Des « progrès substantiels » sont possibles dans les négociations aves les États-Unis (ministère du Commerce)

La Chine et les États-Unis s'efforceront d'obtenir des « progrès substantiels » lors du 13e cycle de consultations commerciales début octobre à Washington, ont annoncé jeudi des responsables chinois. Des analystes ont qualifié cette annonce de signal positif montrant que les deux parties étaient disposées à s'asseoir et à discuter de leurs objectifs communs après s’être retrouvées dans une impasse.

L’utilisation de ces mots, considérée par beaucoup comme un événement rare, a conduit certains analystes chinois à prédire que des progrès pourraient réellement être réalisés en octobre, avec par exemple la suppression de droits de douane ou l’achat de produits agricoles.

Selon ces analystes, il faut également retenir de cette annonce le calme et la retenue manifestés par les décideurs chinois alors que les pressions américaines étaient à leur maximum, allant de la répression contre Huawei à l’« ingérence » à Hong Kong.

La Chine ne se laissera pas guider par ses émotions et conservera son propre rythme de développement économique, ont déclaré des experts.

Le vice-Premier ministre chinois Liu He a tenu jeudi un appel téléphonique, sur invitation, avec le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin et le représentant du Commerce Robert Lighthizer. Durant cet appel, les deux parties ont convenu de tenir le 13e cycle de consultations commerciales de haut niveau entre la Chine et les États-Unis à Washington au début du mois d’octobre, a annoncé jeudi le ministère chinois du Commerce.

À la fin du mois de juillet, lors du 12e cycle de négociations commerciales tenu à Shanghai, la Chine et les États-Unis avaient décidé de poursuivre les négociations à Washington en septembre.

Ce léger retard dans le calendrier des négociations intervient après que les États-Unis ont commencé dimanche à imposer des tarifs douaniers de 15% sur 125 milliards de dollars de produits chinois, comprenant les vêtements, les chaussures, les lunettes de soleil, les appareils photo, les composants de télévision, ainsi que les morceaux de dinde et de bœuf.

Le porte-parole du ministère du Commerce, Gao Feng, a déclaré lors d'une conférence de presse jeudi que les deux délégations s'efforceraient de réaliser « des progrès substantiels » en octobre sur la base de la préparation totale des deux équipes pour les négociations. Les deux parties tiendront des consultations à la mi-septembre pour se préparer, a-t-il indiqué.

Des observateurs chinois ont noté que la mention de « progrès substantiels » était assez rare dans une déclaration officielle concernant les négociations commerciales entre la Chine et les États-Unis, ce qui fait espérer des avancées en octobre sur des questions d'intérêt commun.

« Le report des négociations pourrait résulter de la volonté des deux parties de s’assoir à la table des discussions et de permettre à leurs négociateurs d’avoir plus de temps pour se préparer », a indiqué jeudi Huo Jianguo, vice-président de la Société chinoise pour les études de l'Organisation mondiale du commerce.

Song Guoyou, directeur du Centre pour la diplomatie économique de l'université Fudan, a également noté que les deux pays devraient adopter une « attitude très sérieuse et sincère » pour résoudre les difficultés actuelles, et ceux dans le but d'empêcher l'aggravation des tensions commerciales jusqu’à un point de non-retour.

« Les États-Unis ne sont plus aussi confiants que lorsque la guerre commerciale venait de commencer », a affirmé M. Song.

Comparé à la panoplie d'outils utilisés par la Chine pour soutenir son économie, le gouvernement américain a davantage besoin de conclure un accord, car l'économie et le marché boursier des États-Unis ont été les plus durement touchés, a déclaré M. Huo.

« À l'approche de la prochaine élection présidentielle, le président américain Donald Trump lui-même cherche désespérément à obtenir davantage de votes », a expliqué M. Huo. « L'option la plus efficace pour lui est de conclure un accord avec la Chine afin de stabiliser l'économie américaine ».

L'indice des directeurs d'achats (PMI, pour Purchasing Managers' Index) dans le secteur manufacturier aux États-Unis s'est contracté à 49,1 en août, soit son plus bas niveau depuis plus de trois ans. La courbe de rendement du Trésor américain s’est également inversée, ce qui est un des indicateurs les plus cohérents d'une récession économique.

M. Song a prédit que lors des négociations d'octobre, la Chine pourrait accepter d'acheter davantage de produits agricoles. En contrepartie, les États-Unis pourraient aussi « appuyer sur pause » concernant leur imposition de droits de douane supplémentaires en décembre sur les produits chinois.

Les États-Unis prévoient en effet d’imposer le 15 décembre de nouveaux droits de douane sur les 175 milliards de dollars d’importations restants de la Chine.

Des incertitudes à venir

Cependant, des analystes ont noté que les tactiques agressives et les nombreuses volte-face de Washington jetaient une ombre sur les perspectives d'un accord.

« Il est encore difficile de savoir si les États-Unis vont de nouveau jouer au jeu de la confrontation pour ruiner les fruits obtenus par les deux parties lors des négociations », a indiqué M. Song.

Les autorités chinoises ont déclaré que tout accord commercial devait inclure la suppression de tous les droits de douane imposés par les États-Unis sur les importations chinoises pendant la guerre commerciale.

M. Trump s'en est pris aux politiques commerciales et économiques de la Chine. Il a tweeté mardi en affirmant que lorsque les États-Unis gagneraient la guerre commerciale, « l'accord deviendrait beaucoup plus strict, la chaîne d'approvisionnement de la Chine s'effondrerait et les entreprises, les emplois et l'argent disparaîtraient ».

Mei Xinyu, un expert proche du ministère chinois du Commerce, a déclaré jeudi que les États-Unis devaient réaliser qu'ils ne peuvent pas pousser la Chine à conclure un accord commercial, sans quoi cela pourrait causer « de violentes mesures de représailles » de la part du gouvernement chinois.

« Autant que je sache, les décideurs chinois ont encore de nombreux outils financiers à leur disposition pour riposter contre les États-Unis, et ils ont jusqu'à présent fait preuve de beaucoup de retenue dans leur réponse à l'agression américaine », a affirmé M. Mei.

Les représentants du gouvernement chinois ont fait preuve d'un calme extrême dans les négociations commerciales sous la pression maximale des États-Unis, a-t-il ajouté.

« Les décideurs chinois sont lucides. Ils se sont préparés à de longues négociations pendant la guerre commerciale et ne visent pas une résolution rapide avec les États-Unis. Au lieu de cela, ils se préparent plutôt en donnant la priorité à la croissance économique de la Chine ».