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Depuis que l’initiative « la Ceinture et la Route » a été proposée en 2013, les investissements directs étrangers (IDE) non financiers de la Chine dans les pays ciblés par cette initiative ont atteint 104,72 milliards de dollars, selon le ministère du Commerce. Malgré la pandémie de COVID-19, ils n’ont pas diminué, mais progressé de 18,3 % sur un an en 2020 pour atteindre près de 18 milliards de dollars, soit 16,2 % du total du pays, contre 13,6 % en 2019.
Pas de « piège de la dette »
L’afflux croissant de capitaux chinois dans les projets d’infrastructure de « la Ceinture et la Route » n’a pas provoqué de crise de la dette dans les pays d’accueil, en raison des modalités de prise de décision. La participation est en effet entièrement volontaire. Tous les projets sont exécutés par les entreprises suivant les règles du marché. Les prêts de gouvernement à gouvernement sont rares, la plupart des mécanismes de financement reposant sur des mécanismes de marché, tels que le financement de partenariats public-privé. Enfin, tous les projets accordent une attention particulière au retour sur investissement, et sont étroitement liés aux besoins de développement des pays concernés et des régions desservies.
Le Sri Lanka est représentatif. Selon le gouvernement sri-lankais, les prêts chinois ne représentent que 12 % de la dette extérieure totale du pays. La majeure partie de celle-ci est composée d’emprunts sur les marchés internationaux et de prêts auprès d’institutions financières multilatérales. Le port international d’Hambantota, dans le sud du pays, une des régions les plus pauvres, est souvent cité par les critiques comme étant un projet ayant des implications négatives pour le pays, son exploitation ayant été cédée à la Chine pour une période de 99 ans. Cependant, l’opérateur, Hambantota International Port Group, est une coentreprise entre le gouvernement sri-lankais et la société China Merchants Port. Cette dernière a acquis des participations majoritaires dans le projet en suivant les règles du marché et développe la zone en créant un parc industriel, avec des emplois et des investissements à la clé.
Le Corridor économique Chine-Pakistan (CECP), un projet historique dans le cadre de « la Ceinture et la Route », a également été attaqué par certains médias occidentaux. Mais 80 % des investissements proviennent de coentreprises sino-pakistanaises, dépassant largement la part de 20 % des financements par emprunt.
Le gouvernement chinois met l’accent sur la viabilité de la dette. En 2019, le ministère des Finances a publié une directive sur les procédures et les normes pour l’évaluation de la viabilité de la dette, l’analyse et la gestion des risques, ainsi que des tests de résistance pour que le processus soit clair et transparent. Lorsque les pays participants ne sont pas en mesure de rembourser la dette des agences chinoises, la consultation est privilégiée. L’an passé, pour trouver des solutions au problème de la dette dans d’autres pays en développement en raison de la pandémie, la Chine a répondu à l’initiative du G20 d’allégement de la dette en accordant une rallonge d’une valeur d’1,35 milliard de dollars, ce qui a profité à 23 pays. Il s’agissait également du montant différé le plus élevé, soit 28 % de l’allégement total accordé par le G20. En outre, le gouvernement chinois a également renoncé aux prêts sans intérêt de 15 pays africains qui devaient arriver à échéance cette année-là.
La dette est un problème qui existait bien avant le lancement de l’initiative « la Ceinture et la Route ». Cela arrive à tous les pays, notamment aux pays européens qui ont subi une crise prolongée après 2008. Depuis 2010, il y a eu une croissance rapide de la dette mondiale, principalement en raison des mesures de relance de très grande ampleur pour faire face aux retombées de la crise. L’assouplissement quantitatif aux États-Unis et dans l’UE a conduit à un excédent de liquidités sur le marché financier international et une grande quantité de capitaux a afflué vers les pays en développement.
En faveur des énergies durables
La consommation d’électricité par habitant dans les pays riverains de l’initiative est inférieure à 2 000 kWh par an, bien moins que la moyenne mondiale, ce qui indique une indigence énergétique exceptionnelle. La Chine promeut la transition énergétique en partenariat avec d’autres participants pour que « la Ceinture et la Route » soit verte, sobre en carbone et durable. Il s’agit fondamentalement de générer plus d’énergie renouvelable et de réduire les émissions de dioxyde de carbone.
Le Pakistan est un excellent exemple. Les centrales électriques constituent plus de 60 % des projets du CECP, avec de l’énergie hydroélectrique, du solaire, de l’éolien, du nucléaire et quelques centrales au charbon. Il existe plusieurs centrales hydroélectriques, comme le Karot Power Project sur la rivière Jhelum (est du Pakistan), qui a été le premier projet d’investissement du Fonds de la Route de la soie, créé pour financer les projets de cette initiative. De nombreux projets éoliens sont déjà exploités. Par ailleurs, China National Nuclear Corporation construit les deux centrales nucléaires K2 et K3 à Karachi, la capitale économique du Pakistan, en utilisant une technologie nucléaire de troisième génération 100 % chinoise, avec le réacteur Hualong-1. Une centrale solaire de 100 MW dans la ville orientale de Bahawalpur figure également dans les projets de génération électrique du CPEC. La Chine et le Pakistan ont collaboré dans la construction de quelques centrales au charbon, qui ont utilisé des technologies de pointe pour contrôler les émissions et les coûts.
En octobre 2020, peu de temps après que le Président Xi Jinping a annoncé que la Chine atteindrait un pic des émissions de CO2 avant 2030 et la neutralité carbone avant 2060, lors du débat général de la 75e session de l’Assemblée générale des Nations unies, le gouvernement chinois a publié une directive stipulant notamment que les projets liés au charbon seraient strictement limités. Quelques mois auparavant, la Banque populaire de Chine et la Commission nationale du développement et de la réforme ont mis à jour la liste des projets éligibles aux obligations vertes, supprimant ceux qui utilisent les énergies fossiles traditionnelles.
A noter également que le marché chinois du carbone est le deuxième plus grand au monde, et que plus de 400 millions de tonnes de quotas d’émission de dioxyde de carbone y ont été échangés depuis son ouverture.
Une nouvelle dynamique
L’initiative « la Ceinture et la Route » est une plateforme importante pour la double circulation – le nouveau modèle de développement de la Chine consistant à faire de l’économie nationale le principal axe de croissance, complété par l’économie mondiale. L’économie nationale constitue le pilier car la Chine est un très grand marché avec un potentiel élevé de demande intérieure. Sa population d’1,4 milliard d’habitants comprend 400 millions de consommateurs à revenu intermédiaire ainsi que 130 millions d’acteurs du marché. Sa capacité de marché est suffisamment grande à la fois pour la consommation et les investissements. Ces dernières années, la consommation est devenue la principale source de croissance économique en Chine. En 2010, sa contribution au PIB était de 49,3 %, contre 55 % en 2016, et 55,8 % en 2019. Malgré une légère baisse à 54,3 % en raison de la COVID-19 en 2020, elle devrait repartir en 2021.
Parallèlement à la croissance de la consommation, les investissements intérieurs affichent une hausse soutenue, signifiant que la demande intérieure s’est renforcée et peut soutenir la croissance économique.
L’économie chinoise soutient la croissance économique mondiale. D’une part, les importations chinoises et les IDE ont continué de croître, et d’autre part, il y a eu une tendance à l’augmentation des exportations chinoises et à un afflux continu d’IDE dans le pays. Malgré la COVID-19, le commerce extérieur de la Chine a atteint un niveau record de 4 650 milliards de dollars en 2020, en hausse de 1,5 % sur un an, avec 2 590 milliards de dollars d’exportations (+3,6 %) et 2 060 milliards de dollars d’importations (-1,07 %). L’excédent commercial annuel a augmenté de 26,9 % pour atteindre 535,03 milliards de dollars. En 2020, les flux sortants d’IDE de la Chine ont augmenté pour atteindre 132,94 milliards de dollars (+3,3 %), tandis que les IDE en Chine ont atteint 144,37 milliards de dollars (+4,5 %), faisant du pays la destination la plus attrayante pour les capitaux internationaux cette année-là.
La Chine et les autres participants à « la Ceinture et la Route » ont considérablement élargi la coopération en matière de commerce, d’investissements et de capacité industrielle. En 2020, le commerce de la Chine avec ces pays a augmenté de 1 %, voire de 7 % avec les membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est.
L’Accord de partenariat économique régional global signé en 2020 entre 15 économies d’Asie-Pacifique bénéficiera également à la Chine, l’un des participants, ainsi qu’à l’ensemble de la région et aux autres pays participants de « la Ceinture et la Route ».
L'auteur est professeur et doyen de la Faculté de « la Ceinture et la Route » à l’Université normale de Beijing
Source:Beijing Information |