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Le cinéma de Desplechin à Shanghai

French.china.org.cn | Mis à jour le 27. 04. 2016 | Mots clés : cinéma,Shanghai

Cinq films d'Arnaud Desplechin, le réalisateur français récompensé de nombreuses fois notamment à Cannes et à la Mostra de Venise, seront présentés au Premier Cinema, au Musée des arts de Chine et à l'Université normale de Shanghai jusqu'au 8 mai.

« Le marché chinois du cinéma est relativement complexe et les spectateurs chinois n'ont pas souvent l'occasion de voir des films français au cinéma, à part pour les rétrospectives ou les festivals », explique le réalisateur au Shanghai Daily.

« Ce qui est bien, c'est qu'il existe de plus en plus de collaborations entre les réalisateurs chinois et français. Par exemple, Jia Zhangke, Liu Ye et Tsai Ming-Liang ont chacun réalisé des travaux avec des agences ou des réalisateurs français. Cette sorte de dialogue entre le cinéma chinois et français est une très bonne chose. »

Né en 1960, Arnaud Desplechin a grandi avec les maîtres de la Nouvelle Vague, notamment Truffaut et Godard. Il cite régulièrement ces réalisateurs de légende et s'enthousiasme, lorsqu'il parle de leurs travaux et de leurs idées. Il continue également à suivre cette tradition du cinéma d'auteur.

Les caractéristiques de ses films sont claires : tons élégiaques, dialogues intelligents, scènes énigmatiques, contextualisation et références à la Guerre froide.

« Je ne fais pas de films réalistes sociaux. J'ai grandi à une époque où l'Europe était divisée en deux, avant d'être réunifiée. Naturellement, cela se retrouve dans mes films », explique-t-il.

Desplechin a travaillé dans de nombreux aspects de la réalisation cinématographique. En 1996, il réalise Comment je me suis disputé… (ma vie sexuelle), un drame sur la lutte d'un jeune intellectuel et les choix qu'il a à faire dans sa vie. Le film a gagné de nombreuses récompenses et Desplechin fut bientôt appelé le « Woody Allen français » et « l'Eric Rohmer de sa génération ».

En 2015, il se replonge dans l'adolescence du protagoniste avec Trois souvenirs de ma jeunesse, considéré comme une préquelle du film sorti en 1996. Les projections à Shanghai incluront également son premier long métrage, La Sentinelle (1992), son premier film en anglais, Esther Kahn (2000), Rois et Reine (2004) et Un conte de Noël (2008).

« Aujourd'hui, je ne pense plus trop au box-office pour les films que je réalise. Je veux juste essayer quelque chose de nouveau et devenir un meilleur artiste à chaque nouveau projet. Pour moi, il s'agit d'une ambition plus ambitieuse que de faire un film, qui se vende mieux que les blockbusters hollywoodiens. Le destin de ces films ne m'appartient pas et tout ce que je peux faire, c'est essayer de continuer à faire des films. »

Le réalisateur donne des exemples de sa propre filmographie.

Esther Khan, qui raconte l'initiation d'une jeune actrice de théâtre londonienne à la fin du XIXe siècle, n'était pas très connu à sa sortie, même lorsqu'il fut nominé pour une palme d'or à Cannes. Il est cependant considéré aujourd'hui comme un « film important ».

A contrario, Rois et Reine « a connu a franc succès à sa sortie, mais aujourd'hui, il est rare qu'on en parle », explique le réalisateur. Selon lui, de nombreux jeunes réalisateurs vont dans la mauvaise direction et se soucient plus de la popularité du film, que du film lui-même.

Desplechin confirme que le public français est très curieux des films étrangers, notamment des œuvres chinoises.

Il cite Jia Zhangke comme l'un de ses réalisateurs favoris et ajoute qu'il a été profondément impressionné par A Touch of Sin (2013), un drame inspiré par quatre affaires criminelles se déroulant dans la Chine contemporaine.

« C'était très violent et je pense qu'un tel reflet, direct et intense, de la société dans laquelle nous vivons aujourd'hui est nécessaire. Il devrait y en avoir une version française et une américaine. »

La violence est un sujet récurrent avec Arnaud Desplechin. Selon lui, celle de Truffaut était discrète, tandis que celle de Lars Von Trier est spectaculaire, voire extravagante. La sienne est plus une violence sentimentale.

Ses films explorent ces sentiments dans des scénarios et des genres entièrement différents, jusqu'au métaphysique La Sentinelle, dans lequel un médecin légiste trouve une tête momifiée dans sa valise.

Desplechin travaille déjà sur son prochain film et devrait débuter le tournage cet été.

« Le ton sera très différent de mes derniers films. Ce sera une comédie », explique-t-il.

L'année dernière, Desplechin a mis en suspens l'écriture du scénario après les attentats de Paris. Mais il est ensuite devenu - selon ses mots - plus enclin à la satire et, de façon surprenante, à l'humour.

« Mes réflexions sur ce qu'il se passe en Europe sont désormais celles d'un écrivain et non d'un journaliste. Je suis assez dubitatif sur toute cette idée d'identité européenne. J'ai l'impression de connaître très bien les Algériens. Je connais plutôt bien les Suédois et je connais bien les Américains. Je connais même un peu la Chine grâce au cinéma chinois, mais en même temps, je ne connais pas grand-chose de l'Autriche. »

« Pour moi, la création de l'idée d'une identité européenne est exclusive plus qu'inclusive. Par exemple, avec la crise actuelle des réfugiés, toutes ces notions d'identité, de culpabilité et de responsabilités européennes excluent les réfugiés. »

« J'aime Truffaut et Godard, parce qu'ils me font sentir que je suis français. J'aime aussi les films américains, qui me font également sentir que je suis français. Mais quelque part, je n'arrive pas à me sentir européen. »

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Source: french.china.org.cn

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