Caché derrière un rebord de fenêtre, Cering Gava observe un loup en train d'attaquer son troupeau de moutons.
L'attaque lui aura coûté un autre agneau, son sixième cette année. L'éleveur tibétain, qui vit sur le plateau d'alpage de Nagqu, à 4 700 m au-dessus du niveau de la mer, reste cependant remarquablement calme. Il n'est pas aisé pour les loups de survivre au rigoureux hiver, explique-t-il simplement, n'éprouvant apparemment pas le besoin de recourir à la traditionnelle mise à mort à coup de gourdin du carnivore pour empêcher d'autres attaques.
Gava peut se permettre d'adopter cette attitude relâchée vis-à-vis de ces prédateurs grâce au fonds d'indemnisation du gouvernement. L'efficacité de ce dernier est aujourd'hui prouvée par des chiffres récemment publiés et par le changement de mentalité des habitants locaux comme Gava.
En 2006, le gouvernement chinois, désireux de limiter l'impact de l'agriculture sur l'équilibre fragile de la chaîne alimentaire de ces régions isolées, a décidé d'adopter un mécanisme d'indemnisation pour les attaques d'animaux sauvages, réduisant ainsi la nécessité pour les éleveurs d'abattre les prédateurs.
Le Tibet fut parmi les premières provinces et régions chinoises à avoir adopté cette mesure. Cinq ans plus tard, 59,88 millions de yuans (9,4 millions de dollars) du fonds ont été utilisés pour compenser les pertes des éleveurs, selon des chiffres récents du Bureau forestier de la région.
"Le fonds gouvernemental offre des indemnités sur la base du prix du marché du bétail", explique Gava.
"La dernière fois que j'ai perdu un mouton, j'ai reçu assez d'argent pour acheter dix peaux d'agneau et du matériel pour réparer l'enclos des moutons."
Cette mesure permet à la population d'animaux sauvages de croître sur le plateau, notamment les ours bruns, les loups et les yaks, indiquent des responsables locaux de la protection des animaux. |