La diplomatie chinoise maintient son cap contre vents et marées

Le conseiller d’Etat et ministre des Affaires étrangères chinois Wang Yi a tenu une conférence de presse dans l’après-midi du 7 mars en marge de la 5e session de la 13e Assemblée populaire nationale. Il a répondu aux questions des journalistes chinois et étrangers en s’attardant sur les questions brûlantes du moment.  

En préambule, Wang Yi a rappelé le début d’année difficile sur le plan international, avec la persistance du COVID-19 et depuis quelques jours, le conflit en Ukraine. Il a appelé à l’unité et au dialogue, affirmant que la Chine, en tant que grand pays responsable, continuera de prôner le multilatéralisme ainsi que la paix et le développement pour faire advenir une communauté de destin pour l’humanité. 

La Chine disposée à jouer les bons offices dans la crise ukrainienne 

La situation en Ukraine est évidemment la question la plus préoccupante et la presse internationale observe la Chine, notamment certains médias occidentaux qui ont exprimé le souhait de voir une « médiation » chinoise. Wang Yi a remarqué que la Chine avait exprimé sa position à de nombreuses reprises. « Nous avons toujours agi de manière objective et impartiale, et avons des jugements et des affirmations de manière indépendante sur le fond de l’affaire », a-t-il dit. « Une couche épaisse de glace ne peut être l’œuvre d’un seul jour de gel », a-t-il néanmoins remarqué, laissant entendre que les raisons du conflit sont complexes et profondes et qu’il faut savoir raison garder plutôt que d’ajouter de l’huile sur le feu. Et d’en appeler à la Charte des Nations Unies et au respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale des pays, mais aussi des préoccupations sécuritaires légitimes de chacune des parties. Pour Wang Yi, il est nécessaire d’établir une architecture de sécurité européenne équilibrée, efficace et durable. Mais au préalable, il convient de revenir à la table des pourparlers et de gérer la crise humanitaire. 

Pour le premier point, Wang Yi a noté que la Chine maintenait des contacts étroits avec toutes les parties. Au lendemain du conflit, le président Xi Jinping a demandé à avoir un entretien téléphonique avec le président Vladimir Poutine, disant qu’il souhaitait voir la Russie et l’Ukraine engager des pourparlers de paix le plus rapidement possible. Après deux cycles de pourparlers, un troisième cycle pourrait aboutir à de nouvelles avancées. Mais le temps presse, a remarqué Wang Yi. «  La Chine estime que plus la situation est tendue, plus les pourparlers de paix doivent continuer ; plus les différences sont grandes, plus il est nécessaire de s’asseoir à la table des négociations. » Et d’affirmer que la Chine souhaitait jouer un rôle encore plus constructif et travailler de concert avec la communauté internationale pour « jouer les bons offices ». 

Concernant les aspects humanitaires, Wang Yi a insisté sur le respect des principes de neutralité et d’impartialité et sur la non-politisation de l’aide humanitaire. Qu’il s’agisse des personnes déplacées, du bien-être de la population civile ukrainienne et étrangère, et de l’accès à l’aide, il est impératif d’aider l’ONU, notamment le coordinateur des Nations unies pour la crise en Ukraine. Wang Yi a d’ailleurs annoncé que la Croix-Rouge chinoise fournira très rapidement à l’Ukraine un lot d’aide humanitaire d’urgence.

La relation sino-russe est solide le roc ; la relation Chine-UE est irréversible

Sur la question des relations sino-russes, autre volet qui suscite un grand intérêt de la part des médias occidentaux, Wang Yi a été direct. « Les relations sino-russes sont l’une des relations bilatérales les plus importantes au monde », précisant qu’elles sont fondées sur « le non-alignement et la non-confrontation » et qu’elles ne ciblent aucun pays tiers et ne tolèrent ni ingérence ni provocation. Les deux pays ont d’ailleurs signé la Déclaration conjointe sur les relations internationales et le développement durable mondial dans la nouvelle ère, s’opposant à la reprise de la « mentalité de guerre froide » et à la confrontation idéologique. « L’amitié entre les deux peuples est solide comme le roc… Aussi malsaine que soit la situation internationale, la Chine et la Russie maintiendront leur détermination stratégique et continueront de faire avancer le partenariat stratégique global de la nouvelle ère. »

Cette donne géopolitique conduit l’Union européenne à s’interroger sur ses relations avec la Chine. Wang Yi a tenu à répondre à cette préoccupation. « Les relations Chine-UE et Chine-Russie sont deux questions entièrement différentes… La Chine et l’Europe sont les deux principales forces qui maintiennent la paix mondiale, les deux principaux marchés qui favorisent le développement commun, et les deux principales civilisations qui favorisent le progrès humain », et elles constituent « un facteur de stabilité dans une situation mondiale chaotique ». Et de dénoncer certaines forces qui ne veulent pas voir le développement stable des relations Chine-UE et brandissent la soi-disant « menace chinoise » et toutes sortes de menaces. « J’espère que la Chine et l’UE seront très vigilantes à ce sujet. La coopération Chine-UE a connu des décennies de hauts et de bas. Elle est solidement enracinée dans l’opinion publique, avec de vastes intérêts communs et des exigences stratégiques similaires. Elle a une forte résilience et un fort potentiel, et aucune force ne peut inverser son cours irréversible. » 

La diplomatie chinoise reste donc fidèle à ses principes et à ses engagements initiaux et montre sa résilience et sa constance face aux défis mondiaux, aussi graves et pressants soient-il.  

Par Jacques Fourrier (L’auteur est un commentateur et journaliste français présent en Chine depuis 25 ans)

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