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La coopération économique et commerciale sino-française : entre opportunités et défis

French.china.org.cn | Mis à jour le 22. 03. 2019 | Mots clés : Macron,coopération économique

Le 23 février 2017, des spécialistes français qui participent à un projet de coopération avec la Chine au laboratoire P4 de Wuhan (province du Hubei)

YAO LING*

En 2018, les présidents chinois et français se sont rencontrés en deux occasions: une fois au début de l’année, dans le cadre de la visite de M. Macron en Chine; et une seconde fois à la fin de l’année, lors du Sommet du G20 organisé en Argentine. Lors de leurs entrevues, les deux chefs d’État sont parvenus à des consensus sur d’importantes questions, créant ainsi un environnement propice au développement des relations économiques et commerciales sino-françaises dans la nouvelle période.

Depuis 55 ans de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France, les relations sino-françaises, si particulières, jouent le rôle d’appui et de moteur de la coopération économique et commerciale entre la Chine et l’UE. Et la nouvelle ère qui s’ouvre devrait apporter à la Chine et la France de nombreuses opportunités de développer encore leur coopération dans les dimensions économique et commerciale.

Développement des échanges bilatéraux

La France est actuellement le quatrième partenaire commercial de la Chine au sein de l’UE. Selon les statistiques révélées par les douanes chinoises, le volume des échanges commerciaux entre la Chine et la France a atteint 62,9 milliards de dollars en 2018, soit 34,2 % de la valeur du commerce sino-allemand, 73,8 % de la valeur du commerce sino-hollandais et 78,2 % de la valeur du commerce sino-britannique. Mais si l’on considère le poids économique des deux pays, les échanges commerciaux entre la Chine et la France peuvent encore progresser. En 2018, la valeur cumulée de ceux-ci a augmenté de 15,5 % en glissement annuel, enregistrant pour la seconde année consécutive une hausse supérieure à 15 %. Parmi les échanges commerciaux entre la Chine et ses trois principaux partenaires au sein de l’UE, ce sont les échanges sino-français qui ont connu l’essor le plus rapide.

À l’heure de l’élargissement de l’ouverture du marché chinois, la Chine et la France affermissent leur coopération à plusieurs égards. Elles renforcent leur collaboration en matière d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières et de mise en quarantaine, à dessein d’accroître le nombre des exportations françaises (produits à base de viande, produits laitiers, préparations pour nourrissons, etc.) vers la Chine. Elles accélèrent leurs négociations en vue de la conclusion d’un accord Chine-UE relatif aux produits protégés par une indication géographique, afin de promouvoir les échanges bilatéraux de denrées agricoles entre les deux parties. Elles intensifient leurs échanges commerciaux dans l’industrie aérospatiale. Elles promeuvent vigoureusement la construction de plates-formes d’e-commerce transfrontalier, qui deviendra un nouveau pôle de croissance dans le commerce sino-français.

Progression soutenue de l’investissement réciproque

Les investissements directs à l’étranger (IDE) émis par l’UE que la Chine exploite proviennent principalement de la France. À la fin de 2017, le montant réel émis par les investisseurs français en Chine se chiffrait à un total de 16,52 milliards de dollars, la France se classant 4e au sein de l’UE à cet égard. Dans le même temps, le territoire français est une destination toujours plus attractive pour les entreprises chinoises souhaitant investir dans la zone UE. Fin 2017, les IDE chinois en France totalisaient 5,7 milliards de dollars, la France devenant le sixième pays d’accueil des investissements chinois au sein de l’UE. Selon le Rapport sur l’internationalisation de l’économie française publié par l’agence Business France, cette même année, la part des capitaux chinois dans les projets d’investissement étrangers réalisés en France s’élevait à 5 %, la Chine devenant ainsi, au coude à coude avec le Japon, le pays asiatique comptabilisant le plus grand nombre de projets d’investissement en France.

En matière d’investissement, la Chine et la France poursuivront leur coopération étroite dans les domaines traditionnels, c’est-à-dire le nucléaire, l’aéronautique et l’aérospatiale, tout en développant les projets d’investissement dans les chaînes industrielles. Elles envisagent, par exemple, d’exploiter ensemble l’industrie nucléaire sur les marchés tiers, de travailler de concert sur la R&D du nouveau modèle Airbus et de consolider les services de développement, fabrication et lancement de satellites. En outre, compte tenu du fort potentiel de la France à innover, auquel s’ajoutent les avantages traditionnels et les technologies de pointe dont elle dispose dans son secteur industriel, de nouvelles opportunités devraient s’ouvrir pour l’investissement sino-français, notamment dans l’intelligence artificielle, la conception technique, la construction automobile et la fabrication d’autres types de véhicules. Par ailleurs, la France se positionne, toujours plus assurément, comme le centre d’affaires européen, ce qui invite les firmes chinoises à investir dans le secteur des services financiers en France et à y établir leur siège régional. De plus, l’« économie des séniors », y compris les services aux retraités, constituera également un domaine clé de la coopération à venir entre les deux pays.

Effet « boule de neige »

La France a répondu positivement à l’initiative « la Ceinture et la Route » et annoncé sa décision d’y prendre part. C’est aussi le premier pays européen à avoir convenu d’explorer les marchés tiers de concert avec la Chine. En juin 2015, les deux pays ont publié la Déclaration conjointe sur les partenariats sino-français en marchés tiers, qui stipule clairement les principes généraux et les domaines de coopération entre les deux parties dans ces pays tiers. Le projet nucléaire de Hinkley Point C, au Royaume-Uni, est devenu l’exemple typique de cette nouvelle forme de coopération sino-française. En novembre2018, les deux parties ont signé la liste d’une première série de projets pilotes dans lesquels la Chine et la France prévoient de travailler main dans la main dans des pays tiers, projets dont la plupart devraient aboutir prochainement en Afrique. Cette illustration de coopération en marchés tiers provoquera certainement un effet « boule de neige » et fera des émules dans les relations entre la Chine et d’autres pays européens comme les Pays-Bas, la Belgique et l’Espagne.

Au niveau multilatéral, grands pays défenseurs de l’Accord de Paris sur le climat ratifié en 2015, la Chine et la France participent activement à la lutte contre le changement climatique. À l’avenir, la mise en œuvre intégrale de cet accord et la formulation d’un cadre pour la conservation de la biodiversité passeront nécessairement par une nouvelle coordination sino-française. Au niveau bilatéral, l’Année sino-française de l’environnement lancée en novembre2018 marquera un tournant. La coopération bilatérale dans le domaine de l’environnement, se bornant aujourd’hui aux énergies propres, à la fabrication verte et à l’alimentation bio, s’étendra à des secteurs exigeant davantage de capacités, tels que la surveillance de l’état des écosystèmes marins à l’échelle mondiale, la prévention des catastrophes et l’atténuation de leur impact ainsi que d’autres domaines. Attendons-nous donc à ce que la coopération sino-française dans la sphère de l’environnement joue un rôle de premier plan.

Réponses adéquates aux risques et défis

À court terme, de nombreuses difficultés (ralentissement généralisé de la croissance dans la zone euro, tensions commerciales entre certains pays et troubles internes au sein de l’UE) risquent de pénaliser le développement économique et commercial de la Chine et de la France. C’est pourquoi ces deux pays, qui affichent un grand potentiel de coopération au niveau économique et commercial, doivent travailler ensemble pour apporter des réponses adéquates à ces défis.

Premièrement, la Chine et la France doivent continuer à approfondir leur coopération bilatérale dans le commerce et l’investissement, afin de consolider leur partenariat stratégique économique global de longue date. Il leur faut promouvoir activement la libéralisation et la facilitation des échanges et des investissements. À cet égard, les consensus importants auxquels sont parvenus les dirigeants des deux pays sur les divers sujets économiques et commerciaux détermineront l’orientation à suivre et l’initiative « la Ceinture et la Route » fera office de trait d’union. Plus précisément, elles ont lieu de faire avancer les négociations pour la signature d’un accord d’investissement Chine-UE et d’examiner conjointement les possibilités d’un accord de libre-échange Chine-UE, dans l’objectif d’instaurer un climat d’affaires et d’investissement propice à la coopération approfondie entre les entreprises des deux pays. De plus, il convient d’encourager les firmes françaises à participer au nouveau programme d’ouverture de la Chine. Il est aussi nécessaire qu’elles élèvent continuellement leur degré de coopération à travers l’exploration commune des marchés tiers, afin de conforter la collaboration dans les domaines traditionnels et de l’étendre à de nouveaux.

Deuxièmement, la Chine et la France doivent renforcer leur coopération dans les instances multilatérales comme l’OMC et le G20, en réponse au risque de ralentissement de la croissance économique mondiale. Actuellement, en raison des prétentions unilatéralistes et protectionnistes, la situation du commerce international est compliquée, avec un climat tendu et un avenir incertain. Les barrières tarifaires dressées par certains pays dans un élan unilatéraliste et protectionniste auront pour conséquence de faire grimper les tarifs des biens de consommation. D’autres pays craignent une guerre commerciale et des représailles, ce qui entrave également le foisonnement du commerce et de l’investissement. Ces faits risquent de bouleverser toute l’économie mondiale, en perturbant les chaînes d’approvisionnement et en affectant les marchés financiers. Et les diverses coopérations économiques et commerciales bilatérales, notamment la coopération sino-française, ne seront pas épargnées. Il est donc urgent que la Chine et la France renforcent leur collaboration sur la question de la réforme de l’OMC, afin de défendre le bien-fondé du système commercial multilatéral et d’en maintenir l’efficacité. Entre-temps, les deux pays doivent, en recourant au mécanisme du G20, affermir la coordination des diverses politiques macroéconomiques bilatérales et multilatérales, faire avancer la gouvernance économique globale et porter la croissance mondiale.

Troisièmement, la Chine et la France doivent multiplier les échanges et la communication, renforcer la confiance mutuelle, dissiper la méfiance et les incompréhensions, notamment les préjugés de l’UE sur la Chine. Dernièrement, le Brexit, la montée du populisme et la crise des réfugiés ont eu un impact dans les sphères politique, sociale et économique de l’Europe. Dans ce contexte, des élites politiques ainsi que des organisations industrielles et commerciales dans certains pays de l’UE ont adopté une position conservatrice contraire au libre-échange, déversant même leur colère sur la concurrence des entreprises chinoises. De par cette méfiance, un certain nombre d’initiatives ont été proposées, par des pays membres de l’UE ou par l’UE elle-même, en vue de freiner le commerce et les investissements chinois. Mais en réalité, tout comme la forte demande du marché chinois a aidé l’UE à sortir de la crise financière mondiale et à relancer l’économie après 2008, la coopération économique et commerciale sino-européenne est au fond bénéfique pour les deux parties et donc conforme à leurs intérêts. La France est un membre fondateur de l’UE. À ce titre, elle peut jouer un rôle actif dans le progrès de la compréhension mutuelle et l’apaisement des contradictions entre la Chine et l’UE.

*YAO LING est directrice adjointe de l’Institut de l’Europe de l’Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique relevant du ministère du Commerce.

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Source:La Chine au Présent