Tout comme en France, on peut
désormais apercevoir dans les rues de Beijing une affiche
publicitaire des Galeries Lafayette représentant une femme coiffée
d'une petite tour Eiffel.
Après deux années de préparation,
le premier magasin en Chine du groupe des Galeries Lafayette
ouvrira ses portes en septembre à Xidan, l'un des quartiers
commerciaux les plus populaires de Beijing. Seize ans après une
première tentative, les Galeries Lafayette font leur grand retour
en Chine. Le groupe affiche sa confiance dans ce projet, mais reste
toutefois prudent.
"Beijing est devenu un marché de la
mode plus mature. Plusieurs segments de clientèle ont émergé ou se
sont développés ces dernières années", a déclaré Laurent Chemla,
PDG des Galeries Lafayette Beijing, ajoutant que "grâce à son
emplacement avantageux, le projet de Beijing sera une plate-forme
idéale pour répondre à la demande non satisfaite des clients
chinois jeunes et branchés pour des collections nouvelles et
uniques et davantage d'expériences innovantes". Le groupe estime
que de ce point de vue, l'offre a encore un certain retard à
rattraper.
Le groupe des Galeries Lafayette,
créé en 1893, compte actuellement plus de 60 magasins en France, en
Allemagne, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Le magasin de
Xidan, qui s'étend sur six étages et dispose d'une superficie
totale de 48.000 mètres carrés, est le magasin phare des Galeries
Lafayette en Chine.
Malgré une première tentative
manquée en 1997, due selon M. Chemla, au fait que le marché chinois
venait juste de s'ouvrir aux marques étrangères et que la clientèle
potentielle était encore très limitée, le groupe est aujourd'hui
prêt à reprendre pied en Chine. Pour se faire, il a mis toutes les
chances de son côté en décidant d'ouvrir son siège au coeur du
quartier commercial de Xidan et de créer une co-entreprise avec son
partenaire hongkongais I.T Ltd., un groupe de mode bien ancré sur
le marché chinois, afin de bénéficier de l'expertise de ce dernier
dans le secteur de la mode en Chine.
"Pour l'instant, il n'y a pas de
magasin haut de gamme à Xidan, et les Galeries Lafayette comblent
justement ce vide", estime Fan Yanru, vice-secrétaire de
l'Association chinoise des chaînes de magasins et des
franchises.
D'après Du Yanhong, chercheur sur
le commerce de détail au Centre de recherche sur l'industrie CIC,
les Galeries Lafayette entrent sur le marché chinois au bon moment,
car l'économie chinoise se développe rapidement et le pays est
devenu un important consommateur de produits de luxe. Le marché
chinois pourrait ainsi compenser la faiblesse actuelle du marché
européen durement affecté par la crise de la dette.
Cependant, les "nouveaux venus" à
Beijing sont confrontés aux vicissitudes du marché chinois. Depuis
2011, plusieurs grands magasins ont fermé leurs portes à Beijing et
Shanghai. Des rapports publiés en janvier par plusieurs sociétés
boursières montrent que, en raison de l'augmentation du loyer et
des salaires ainsi que des inconvénients du système de concession
commerciale, le développement du commerce de marchandises générales
ralentit et que la reprise se fait attendre.
"Il est impossible que le commerce
de marchandises générales chinois maintienne indéfiniment une
croissance à deux chiffres. Il est déjà remarquable que ce secteur
affiche une croissance de 3 à 5%. C'est pourquoi, malgré le
ralentissement, le secteur continue d'attirer les investisseurs
étrangers", a déclaré Mme Fan.
Cependant, le commerce électronique
qui se développe rapidement empiète sur les plates-bandes du
commerce de détail traditionnel. Selon un rapport publié en janvier
par l'Association du commerce de Chine (ACC), le chiffre d'affaires
des ventes en ligne a dépassé 1.000 milliards de yuans,
représentant plus de 5% du total des ventes au détail des produits
de consommation dans le pays.
Cependant, d'après Du Yanhong, le
commerce électronique chinois, qui n'est pas encore assez
réglementé, ne devrait pas affecter les performances du magasin des
Galeries Lafayette à Beijing, car l'enseigne, qui propose
principalement des produits haut de gamme et de luxe, ne cible pas
la même clientèle que les boutiques en ligne.
Le groupe a néanmoins déjà lancé un
site d'e-commerce en France, mais on ignore pour le moment s'il a
l'intention d'en ouvrir un en Chine.
Face à la situation actuelle du
secteur chinois, le PDG a fait savoir que des hauts et des bas
devaient être anticipés selon les différentes phases de
développement du marché. Toutefois, le "récent ralentissement du
marché pourrait accélérer les changements qui ont actuellement
cours dans le commerce de détail en Chine", a-t-il ajouté.
La vice-secrétaire a estimé que la
clé du développement durable des Galeries Lafayette était de
trouver un bon positionnement sur le marché et de proposer un
service différent tout en ayant une compréhension approfondie des
désirs de la clientèle chinoise. M. Chemla et son équipe
travaillent effectivement sur l'idée d'"être différent", qui se
reflète tout d'abord dans l'objectif de l'enseigne qui est de
proposer des marques et des produits spéciaux et uniques dont
beaucoup ne sont disponibles que dans les magasins des Galeries
Lafayette.
"L'objectif initial de notre projet
est de développer un nouveau type de magasin en Chine", a-t-il
souligné.
Le groupe français, qui s'attache
toujours à soutenir les jeunes créateurs, dédiera un étage de son
magasin de Beijing aux marques de couturiers contemporains, où une
zone spéciale baptisée "China Labo" sera consacrée aux produits de
créateurs chinois.
Laurent Chemla a également fait
savoir que le groupe évaluait actuellement les opportunités
d'ouvrir davantage de magasins dans d'autres villes chinoises au
cours des cinq prochaines années. Toutefois, Mme Fan estime que
compte tenu des performances des grands magasins étrangers en
Chine, il était encore trop tôt pour se prononcer sur la viabilité
de ces projets.
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