Les liens commerciaux sino-américains s’élargissent malgré les tensions

Alors que les relations entre les Etats-Unis et la Chine doivent encore s’apaiser après des années de tension croissante, les liens commerciaux bilatéraux se développent, avec la valeur des importations et des exportations ayant atteint l’année dernière un nouveau sommet.

La Chine a maintenu sa position en tant que troisième partenaire commercial le plus important des Etats-Unis pour les marchandises en 2022, représentant 13 % de son commerce global, derrière le Canada (14,9 %) et le Mexique (14,7 %), indiquent les données publiées mardi par le Département du commerce des Etats-Unis.

« Cet approfondissement montre que les forces économiques sont plus fortes que les discours politiques. […] L’économie des Etats-Unis est très forte et les entreprises américaines ont besoin de recevoir des produits intermédiaires et finaux par des fournisseurs fiables, qui leur proposent une haute qualité et des prix bas. Cela signifie la Chine », note Gary Hufbauer, un chercheur et spécialiste du commerce de l’Institut Peterson pour l’économie internationale basé à Washington DC.

La valeur des exportations de marchandises américaines vers la Chine a augmenté de 2,4 milliards de dollars US (2,2 milliards d’euros) en glissement annuel pour atteindre le niveau record de 153,8 milliards de dollars, avec des importations ayant augmenté de 31,8 milliards de dollars pour atteindre les 536,8 milliards de dollars l’année dernière, indiquent les données des Etats-Unis.

Selon le Département du commerce des Etats-Unis, le commerce bilatéral de marchandises entre les deux plus grandes économies mondiales a atteint les 690,6 milliards de dollars l’année dernière, dépassant un record établi en 2018. Par rapport à 2012, les exportations de marchandises américaines vers la Chine ont augmenté de 39 %, tandis que les importations américaines depuis la Chine ont enregistré une hausse de 26,6 %.

D’après l’Administration générale des douanes (AGD) de Chine, le commerce sino-américain a augmenté de 0,6 % en glissement annuel pour atteindre les 759,43 milliards de dollars en 2022. Les Etats-Unis restent le troisième plus grand partenaire commercial de la Chine après l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’Union européenne (UE).

Les exportations chinoises vers les Etats-Unis ont augmenté de 1,2 % en glissement annuel pour atteindre l’année dernière les 581,78 milliards de dollars, tandis que les importations chinoises depuis les Etats-Unis ont chuté de 1,1 % pour atteindre les 177,64 milliards de dollars.

« Malgré les divergences statistiques des deux pays, ces chiffres montrent que la relation commerciale florissante entre ces deux économies majeures est mutuellement bénéfique, créant des emplois dans les deux pays et limitant l’inflation croissante aux Etats-Unis », analyse Yang Weiyong, un professeur d’économie à l’Université de commerce international et d’économie de Beijing (UIBE).

Toutefois, Gary Hufbauer estime qu’en cas d’aggravation substantielle des tensions géopolitiques, les flux commerciaux bilatéraux pourraient plonger : « Si la situation actuelle se poursuite − à savoir sans être particulièrement amicale, mais sans devenir plus hostile − je pense que le commerce continuera de se développer », affirme-t-il.

Selon lui, les relations commerciales actuelles suggèrent que les décisions des consommateurs et des dirigeants d’entreprises ont été plus puissantes que celles des législateurs.

Washington a adopté une approche de plus en plus « pragmatique » vis-à-vis de la relation commerciale globale avec la Chine, avec des lobbyistes appelant à trouver un équilibre entre l’économie et la sécurité nationale.

Lundi, à la veille du discours annuel du président américain sur l’état de l’Union, Suzanne P. Clark, la présidente de la Chambre de commerce des Etats-Unis, a indiqué que la communauté des affaires des Etats-Unis voulait entendre dans le discours de Joe Biden une « approche équilibrée à l’égard de la Chine ».

« Notre relation commerciale avec la deuxième plus grande économie au monde représente une valeur annuelle de près de 1000 milliards de dollars et soutient des centaines de milliers d’emplois américains », a-t-elle argué.

Joe Biden a déclaré que Washington recherchait « la concurrence, pas le conflit » avec Beijing et que les Etats-Unis travailleraient avec la Chine dans les domaines où leurs intérêts sont alignés.

A la fin du mois de novembre dernier, la secrétaire au Commerce des Etats-Unis, Gina Raimondo, a indiqué que les Etats-Unis bénéficiaient grandement du commerce avec la Chine et qu’ils ne se « découpleraient pas d’elle », à part pour les technologies critiques et dans d’autres domaines dont Washington estime qu’ils pourraient « saper » sa sécurité nationale.

Beijing a affirmé de manière univoque qu’il s’opposait à l’utilisation abusive du concept de sécurité nationale, ainsi qu’à la politisation et à l’utilisation des liens économiques et commerciaux comme d’une arme.

Dans un discours prononcé en décembre dernier avant sa nomination au poste de ministre chinois des Affaires étrangères, Qin Gang, alors ambassadeur de la Chine aux Etats-Unis, avait déclaré : « Nous ne devons pas laisser la sécurité nationale se placer en travers du développement économique et de l’amélioration de la vie de la population dans nos deux pays. »