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Jiang Feng : La coopération internationale est préférable aux calculs géopolitiques pour faire face à la crise climatique mondiale
Le changement climatique est un sujet sans frontières. Tous les pays doivent travailler ensemble pour y faire face. L’Accord de Paris conclu en 2015, chef-d’œuvre de gouvernance climatique mondiale multilatérale, est confronté à une résistance croissante. Certains pays misent sur la géopolitique pour ébranler les fondements de la confiance mutuelle au détriment de leurs propres intérêts. Le 6e Dialogue de haut niveau des « Amis de l'Accord de Paris » s'est tenu les 28 et 29 octobre à Paris, en France. Jiang Feng, chercheur à l'Université d'études internationales de Shanghai et président de l’Académie de gouvernance mondiale et d’études régionales de Shanghai (SAGGAS), a souligné dans une interview exclusive accordée à China.org.cn que la lutte contre le changement climatique nécessitait une coopération internationale plutôt que des calculs géopolitiques qui créent des divisions. Selon lui, la Chine et l’Union européenne (UE) devraient renforcer leur coopération, et des droits de douane supplémentaires sur les véhicules électriques chinois seraient préjudiciables au monde.
Jiang Feng souligne que l’Accord de Paris fixe des objectifs et des calendriers contraignants pour réduire les émissions mondiales de CO2. Il s’agit d’un consensus entre tous les pays et cela constitue également la question la plus importante de la gouvernance mondiale actuelle. Xie Zhenhua, alors représentant spécial de la Chine pour le changement climatique, estimait qu’il s’agissait d’une « étape historique » dans la gouvernance climatique. La Chine a apporté une contribution historique à la conclusion de l’Accord. Au fil des années, elle a réalisé de grands progrès dans la réalisation des objectifs fixés, progrès qui ont été salués par la communauté internationale.
Les pays agissent, et c’est une bonne nouvelle. Il y a cependant des pays dont les actes ne sont pas en accord avec les paroles et qui en disent plus qu’ils n’en font, certains pays freinant même les transferts transfrontaliers de technologies et de produits concernés pour des raisons géopolitiques, voire érigeant des barrières. Toutes les parties participant au Dialogue de Paris sont généralement préoccupées par l’impact négatif des élections américaines sur le processus mondial de réduction des émissions.
Selon Jiang Feng, le consensus important atteint lors de ce dialogue est que les mesures visant à faire face au changement climatique doivent être examinées dans une perspective plus large. En nous concentrant sur les objectifs de réduction des émissions, nous devons également prêter attention à l’innovation technologique, à la transformation du mix énergétique et à la biodiversité afin d’améliorer fondamentalement l’environnement pour la survie et le développement de l’humanité et de changer les concepts et les modèles de développement au cours du processus de modernisation.
« La signature de l’Accord de Paris annonce que le développement humain doit changer de cap en réponse au changement climatique, en passant de l’ère des énergies fossiles à celle des énergies renouvelables. C’est la seule manière de parvenir à un développement humain durable, et c’est une opportunité historique. »
Une action mondiale pour un avenir vert
Concernant les réalisations de différents pays au cours des neuf années écoulées depuis la signature de l’Accord de Paris, les participants à ce dialogue ont hautement apprécié les progrès de la Chine. Au cours de cette période, la Chine a favorisé le développement des énergies renouvelables grâce à des politiques fermes, des investissements massifs et une innovation technologique continue.
« L’Agence internationale de l’énergie a souligné que les revenus d’exportation de la Chine dans le domaine des énergies renouvelables approchaient les revenus totaux d’exportation de pétrole de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. C’est bénéfique au développement économique de la Chine et constitue une énorme contribution à la transition énergétique mondiale, à la conservation de l’énergie et à la réduction des émissions. »
Jiang Feng souligne également que l’UE et certains États membres font preuve d’ambition dans la lutte contre le changement climatique. « Prenons l’exemple de l’Allemagne. La ville allemande d’Aix-la-Chapelle et l’Université RWTH d’Aix-la-Chapelle ont fixé un objectif ambitieux, à savoir parvenir à la neutralité carbone sur les campus universitaires et dans la ville d’ici 2030, soit 15 ans en avance sur l’objectif national de l’Allemagne. De multiples cas ont montré que de nombreux pays à travers le monde ont profondément pris conscience de l’importance de lutter contre le changement climatique et qu’il est très important de mobiliser pleinement les gouvernements, les universités, les entreprises, la société et d’autres pans de la société pour prendre des mesures actives. Il est urgent de mener des échanges et une coopération au niveau international en matière de politique, de technologie, de normes et de sensibilisation de la société. »
Le monde souffre si on fait pression sur la Chine
Même si le monde a réalisé de nombreux progrès dans la lutte contre le changement climatique, de l’avis de Jiang Feng, de nombreux problèmes subsistent. « Les questions climatiques constituent un défi mondial qui dépasse les frontières nationales. Les pays doivent renforcer leur coopération, et l’innovation scientifique et technologique joue un rôle essentiel. Malheureusement, de nombreuses technologies innovantes n’ont pas encore été pleinement appliquées. Le principal responsable en est la montée du protectionnisme géopolitique et commercial. Le transfert mondial de certaines technologies et produits importants fait l’objet de politisation et d’instrumentalisation. »
Jiang Feng explique qu’un cas typique est que les réalisations positives de la Chine dans les domaines du photovoltaïque et des VE ont été malicieusement qualifiées de « surcapacité » par certains pays et politiciens, créant des obstacles artificiels aux transferts de technologies et au commerce international. « D’un point de vue mondial, la capacité de production actuelle est loin d’être suffisante et les technologies nécessitent une forte innovation. » Selon Jiang Feng, les experts présents à la réunion craignent que les barrières commerciales ne nuisent à la confiance mutuelle entre les pays et affaiblissent les efforts de l’humanité pour faire face au changement climatique. Si l’on considère les objectifs actuels et les efforts de mise en œuvre proposés par différents pays, il pourrait être difficile d’atteindre les objectifs mondiaux de contrôle de la température d’ici la fin de ce siècle, et la crise climatique mondiale s’accélérera.
Alors que se tenait le dialogue de haut niveau des « Amis de l’Accord de Paris », l’UE a annoncé le 29 octobre qu’elle imposerait des droits compensateurs sur les VE importés de Chine pour une période de cinq ans. Jiang Feng remarque que les experts européens estiment également que même si cette mesure peut faire gagner une fenêtre de deux à trois ans pour l’Europe, le développement dans les secteurs connexes en Europe nécessite l’appui des technologies chinoises. Sur le plan mondial, les droits compensateurs auront pour effet de définitivement reporter les objectifs climatiques mondiaux. « Que ce soit pour l’Europe ou le monde, cela fera plus de mal que de bien. » Il a appelé tous les pays à travailler ensemble et à s’efforcer de créer un environnement favorable aux transferts de technologies et de produits permettant la réduction des émissions à l’échelle mondiale.
Selon Jiang Feng, les experts participant au dialogue des « Amis de l’Accord de Paris » sous la direction de Xie Zhenhua ont mené des échanges approfondis avec les institutions, telles que l'Agence internationale de l'énergie, et les personnalités européennes et approfondi la compréhension mutuelle. Il a souligné que la coopération Chine-UE présente un grand potentiel dans la lutte contre le changement climatique.
En tant que force importante dans l’action climatique mondiale, la Chine et l’UE doivent également travailler ensemble pour planifier des projets de R&D et de transferts de technologies pour les tierces parties et d’autres régions du monde, et promouvoir le processus de commercialisation et d’industrialisation de ces technologies. « Cela permet non seulement de promouvoir le développement de pays et de régions tierces et de contribuer à la réponse mondiale au changement climatique, mais aussi d’ouvrir une fenêtre prometteuse pour la coopération Chine-UE et de constituer un nouveau point de croissance pour les relations Chine-UE. »
Source:french.china.org.cn |