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La Chine s’emploie activement à détecter les faiblesses potentielles dans des dizaines de secteurs technologiques et à établir un vaste plan visant à couvrir les domaines exposés aux risques externes, ont indiqué lundi des responsables chinois, alors que le pays vise à stimuler encore davantage ses capacités technologiques croissantes et à déjouer la course sans merci initiée par les Etats-Unis sur les technologies fondamentales, comme les puces électroniques, les logiciels et le matériel, qui détermineront la structure mondiale du pouvoir.
Ces derniers développements en date dans les efforts plus larges de la Chine pour obtenir son indépendance technologique surviennent quelques jours seulement avant un évènement politique crucial, les « deux sessions » de l’Assemblée populaire nationale (APN, l’assemblée législative suprême) et du Comité national de la Conférence consultative et politique du peuple chinois (CCPPC, l’organe consultatif politique suprême), qui débuteront jeudi prochain et au cours desquelles les hauts législateurs et les conseillers politiques doivent discuter d’un large éventail de mesures de développement, incluant un plan quinquennal portant jusqu’à 2025, dans lequel les avancées technologiques figurent au premier plan.
Faire face à la dépendance excessive vis-à-vis de l’approvisionnement depuis l’étranger de certains composants critiques est d’ores et déjà un sujet brûlant. Les législateurs et les conseillers politiques ont fait des propositions et des suggestions visant à régler les divers aspects de cette problématique, notamment par l’augmentation des dépenses gouvernementales et de l’édification des talents, entre autres mesures de soutien. Plus de mesures détaillées et d’objectifs ambitieux devraient être dévoilés au cours des deux sessions, estiment les analystes.
Un plan ambitieux
Lundi dernier, Xiao Yaqing, le ministre de l’Industrie et des technologies de l’information (MITI), a fait savoir au cours d’une conférence de presse, que les capacités industrielles de la Chine avaient été pleinement déployées au cours de la pandémie de Covid-19, mais que le processus avait également mis au jour « certaines lacunes et faiblesses » dans les chaînes industrielle et d’approvisionnement du pays.
Afin de palier à ces problèmes, le ministère a commencé à réaliser une révision complète de 41 secteurs et à dresser une carte des chaînes industrielles clés, afin de « trouver les lacunes ainsi que nos faiblesses ». Selon le ministre, « rectifier les chaînes [industrielles et d’approvisionnement] revient à régler nos lacunes et nos faiblesses, afin de nous assurer que les chaînes ne cassent pas dans cette période cruciale ».
Alors que le développement à long terme de la Chine nécessite des percées dans les technologies fondamentales, une campagne de répression technologique croissante lancée par les Etats-Unis, avec notamment la mise en place de restrictions sur l’approvisionnement de la Chine en semi-conducteurs et autres composants cruciaux, renforce l’urgence pour la Chine de régler les goulets d’étranglement.
Signe de cette campagne de répression, l’administration des Etats-Unis prévoirait de poursuivre les interdictions imposées par la précédente administration sur les transactions technologiques avec la Chine. Par ailleurs, le président américain Joe Biden s’efforce de former des alliances technologiques avec ses alliés pour contrecarrer la Chine dans les technologies fondamentales, comme les semi-conducteurs et l’intelligence artificielle, affirme le Wall Street Journal.
Lundi, Xiao Yaqing a déclaré que la Chine se concentrerait sur des domaines comme les circuits intégrés, les logiciels de base, les nouveaux matériaux essentiels et les principaux équipements, afin de faire face à ces « goulets d’étranglement ». Ce sujet figure au sommet des agendas des deux sessions annuelles.
En-dehors de fixer les objectifs de développement socioéconomique pour cette année, les deux sessions se concentreront également sur la formulation du 14e Plan quinquennal (2021-2025) et des Objectifs à long terme à l’horizon 2035. Par le biais d’une série de réunions et de documents politiques de haut niveau, la Chine a fixé l’indépendance technologique comme une priorité majeure pour les années à venir.
Alors que le MITI a passé en revu 40 secteurs, l’attention s’est portée principalement sur les semi-conducteurs, lorsque les Etats-Unis ont décidé d’arrêter l’approvisionnement des entreprises chinoises, engendrant de graves perturbations et sonnant l’alarme pour les dirigeants et les industries de Chine.
En amont des deux sessions, les propositions et les suggestions des députés de l’APN et des membres du Comité national de la CCPPC se sont principalement concentrées sur les développements technologiques dans certains domaines, comme les puces électroniques et les semences agricoles, dont les responsables politiques estiment qu’ils dépendent de manière excessive des fournisseurs étrangers.
A la lumière des récentes pénuries en puces automobiles, Zhu Ronghua, un député de l’APN et président du constructeur automobile Chang’an, a soumis une proposition appelant à plus de mesures pour développer les puces automobiles fabriquées en Chine.
Des objectifs ambitieux
Ces propositions et suggestions pourraient engendrer des mesures concrètes et des objectifs ambitieux sont attendus pour ces deux sessions, notent les analystes.
En ce qui concerne les semi-conducteurs, la Chine importe par exemple près de 90 % de l’ensemble des puces utilisées actuellement dans le pays, pour une valeur avoisinant les 300 milliards de dollars (250 milliards d’euros). La Chine a cependant pour objectif de renverser cette tendance avec 70 % de l’approvisionnement en semi-conducteurs provenant de fabricants domestiques d’ici 2025. Le marché chinois des semi-conducteurs pourrait alors atteindre les 2000 milliards de yuans (257 milliards d’euros), contre environ 884,8 milliards de yuans en 2020, affirme Xiang Ligang, le directeur général de l’association du secteur des télécommunications Information Consumption Alliance.
Le Rapport de travail du gouvernement et le 14e Plan quinquennal contiendront probablement tous deux des mesures de soutien et des objectifs de développement spécifiques pour différents domaines, portant notamment sur les dépenses en recherche et développement technologique. La Chine s’était fixé pour objectif à long terme d’augmenter ses dépenses en R&D à 2,5 % de son PIB d’ici 2020. D’après les analystes, des objectifs similaires, voire supérieurs, pourraient être établis pour les cinq prochaines années.
En 2020, les dépenses totales de la Chine en R&D ont atteint les 2400 milliards de yuans, contre 1420 milliards en 2015, et le pays figure d’ores et déjà au deuxième rang des dépenses les plus importantes en matière de R&D, rattrapant rapidement les Etats-Unis.
« Que ce soit pour répondre à ses besoins internes ou aux risques externes, ce dont nous pouvons être sûrs, c’est qu’au cours des cinq prochaines années et au-delà, la Chine va déployer sa force nationale considérable pour accomplir son indépendance technologique et celle de sa chaîne d’approvisionnement. Je n’ai aucun doute sur le fait que nous aurons à la fin une image complètement différente de la structure de puissance technologique mondiale », assure Xiang Ligang.
Source:french.china.org.cn |