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Wu Jianmin, haut diplomate chinois, ancien ambassadeur de Chine en France et ancien président de l'Université des affaires étrangères de Chine, est décédé le 18 juin dans un accident de la circulation à Wuhan, à l'âge de 77 ans. Ce diplomate intelligent, raffiné et sincère a impressionné tout au long de sa longue carrière beaucoup de ses collègues et amis.
China.org.cn a interviewé Mme Zhong Jie, ancienne secrétaire chargée du protocole lorsque Wu Jianmin était représentant permanent de la Chine à la Mission permanente l'ONU à Genève entre 1997 et 1998, et a évoqué avec nous ses habitudes de travail et de vie quotidienne.
« En diplomatie, tous les détails comptent »
« J'ai travaillé à Genève entre 1997 et 1998 en tant que secrétaire du protocole pour l'Ambassadeur Wu Jianmin. Il était rigoureux, conscient de ses hautes responsabilités, et il m'a laissé une profonde impression », explique Mme Zhong.
Elle se souvient que l'Ambassadeur Wu disait souvent qu'en diplomatie, tous les détails comptent. Qu'il s'agisse de grandes négociations diplomatiques pour préserver l'image de la nation, ou de détails mineurs comme la réponse aux invitations, la réservation de voitures ou de repas, tout devait selon lui être pris au sérieux. Mme Zhong se souvient d'une erreur commise à son arrivée en Suisse, une adresse mal notée sur une invitation à dîner. En matière d'étiquette, l'ambassadeur ne peut arriver en retard, ni en avance aux banquets ou réunions auxquels il est convié, et les erreurs étaient strictement critiquées. L'attitude rigoureuse de l'ambassadeur n'a pas choqué Mme Zhong, qui a bien pris conscience de l'importance du travail à mener de manière attentive. Après cette expérience, de telles erreurs n'ont plus été commises.
Une grande discipline personnelle et un amour pour le tai-chi
« L'ambassadeur et son épouse sont des gens très disciplinés, ils passent la grande majorité de leur temps au travail. Au cours de mes deux années à Genève, je ne les ai pas vus aller se promener pour faire des achats une seule fois », se souvient Mme Zhong.
L'ambassadeur maintenait une hygiène de vie stricte, en se levant tous les matins vers 5 heures, et en se couchant à 22 heures. Chaque matin et chaque soir, l'ambassadeur pratiquait le tai-chi. En raison de son emploi du temps chargé qui ne laissait pas beaucoup de place à l'exercice, le tai-chi était son moyen privilégié pour se maintenir en forme. Parfois, entre deux événements, il trouvait aussi le temps de pratiquer le tai-chi vingt à trente minutes. Grâce à cette hygiène de vie, l'ambassadeur qui avait alors près de soixante ans avait toujours un hale de bonne santé. « Une fois, après un bilan médical, il est venu me dire, très heureux, qu'il n'avait pas le moindre problème de santé. Si cet accident n'avait pas eu lieu, je suis convaincue qu'il aurait vécu très longtemps », dit-elle avec tristesse.
M. Wu faisait aussi attention à ses habitudes alimentaires, avec un yogourt au petit déjeuner sans sucre, et du pain de blé entier. A Genève, il avait déjà ce régime depuis près de vingt ans. Pour l'ambassadeur originaire de Nanjing, où les plats ont une saveur délicate, un régime sain était principalement végétarien, avec très peu de viande.
« La diplomatie est un art de la communication »
« L'ambassadeur disait souvent que la diplomatie est un art de la communication. » En diplomatie, on ne peut pas réciter son texte, il faut se faire comprendre de manière aisée. Cette idée a été le fil conducteur de sa carrière diplomatique. Même après son départ en retraite, M. Wu n'a pas cessé d'œuvrer dans la diplomatie civile et publique.
Pendant ses années à Genève, son travail comportait trois aspects principaux : la communication avec les fonctionnaires de l'ONU, la communication avec les représentants des missions d'Etat à Genève, et la réception des délégations nationales. En plus de gérer les liaisons de travail du gouvernement à tous les niveaux, l'ambassadeur Wu a également prêté une grande attention à la diplomatie interpersonnelle. A Genève, il s'est entretenu fréquemment avec le fondateur du Forum économique mondial Klaus Schwab, maintenant des relations amicales et encourageant activement les relations entre le Forum économique mondial et la Chine. Il a aussi invité à plusieurs reprises le physicien américain d'origine chinoise Samuel Ting, prix Nobel de physique et membre du Centre européen de recherche nucléaire (CERN), ainsi que l'écrivain britannique d'origine chinoise, Han Suyin (aussi connue sous son nom de plume Elisabeth Comber), à participer à des événements à l'ambassade et à des échanges approfondis.
La modération ne signifie pas le compromis
Beaucoup de ceux qui connaissaient Wu Jianmin le décrivent en employant l'adjectif « raffiné ». Mme Zhong estime aussi que le raffinement et la modération de l'ambassadeur faisaient partie de son charme personnel unique. Sa philosophie dans la diplomatie était qu'« on ne peut pas parler uniquement de politique, il faut mettre l'accent sur la communication ». Cependant, la modération ne signifie pas le compromis sur la souveraineté et la dignité nationales, comme le montrait l'ambassadeur Wu en restant ferme sur ses positions.
Durant son mandat à Genève, M. Wu avait parmi ses responsabilités principales de participer au Conseil des droits de l'homme des Nations Unies. A cette époque, la diplomatie chinoise faisait face à une situation difficile et stressante envers l'opinion publique internationale. La situation était particulièrement défavorable à la Chine, et la marge de manœuvre diplomatique était très limitée. M. Wu avait analysé avec finesse la situation, jugeant que l'image de la Chine avait besoin de renforcer sa communication avec la société occidentale, et de s'efforcer à trouver un terrain commun tout en acceptant les différences de chacun. Grâce à son attitude, une motion défavorable à la Chine a été rejetée avec succès.
L'ambassadeur a consacré sa vie à la cause de la diplomatie pacifique de la Chine. L'annonce soudaine de son décès a donné lieu à l'expression de nombreuses condoléances de ses collègues et amis. Le 18 juin dans l'après-midi, l'ambassadeur de France en Chine Maurice Gourdault-Montagne a ainsi exprimé ses condoléances sur le site de communication officielle de l'ambassade : « Avec le décès de Wu Jianmin, ancien Ambassadeur de Chine en France, la relation franco-chinoise, à laquelle il a tant travaillé, perd un grand ami, et un vrai connaisseur de la France. Il était pour moi un maître dont j'ai tant appris, et j'admirais l'élévation de sa pensée. Nous sommes dans la peine et nous adressons toutes nos pensées à sa famille. »
Li Junfeng, directeur général du Centre national de stratégie sur le changement climatique et de coopération internationale, qui avait noué un lien fort avec l'Ambassadeur Wu, a déclaré dans une interview : « L'ambassadeur et moi n'étions pas des amis proches, mais sa pensée diplomatique m'a profondément impressionné. Il pensait que la responsabilité des diplomates était envers la paix, la résolution des conflits, et la transformation de l'hostilité en amitié. Il était particulièrement opposé à la pensée nationaliste étroite. »
Le célèbre traducteur Shen Dali a également fait part de sa peine dans une interview accordée à China.org.cn : « Wu Jianmin était un de nos anciens camarades de l'Université des langues étrangères, ma femme et moi sommes dans la peine après avoir appris sa mort soudaine. »
Source: french.china.org.cn |
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