De nombreux Chinois aiment les produits étrangers, et en particulier les marques connues. Les plus riches vont à Paris, à New York et à Hong Kong pour y acheter des produits allant des sacs aux bijoux et au lait en poudre.
Certaines critiques font valoir que cette croyance qui veut que l'herbe soit toujours plus verte ailleurs reflète une perte de l'estime de soi, résultat des humiliations répétées infligées à la Chine par les puissances occidentales depuis la 1re Guerre de l'Opium.
D'autres attribuent cette vénération aveugle pour tout ce qui est étranger au souvenir de la pauvreté matérielle du marché intérieur et à l'expérience limitée des entreprises chinoises en termes de marketing moderne à la suite des trois décennies d'isolement du pays du monde extérieur avant le lancement de la politique de réforme et d'ouverture à la fin des années 1970.
Cet amour pour les produits étrangers a atteint un tel niveau que certaines marques chinoises ont même adopté un nom étranger pour attirer les clients. Ainsi, dans une affaire récente de fraude commerciale, Da Vinci, une marque de meubles de haut de gamme apparemment « italienne » s'est avérée en fait avoir son siège dans la Province du Guangdong. L'entreprise exportait ses produits vers l'Italie, puis les ré-importait en Chine.
Cela a l'air absurde, et pourtant... un grand nombre de Chinois tombent dans ce genre de panneau, ce qui peut expliquer en partie pourquoi de si nombreuses marques chinoises ont adopté un nom étranger. A l'heure actuelle, près de 80% des vètements chinois portent un nom à consonnance étrangère, afin d'exploiter cette étrange psychologie.
Pourtant, les consommateurs insistent pour dire qu'ils achètent des produits étrangers parce qu'ils leur font confiance. C'est particulièrement vrai des produits alimentaires, à la suite de toute une série de scandales liés à la sécurité alimentaire en Chine ces dernières années, comme les formules infantiles contaminées à la mélamine, le clenbuterol dans la nourriture pour animaux, qui rend la viande plus maigre, et l'huile de cuisine recyclée pour être réutilisée dans les restaurants.
Pourtant, une série de scandales récents concernant des multinationales étrangères pourraient avoir le potentiel de changer l'attitude des Chinois envers les marques étrangères. Ces histoires négatives nous donnent une image bien éloignée de ce que le public perçoit, et les marques étrangères qui habitudellement évoquaient une image positive deviennent à présent un objet de méfiance pour des clients qui doutent.
Les gens ont ainsi réagi avec incrédulité quand ils ont appris que les magasins Walmart de Chongqing utilisaient des étiquettes trompeuses pour du porc soit-disant bio et vendaient des produits alimentaires de qualité inférieure, cela même après avoir été frappés à plusieurs reprises d'amendes pour faute. Ils ont eu du mal à faire le lien entre les iPad et les iPhone, tellement à la mode, et les déchets polluants et autres métaux toxiques qui sont déversés non loin des quartiers résidentiels lors de leur fabrication. Leur estomac s'est retourné quand ils ont appris que le délicieux bouillon de porc servi dans la chaîne de restaurants de nouilles japonaises Aijisen Ramen était en fait préparé à base d'assaisonnement instantané. Et la liste des scandales ne s'est pas arrêtée là : on y retrouve aussi le producteur de produits laitiers Nestlé, les géants de la restauration rapide KFC et McDonald's, aussi bien que des marques de vêtements comme Zara et Gucci –pour ne donner que quelques noms- qui tous ont commis des actes délictueux, allant de la tromperie envers les consommateurs avec un service médiocre et des produits ne valant guère mieux à la violation du droit du travail chinois.
Que les marques étrangères ne soient pas nécessairement une garantie de bon service et de bonne qualité a été un véritable choc culturel. Les consommateurs chinois se rendent compte du fait que, dans leur poursuite du profit, les multinationales étrangères peuvent aussi se comporter de façon peu conforme à l'éthique. Pour la première fois depuis de nombreuses années, les consomamteurs chinois ont l'occasion de voir une autre face des marques étrangères et de réfléchir à leur longue dévotion envers elles.
Certaines marques étrangères soutiennent que les scandales ont été amplifiés au delà du raisonnable. Après tout, du porc vendu comme bio alors qu'il ne remplit pas les critères bio n'est pas pour autant potentiellement mortel, à la différence de l'affaire du lait pour bébé contaminé à la mélamine. Qui plus est, c'est à cause des nombreuses lacunes dans l'application de la loi en Chine, dans le droit du travail et les critères environnementaux que ces multinationales ont changé certaines des pratiques qu'elles sont tenues de respecter chez elles.
Mais si elles persistent dans cette mentalité de traiter les consommateurs chinois comme des consommateurs de seconde classe, non seulement elles portent elles-même atteinte à leur moralité, mais encore elles risquent de perdre à terme leur avantage sur le marché, car les consommateurs chinois finiront par ne plus avoir confiance en elles. |