avec le scénario, lui ne voulait pas lâcher non plus, persuadé peut-être d'être meilleur réalisateur qu'elle. Il profite d'un passage de Marguerite Duras à l'hôpital pour refaire le scénario à son goût. Prête à tout pour empêcher le film de sortir, elle sera le seul auteur jusqu'à aujourd'hui à user du droit de morale. Elle recevra un dédommagement. Déçue par le film et traitant même la dernière scène « de merde », elle refondra intégralement L'Amant sous la forme d'un roman-scénario : L'Amant de la Chine du Nord dans lequel la dernière scène du film n'apparaît plus et se termine dans le bateau du retour en France.

Visiblement en désaccord sur le personnage de Marguerite Duras, Laure Adler et Jean-Jacques Annaud n'en sont évidemment pas passés aux mains, mais on sentait que la discussion consistait plus en une prise de position face à ce que disait l'autre qu'un échange à proprement parler. Laure Adler protégeait son amie en expliquant le contexte : les problèmes de l'alcoolisme de Marguerite Duras, sa notoriété soudaine qu'elle gérait mal, ou encore les souvenirs difficiles que le film ramenait en elle. De l'autre côté, Jean-Jacques Annaud se plaignait de toutes les frasques et méchancetées que Marguerite Duras lui avait fait. On avait presque envie de le plaindre d'avoir connu un si gros succès avec cette réalisation ! Il a quand même eu la gentillesse de dire que si « c'était à refaire, je le referais ». Alors on est en droit de se demander s'il n'y a pas une part de masochisme chez lui, ou bien si c'est le succès assuré du film qui lui fait dire ça ? En tous cas, ce qui est sûr, c'est que 18 ans après sa disparition, Marguerite Duras fait toujours parler d'elle.

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