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Les deux sessions détailleront la feuille de route économique du pays
L’objectif de PIB et les « nouvelles forces productives » figurent en bonne place à l’ordre du jour, alors que le pays entame une année charnière dans sa marche vers la modernisation
La Chine lancera officiellement lundi ses deux sessions annuelles, l'un des rassemblements politiques les plus importants de l'année qui donnera le ton des priorités politiques du pays dans un large éventail de secteurs, allant de l'économie à la diplomatie, à l'armée ou au développement social.
Cet événement crucial est organisé face au contexte d’une situation internationale complexe, de tensions géopolitiques croissantes, et d’une année chargée d’élections présidentielles, ce qui jette d’énormes incertitudes sur les perspectives économiques mondiales. Cette année marque le 75e anniversaire de la fondation de la République populaire de Chine. Sur le plan interne, la Chine entame également une année importante dans la mise en œuvre de son 14e Plan quinquennal (2021-2025) et dans sa marche vers la modernisation, un objectif primordial en vertu duquel les moteurs économiques devraient non seulement s’accélérer, mais également être portés par de « nouvelles forces productives ».
Les enjeux quant à la façon dont les deux sessions détailleront une feuille de route pour le développement économique de la Chine sont donc importants, ont indiqué des observateurs, car cela aura également un impact considérable sur le façonnement du paysage économique et politique mondial. La trajectoire de reprise économique de la Chine apportera également stabilité et prévisibilité au monde, ont-ils noté.
Un ensemble de sujets économiques figurent en bonne place à l'ordre du jour, dont notamment l'objectif de croissance du PIB, le ratio déficit/PIB, les politiques fiscales et monétaires, ainsi que l'emploi. Parallèlement, des députés et des conseillers politiques ont déclaré au Global Times qu'ils évaluaient attentivement l'élaboration de politiques impliquant la stimulation de l'économie privée, la création de « nouvelles forces productives », ainsi que l'approfondissement de la réforme du marché financier, entre autres sujets d'intérêt public.
La deuxième session du 14e Comité national de la Conférence consultative politique du peuple chinois (CCPPC), le plus haut organe consultatif politique du pays, débutera lundi à 15h et se terminera le 10 mars au matin, pour une durée de six jours, a indiqué Liu Jieyi, porte-parole de la deuxième session du 14e Comité national de la CCPPC, lors d'une conférence de presse tenue dimanche, soit à la veille de l’ouverture de la session annuelle.
La deuxième session de la 14e Assemblée populaire nationale (APN) s'ouvrira elle à Beijing le 5 mars.
Fixer des objectifs économiques clés
Les questions économiques ont été au centre des préoccupations des conseillers politiques, et tous les conseillers politiques sont d'avis qu'en 2023, l'économie chinoise a bien résisté aux pressions extérieures et a surmonté les difficultés internes, a affirmé M. Liu, notant que l'économie était sur la voie d'une reprise générale.
« En ce qui concerne l'avenir, l'économie chinoise est résiliente, possède un potentiel et une vitalité énormes, et sa dynamique de croissance continuera à se renforcer et à conduire à un avenir brillant », a souligné M. Liu.
L'un des objectifs économiques les plus attendus pour les deux prochaines sessions est l'objectif de PIB, car la Chine, tout en maintenant une bonne dynamique de reprise économique, reste confrontée à un ensemble de pressions à la baisse allant d'une demande insuffisante, d'un affaiblissement des attentes sociales et d'un ralentissement de l'immobilier qui pourraient peser sur les perspectives de développement du PIB cette année.
Des députés et des économistes ont déclaré que l’objectif du PIB constituerait un modèle pour le travail économique et les mesures d'accompagnement de cette année. Il mettra également en lumière la façon dont le gouvernement chinois effectue un calcul global pour équilibrer un certain nombre d'objectifs, notamment la stabilisation de l'emploi, la prévention des risques, l'amélioration des moyens de subsistance de la population et l'élévation des attentes sociales, et ce tout en se coordonnant avec les objectifs définis dans le 14e Plan quinquennal (2021-2025).
Des observateurs ont indiqué que l'objectif du PIB pourrait être fixé autour de 5%, ce qui témoignerait du « pragmatisme et de la réflexion sur les résultats » des décideurs politiques. Il tiendra également compte des objectifs de croissance avancés lors des deux sessions locales tenues dans les différentes provinces depuis le début de l'année.
En outre, « il est important que l'objectif de croissance du PIB soit fixé presque au même niveau que celui de l'année dernière, voire plus, pour que la deuxième économie mondiale puisse poursuivre sur la voie d'un développement de haute qualité », a avancé dimanche Cao Heping, économiste à l’Université de Pékin.
Le 14e Plan quinquennal stipule que le pays « maintiendra la croissance annuelle moyenne du PIB dans une fourchette appropriée et fixera des objectifs annuels de croissance du PIB sur la base de la situation réelle ».
« Nous surveillons de près l'attitude du gouvernement à l'égard des progrès du 14e Plan quinquennal […] Nous espérons également que le gouvernement prendra l'objectif climatique au sérieux, alors que davantage de politiques vertes sont attendues au cours des deux prochaines années », a déclaré Xing Zhaopeng, stratège principal pour la Chine chez ANZ Research, dans une note envoyée au Global Times ce weekend. M. Xing a souligné que les objectifs économiques de la Chine ajouteront de la certitude à l'économie mondiale et que la Chine continuera d'être le plus grand contributeur au PIB mondial cette année.
La façon dont la Chine formulera son orientation en matière de politique fiscale et monétaire est un autre sujet d'intérêt pour le marché. M. Xing a indiqué s'attendre à ce que le ratio déficit/PIB soit fixé à 3%.
Certains économistes prédisent également que le déficit budgétaire de cette année pourrait osciller autour de 3,5 à 4%, alors que le doublement des mesures de relance budgétaire, face à un contexte de faibles taux d'intérêt du pays et une fin proche du cycle mondial de hausse des taux d'intérêt, pourrait entraîner une baisse des coûts d'emprunt.
« Cette année sera une année de transition pour la mise en œuvre massive de politiques de soutien, à la fois sur les fronts macroéconomiques et dans les domaines plus subtils propices à l'ajustement de la structure économique du pays, alors que les sessions de l'année dernière ont vu l’annonce de la nouvelle composition du gouvernement », a indiqué Cao Heping. Il a ajouté que la Chine avait également entrepris une réforme des institutions du Parti et de l'État l'année dernière, indiquant que les politiques du gouvernement central devraient ainsi être mises en œuvre plus efficacement et plus rapidement.
Tian Yun, un économiste chevronné basé à Beijing, a déclaré dimanche au Global Times qu'avec les élections présidentielles aux États-Unis et dans une soixantaine d'autres pays cette année, ainsi que les tensions géopolitiques persistantes qui font des ravages sur la chaîne d'approvisionnement mondiale, la situation mondiale pourrait devenir encore plus compliquée cette année.
« L'environnement extérieur volatile appelle les décideurs politiques chinois à maintenir une orientation stratégique, à organiser correctement les travaux économiques tout au long de l'année et à rester déterminés à les exécuter, de manière à inspirer la confiance et à accroître les attentes du marché », a noté M. Tian.
L'économie chinoise a connu une croissance de 5,2% sur un an en 2023, restant au-dessus de l'objectif officiel du PIB d'environ 5% fixé l'année dernière. Le ratio déficit/PIB devrait avoir atteint 3,8% l’année dernière.
Sous les projecteurs
Les députés et les conseillers politiques s'attendent également à ce que le rapport d'activité du gouvernement de cette année expose le plan du pays visant à créer de « nouvelles forces productives » - un nouveau concept proposé par le président chinois en septembre et qui est devenu un mot à la mode dans les discussions, avec de larges ramifications pour la modernisation de la Chine dans les années à venir.
« La création de “nouvelles forces productives” est une étape décisive dans le processus de développement de haute qualité de l'économie, face au contexte de la transition économique et de la révolution technologique rapide de la Chine. Cela aidera à tracer un plan pour la croissance des industries stratégiques émergentes et futuristes, et à proposer des conseils sur l'intelligence et la numérisation des industries traditionnelles », selon Guo Guoping, député de l’APN et scientifique en chef chez Origin Quantum.
« Face à la course technologique mondiale et aux efforts incessants de découplage menés par les États-Unis contre l'industrie technologique chinoise, la création de “nouvelles forces productives” est également essentielle pour que la Chine puisse réaliser des percées dans les secteurs technologiques de pointe, tels que l'intelligence artificielle (IA), les semi-conducteurs et l'informatique quantique, et parvienne à une plus grande autosuffisance dans certains domaines actuellement dominés par des pays étrangers », ont avancé des députés.
« La création de “nouvelles forces productives” injectera un nouvel élan qui soutiendra les progrès constants de la modernisation chinoise », a affirmé vendredi Qi Xiangdong, président du groupe technologique Qi An Xin et membre du Comité national de la CCPPC. Selon sa proposition partagée avec le Global Times, M. Qi a exhorté les entreprises privées à jouer un rôle de pionnier en facilitant le développement coordonné de la chaîne industrielle technologique.
En outre, plusieurs motions et propositions cette année visent principalement à renforcer la confiance dans l'économie privée. Selon Liu Jieyi, faciliter l'élargissement de l'économie privée est une tradition de l'exercice des fonctions de la CCPPC, et l'organe consultatif politique tiendra également des séances d'information sur des questions clés impliquant « la résolution des défauts de paiement des entreprises privées ».
Selon une proposition que l'Association nationale chinoise pour la construction démocratique (CNDCA) a partagée avec le Global Times, le parti politique a suggéré aux décideurs politiques chinois d'accélérer la formulation d'une loi sur la promotion de l'économie privée afin d'améliorer le système législatif concernant l'économie privée. La CNDCA est l'un des huit partis politiques chinois non communistes.
« L'économie privée constitue un important moteur d'emploi et une force non négligeable dans le développement économique de la Chine. Ces dernières années, la vigueur de l'économie privée a quelque peu diminué en raison de l'environnement interne et externe. Cela renforcerait fortement la confiance des entrepreneurs privés s'il y avait une loi garantissant une position égale sur le marché des entreprises privées par rapport aux entreprises publiques et étrangères », a déclaré Liu Yonghao, membre du Comité national de la CCPPC et président du New Hope Group.
En outre, l’approfondissement des réformes dans des secteurs clés est au centre de l’attention. Parmi elles, la manière dont les régulateurs chinois répondront aux inquiétudes des investisseurs et pousseront à des réformes plus profondes du marché des actions a retenu l'attention, face aux récentes turbulences du marché boursier.
Les autorités devraient mener une série de réformes ciblant les systèmes sous-jacents du marché des capitaux, conformément au standard d’être « orienté vers le marché, fondé sur le droit, et internationalisé », dans le but de jeter les bases d'un environnement d'investissement sain en Chine à long terme, a déclaré au Global Times Tian Xuan, vice-président de l’École de finance PBC de l'Université Tsinghua.
« Nous sommes curieux de voir dans quelle mesure l'accent sera mis sur l'amélioration de l'environnement des affaires pour les entreprises étrangères », a indiqué le président de la Chambre de commerce de l’Union européenne en Chine (EUCCC), Jens Eskelund, exprimant l'espoir d'une intensification des efforts d'ouverture du pays.
Source:french.china.org.cn |