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par Jacques Fourrier (l'auteur est un journaliste et commentateur français basé à Beijing)
Le président Xi Jinping et d'autres dirigeants chinois ont assisté vendredi 22 mai à la réunion d'ouverture de la troisième session de la 13e Assemblée populaire nationale au Grand Palais du Peuple à Beijing. Le premier ministre Li Keqiang a ensuite présenté le rapport d'activité du gouvernement au nom du Conseil des Affaires d'Etat pour le soumettre à délibération. Il ressort en filigrane que les circonstances actuelles graves, mais aussi les turbulences mondiales au cours de l’année écoulée, n’ont en rien entamé la détermination du gouvernement chinois à maintenir plus que jamais son cap et à élargir l’ouverture et approfondir la réforme.
Qu’il s’agisse du climat délétère et des pressions que les Etats-Unis font peser sur le libre-échange et la mondialisation, mais aussi des signes de repli sur soi que certains pays envoient, notamment en laissant entendre que des secteurs industriels entiers devraient être relocalisés, la Chine reste fidèle à ses engagements et souhaite continuer à améliorer l’ouverture sur l’extérieur et stabiliser les bases du commerce extérieur et des investissements étrangers au sein d’un système commercial multilatéral.
Une préoccupation majeure du gouvernement chinois est de promouvoir la stabilité globale du commerce extérieur en aidant les entreprises chinoises à surmonter les difficultés temporaires liées à la baisse de l’activité mondiale et des commandes ainsi qu’aux perturbations intervenues sur les chaînes mondiales d’approvisionnement et de production au cours du premier semestre, et qui se répercutent en premier lieu sur le compte de résultat des entreprises et l’emploi. Des mesures budgétaires et fiscales seront prises à cet effet pour soutenir les entreprises et limiter au maximum les licenciements, voire même stimuler les embauches. Les entreprises produisant pour l’exportation seront aussi davantage incitées à se tourner vers le marché intérieur. « Nous accélérerons le développement de nouvelles formes d’activités telles que le cybercommerce transfrontalier et élèverons nos capacités de fret international », a souligné le premier ministre, ce qui indique que la Chine a su tirer parti des enseignements de l’épidémie de Covid-19 et transformer la crise en opportunité en renforçant ses circuits logistiques, comme en témoigne la forte reprise récente des trains de fret Chine-Europe depuis deux mois.
La Chine, qui contribue depuis six années consécutives à près d’un tiers du commerce mondial, reste donc déterminée à jouer un rôle de grande puissance commerciale, notamment dans les services. Le premier ministre a d’ailleurs annoncé qu’une nouvelle phase d’expériences pilotes favorisant le développement innovant du commerce des services sera poursuivie.
La Chine veut par ailleurs promouvoir une coopération de haute qualité dans le cadre de l’initiative « Ceinture et Route » et plus généralement « veiller à assurer un développement plus sain des investissements chinois à l’étranger » sur la base du principe de « concertation, synergie et partage », conformément aux lois du marché et aux normes internationales. Le rapport d’activité réitère donc l’engagement de la Chine à renforcer la coopération économique et commerciale avec le reste du monde, et s’efforcera de faire avancer les négociations commerciales sur la création de zones de libre-échange (la zone de libre-échange Chine-Japon-Corée du Sud est en discussions depuis de nombreuses années), à mettre en œuvre la première phase de l’accord économique et commercial sino- américain conclu à la mi-janvier, et de faire aboutir l’accord du Partenariat économique régional global (qui inclut désormais 10 pays membres de l'ASEAN et 5 autres pays qui possèdent déjà un accord de libre-échange bilatéral avec l'ASEAN).
L’ouverture du marché chinois fait l’objet d’une attention particulière dans le rapport d’activité. La liste négative sur les investissements étrangers, révisée et allégée périodiquement et scindée depuis le 1er juillet 2018 en liste négative nationale et en liste négative des zones pilotes de libre-échange, sera de nouveau réduite. Dans cette configuration, et après l’entrée en vigueur de la Loi sur les investissements étrangers le 1er janvier 2020 votée lors des « deux sessions » de l’an dernier, il s’agira d’aller plus loin cette année et d’ « utiliser de manière active les capitaux étrangers ». La Chine va ainsi introduire une liste négative du commerce transfrontalier des services et accorder aux zones pilotes de libre-échange une plus grande autonomie en matière de réforme et d’ouverture. Sont concernés le port de libre-échange de Hainan, les nouvelles zones pilotes de libre-échange ainsi que des zones franches intégrées dans les régions du Centre et de l’Ouest. Le secteur des services sera plus ouvert, l’objectif étant de « créer un environnement des affaires basé sur l’égalité de traitement et la concurrence loyale pour toutes les entreprises, qu’elles soient chinoises ou étrangères », selon le rapport d’activité. Un récent rapport de la Banque Mondiale montre que la Chine progresse fortement dans ce domaine, passant de la 46ème place mondiale en 2018 à la 31ème place en 2019. La vitrine mondiale de cette ouverture est l’Exposition internationale des importations de Chine, qui a déjà connu deux éditions saluées dans le monde entier. Contre vents et marées, la Chine est déterminée à faire de la troisième édition qui se tiendra en 2020 un symbole puissant de l’ouverture de son marché. « Nous ferons avancer les préparatifs de la troisième édition de l’Exposition internationale d’importation de Chine, accroîtrons activement nos importations et développerons un grand marché de plus haut niveau qui soit tourné vers le monde extérieur », a d’ailleurs annoncé le premier ministre dans son rapport d’activité.
Si préserver le multilatéralisme commercial et jouer un rôle actif dans la réforme de l’Organisation mondiale du commerce sont deux grands objectifs de la Chine sur la scène commercial internationale, les faits récents montrent qu’il est tout aussi urgent de stabiliser les chaînes industrielles et d’approvisionnement et stimuler la réforme et le développement grâce à l’ouverture. Des défis que la Chine a décidé de prendre à bras-le-corps, mais qui nécessitent aussi une prise de conscience internationale des enjeux globaux pour les années à venir et comme l’a souligné le premier ministre, « de faire avancer la construction d’une communauté de destin pour l’humanité ».
Source:french.china.org.cn |