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Après son interdiction au Royaume-Uni, Huawei se prépare à changer sa stratégie à l’étranger

French.china.org.cn | Mis à jour le 16. 07. 2020 | Mots clés : Huawei

Mercredi, la Chine a vertement critiqué la décision du Royaume-Uni d’exclure Huawei du développement de la 5G au Royaume-Uni, s’engageant à prendre « toutes les mesures nécessaires » pour protéger les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises.

La profonde indignation exprimée par la Chine à l’encontre de cette mesure laisse présager une période relativement tumultueuse dans les liens sino-britanniques, avec de profondes implications géopolitiques, diplomatiques et économiques.

La forte levée de boucliers de la part des responsables politiques à Beijing s’est accompagnée d’une certaine défiance de la part de Huawei, qui risque de subir de lourdes pertes au Royaume-Uni et d’être contrainte de changer sa stratégie à l’étranger, avec entre autres des licenciements et des fermetures, car d’autres pays occidentaux pourraient suivre dans les pas du Royaume-Uni, estiment les spécialistes.

Des implications profondes

Cédant à la pression des Etats-Unis et des politiciens anti-chinois au Royaume-Uni, le gouvernement britannique a décidé mardi dernier de revenir sur sa décision précédente d’autoriser une participation limitée de Huawei dans le développement de la 5G sur son territoire, interdisant finalement aux opérateurs britanniques d’acheter des équipements Huawei à partir de décembre 2020. Il a également décidé de remplacer tous les équipements Huawei déjà en utilisation sur son territoire d’ici 2027.

« La Chine a de fortes préoccupations à ce sujet. Elle évaluera minutieusement et rigoureusement cet incident, et prendra toutes les mesures nécessaires pour préserver les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises. […] Il ne s’agit pas d’une entreprise ou d’un secteur industriel, il s’agit de la forte politisation, à tout prix, des questions commerciales et technologiques par le Royaume-Uni », a déclaré mercredi dernier la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Hua Chunying, lors d’une conférence de presse de routine.

Avec cette interdiction, le Royaume-Uni met essentiellement en place une confrontation avec la Chine, pas seulement au sujet de la technologie mais aussi au

sujet de Hong Kong. Le pays met ainsi en jeu l’avenir de ses entreprises en Chine, ainsi que son commerce plus large et sa coopération d’investissement avec son deuxième partenaire commercial non européen le plus important, expliquent les analystes.

Ceux-ci suggèrent que la Chine prenne des mesures similaires à l’encontre des entreprises britanniques qui dépendent fortement du marché chinois, comme la banque HSBC basée à Londres, qui s’est déjà attiré les foudres de nombreuses personnes en Chine du fait de son implication dans la répression menée contre Huawei aux Etats-Unis.

« Si le Royaume-Uni insiste sur la politisation des opérations commerciales d’une entreprise chinoise unique, la Chine pourrait faire de même pour défendre les droits des entreprises chinoises », note Zhao Junjie, un chercheur de l’Institut des études européennes de l’Académie des sciences sociales de Chine (ASSC).

Wei Jianguo, un ancien vice-ministre chinois du Commerce, a fait savoir mercredi dernier que les perspectives d’un potentiel accord commercial sino-britannique post-Brexit avaient été « assombries » par cette mesure. « Cette interdiction de Huawei va avoir un impact colossal sur les exportateurs et les importateurs britanniques », a-t-il également fait remarquer.

Si l’interdiction de Huawei déclenche un conflit commercial plus large entre la Chine et le Royaume-Uni, le commerce britannique pourrait chuter de 90 % dans le pire scénario ; son PIB, diminuer de 0,75 % ; et son inflation, augmenter de 0,6 % en 2020, a indiqué lundi dernier l’Institut britannique de recherche économique et social (NIESR) dans un rapport.

Même le secrétaire d’Etat britannique au Numérique Oliver Dowden, qui a annoncé cette mesure, a admis que cette interdiction pourrait retarder le déploiement complet de la 5G au Royaume-Uni de 2 à 3 ans et engendrer des coûts supplémentaires de près de 2 milliards de livres sterling (2,2 milliards d’euros).

En 2018, la Chine était le deuxième plus grand partenaire commercial du Royaume-Uni après les Etats-Unis, avec un commerce bilatéral atteignant les 68,3 milliards de livres sterling, selon les données officielles publiées par le Royaume-Uni au mois de février. En-dehors du commerce, le Royaume-Uni est un destinataire privilégié des investissements massifs de la Chine, qui possède par exemple une part majeure dans le projet à 20 milliards de livres de la centrale nucléaire d’Hinkley Point C. D’après le NIESR, les étudiants chinois contribuent par ailleurs à hauteur de 1,7 milliard de livres par an aux universités britanniques.

La défiance de Huawei

Sur le très court terme, Huawei risque de devoir ajuster sa stratégie sur les marchés étrangers et le Royaume-Uni pourrait perdre des milliers d’emplois et enregistrer un manque à gagner de plusieurs milliards de dollars en investissement. De plus, les employés de l’entreprise sur ces marchés − notamment au Royaume-Uni − pourraient potentiellement rentrer en Chine dans un futur proche.

Huawei souligne qu’elle a assuré plus de 26 200 emplois au Royaume-Uni en 2018 et contribué à hauteur de 470 millions de livres aux revenus fiscaux du Royaume-Uni. L’entreprise venait tout juste de recevoir l’approbation pour construire un centre de recherche d’un milliard de livres au Royaume-Uni.

Huawei a indiqué qu’elle passerait en revue de façon détaillée les conséquences de cette interdiction pour son activité dans le pays.

Toutefois, tout ajustement au Royaume-Uni et sur d’autres marchés étrangers menace aussi d’engendrer des pertes considérables pour l’entreprise. Le retrait potentiel de ses employés au Royaume-Uni pourrait par exemple provoquer le licenciement de près de 10 % de son personnel actuel sur le marché domestique.

Malgré les incertitudes et les risques considérables, Huawei − qui a enregistré une croissance de 13 % de ses bénéfices au premier semestre 2020, malgré des défis grandissants − a lancé un message de défiance mercredi dernier, même si celui-ci était implicite.

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Source:french.china.org.cn