Les leaders des principaux partis
politiques de l'opposition et autres acteurs de la société civile
protestent contre l'organisation des élections sénatoriales avant
les législatives et les municipales, et appellent déjà au boycott
et à des manifestations populaires.
La première réaction est venue de
Ni John Fru Ndi, président du Social Democratic Front (SDF), le
parti leader de l'opposition camerounaise, une heure après la
lecture à la radio nationale du décret présidentiel signé le 27
février convoquant les premières élections sénatoriales de
l'histoire du Cameroun pour le 14 avril.
« Biya doit respecter le processus
des sénatoriales. Ce qu'il vient de faire est une mascarade. Les
conseillers municipaux actuels ont été mal élus, avec des fraudes
enregistrées dans plusieurs circonscriptions. Ce qui entache leur
légitimité », a-t- il indiqué à la presse conviée à sa résidence de
Yaoundé.
La démarche du leader du SDF
s'appuie sur le fait que le mandatde 5 ans des 10636 conseillers
municipaux, qui constituent le corps électoral en l'absence des
conseillers régionaux, est échu depuis juillet 2012. Pour rester en
fonction, le président de la République a pris un décret prorogeant
leur mandat jusqu'au 30 juillet 2013.
Pour la classe politique, ce sont
donc des conseillers municipaux illégitimes qui vont mettre sur
pied un Sénat tout aussi illégitime. Surtout que, pour le Cameroun
qui compte plus de 300 partis politiques, ces sénatoriales ne vont
concerner que six formations politiques.
Il s'agit du RDPC au pouvoir qui,
au terme des élections municipales de 2007, a remporté la quasi
majorité des 10636 conseilleurs municipaux, et contrôle ainsi 336
communes sur les 360 que compte le Cameroun.
Le SDF qui contrôle près de 20
conseils municipaux a des chances de remporter des sièges de
sénateurs dans la mesure où il contrôle près de 20 conseils
municipaux, au contraire de l'UDC, l'UPC, l'UNDP et le MDR qui se
partagent les autres conseillers municipaux.
D'ores et déjà, l'opposition
envisage un boycott des sénatoriales. « Si tout ne dépendait que de
moi, aucun parti de l'opposition ne devrait prendre part à cette
mascarade », a préconisé Albert Dzongang, président de La
Dynamique.
Le SDF ne se contente pas
d'envisager le boycott des sénatoriales. « Si le parti au pouvoir
persiste dans cette voie, mes militants et moi-même n'hésiteront
pas (..) à descendre dans les rues pour le combattre», a menacé Ni
John Fru Ndi au cours de son échange mercredi avec la presse.
Face aux critiques nourries de la
classe politique, Mathias Eric Owona Nguini, politologue et
enseignant à l'université de Yaoundé II-Soa, pense que les
sénateurs élus le 14 avril ne seront pas crédibles.
Le chercheur poursuit : « Cela
montre en tout cas que le président Biya tient à maintenir un
contrôle ferme sur le Sénat qu'il peut utiliser pour assurer sa
pérennisation au pouvoir après 2018 » qui marque la fin de son
mandat actuel. F
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