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Débat sur le temps de travail en Chine

French.china.org.cn | Mis à jour le 11. 04. 2019 | Mots clés : temps de travail,Chine

Depuis de nombreuses années, les heures supplémentaires sont courantes dans le secteur chinois de l’Internet. Cependant, cette pratique fait l’objet d’un débat depuis la publication en ligne d’une « liste noire » des entreprises technologiques, qui poussent leurs employés à suivre des horaires de travail en «9-9-6 », c’est-à-dire à commencer à 9 h, à finir à 21 h et à travailler 6 jours par semaine.

Cette liste noire aurait été compilée par des employés − anciens et actuels − des entreprises qu’elle mentionne. Lundi dernier, elle comptait 84 entreprises chinoises, dont les employés seraient contraints au «9-9-6 ». La plupart des grands noms du secteur technologique en Chine sont cités, que ce soit Baidu, Alibaba, Tencent, JD.com ou encore ByteDance, connu pour sa plateforme populaire de vidéos courtes Tik Tok.

« S’il s’agissait de travailler plus pour gagner plus, je serais bien plus motivé à suivre ces horaires en 9-9-6, mais la vérité, c’est que toutes les entreprises ne fonctionnent pas comme cela. C’est la raison pour laquelle beaucoup de personnes se plaignent », explique le développeur d’une entreprise de jeux vidéo basée à Hangzhou, dans la province orientale chinoise de Zhejiang.

Ces plaintes et ces discussions en ligne sont également apparues, car l’attitude des jeunes générations envers la vie et le travail est en train de changer, et leur conscience de la protection de leurs droits est de plus en plus aiguë. Avec l’amélioration du niveau de vie, de plus en plus de Chinois ont adopté un style de vie consistant à « travailler dur et s’amuser dur » (« work hard, play hard »), contrairement à l’état d’esprit des générations précédentes consistant à « travailler pour vivre ». Aujourd’hui, les Chinois continuent de « travailler dur », mais ils veulent plus de vacances et estiment que celles-ci sont un droit.

« Lorsqu’on évoque ces questions de vacances et de salaire, nous ne savons pas vers qui nous tourner et nous finissons par nous exprimer sur Internet », explique le développeur.

« Quand il y a des projets, je travaille sept jours par semaine et je peux même aller jusqu’à dormir au bureau. J’adore les jeux et j’aime mon travail, mais je pense que je suis sous-payé », ajoute-t-il.

Les analystes du secteur notent que les heures exigées par le modèle 9-9-6 dépassent largement les limites établies par la Loi chinoise sur le travail. La culture des heures supplémentaires est liée aux caractéristiques enracinées dans un peuple chinois travailleur, diligent, ambitieux et prêt à sacrifier ses intérêts pour réaliser les objectifs de groupe.

« Les entreprises dans le secteur de la technologie paient souvent des salaires plus élevés que dans d’autres secteurs. Il est donc raisonnable de travailler plus que ceux qui gagnent moins », explique Mme Song, qui précise avoir travaillé pendant deux ans pour Alibaba en tant que chef de projets. 

Mme Song suit la règle des 9-9-6, mais lorsqu’elle termine un projet avec son équipe, « le sentiment d’accomplissement n’a pas de prix ».

« Même si l’argent est important, la première de mes priorités est d’apprendre de nouvelles choses et de m’améliorer par le biais de mon travail, ce qui pourrait par la suite m’apporter de meilleures opportunités. Les heures supplémentaires sont normales dans ce secteur, [car] la concurrence est acharnée », analyse Mme Song.

Huawei, qui est réputée pour sa « culture prédatrice », encourage ses employés à travailler de manière agressive et à suivre une discipline stricte. Nombreux sont ceux qui pensent que cette méthode est à l’origine de son succès actuel.

Une problématique culturelle

D’après les analystes industriels, le travail d’arrache-pied et les efforts pour exceller ne sont pas des caractéristiques réservées uniquement aux entreprises, mais concernent également les individus. En Chine, les gens sont prêts à sacrifier une partie de leur vie personnelle pour leur réussite professionnelle. Il est possible que cela soit un peu différent et difficile à comprendre dans les pays européens.

Shen Jianfeng, le vice-directeur de la Faculté de droit de l’Université des relations de travail de Chine, explique que dans d’autres pays d’Asie de l’Est, comme le Japon et la Corée du Sud, la plupart des personnes ne considèrent pas les heures supplémentaires comme « une question sérieuse » du fait de certains éléments culturels. 

Les syndicats en Chine devraient jouer un rôle actif dans la protection des droits et des intérêts des travailleurs, ajoute-t-il, la consultation, la supervision et la protection des droits étant autant de mesures effectives pour réguler la problématique des heures supplémentaires.

Selon lui, « les heures supplémentaires dans le secteur de l’Internet sont un phénomène mondial et les syndicats à travers le monde ont cherché activement plus de façons de mieux protéger les droits des travailleurs dans un contexte de mise à niveau industrielle ».


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Source:french.china.org.cn