En Chine, les villes et les
campagnes sont deux univers tout à fait différents.
En 2003, le revenu par habitant
était en moyenne de 2 622 yuans dans les campagnes, et de 8 500
yuans dans les villes, soit un rapport de 1 : 3,24.
Mais compte tenu qu'environ 40 % des
revenus sont en nature et que 20 % sont utilisés pour l'achat
d'engrais chimiques et d'autres moyens de production, la somme
disponible par un fermier ne dépasse pas 1 000 yuans par an. Les
citadins, eux, n'ont pas de dépenses de production, et ils
bénéficient en plus de plusieurs subventions, de soins médicaux et
d'assurance chômage, par exemple.
Toujours en 2003, Wang Shaoguang, Hu
Angang et Ding Yuanzhu ont conjointement sonné l'alerte par leur
rapport intitulé « L'instabilité sociale derrière la prospérité
économique ». La prospérité économique ne conduit pas forcément ou
automatiquement à la stabilité sociale. En retraçant l'histoire
chinoise, on voit qu'une crise sociale grave avait souvent lieu
dans une période de prospérité économique. L'expérience de nombreux
pays développés montre que la croissance économique inégale et
injuste peut s'arrêter soudain, décliner ou même s'effondrer pour
cause de crise sociale.
Selon le rapport, la Chine actuelle
se trouve dans une nouvelle période d'instabilité sociale. Les
hommes au pouvoir devraient mener une politique humaine, savoir
écouter les conseils du peuple et dissiper ses plaintes.
La Chine est un pays agricole. Parmi
ses 1,3 milliard d'habitants, 900 millions sont fermiers. Les
problèmes liés à l'agriculture, aux régions rurales et aux fermiers
entravent déjà le développement continu de l'économie chinoise. Et
la lenteur de croissance des revenus des paysans est le problème le
plus ennuyeux. Sans l'enrichissement des fermiers, la Chine ne
saurait devenir riche.
Le premier ministre Wen Jiabao dans
un compte rendu aux autorités centrales sur la situation économique
a dit : « Si l'on me demande ma plus grande difficulté, je
répondrai toujours les problèmes de l'agriculture, des régions
rurales et des fermiers. Ces problèmes concernent non seulement la
hausse des revenus des fermiers, l'élargissement des besoins du
marché, mais aussi la garantie des approvisionnements et la
stabilité de la société ».
La réforme chinoise de 1978 s'est
entamée par les campagnes. Les premiers résultats ont apporté des
avantages réels aux fermiers. Mais depuis 1997, il est difficile
d'augmenter leurs revenus, qui ont poursuivi une faible ascension.
Entre 1997 et 2003, la croissance de leurs revenus nets n'a pas
dépassé 5 %, avec la croissance la plus forte de 4,8 % et la plus
faible, de 2,1 % seulement, soit une moyenne annuelle de 4 %,
seulement la moitié de l'augmentation des revenus des citadins.
L'écart de revenus entre les ruraux
et les citadins se creuse. En 1997, le ratio était de 1 : 2,47 (2
090 contre 5 160 yuans), alors qu'en 2003, il s'est élargi à 1 :
3,24.
La hausse des revenus des familles
vivant de la culture céréalière est plus difficile. La chute des
prix des produits agricoles, qui surpassent la demande du marché,
est à l'origine de la réduction des revenus agricoles des fermiers.
En 1997, le revenu net par fermier découlant de l'agriculture a été
de 1 268 yuans, mais depuis 1998, le gain a toujours été inférieur
à ce niveau.
Le revenu des fermiers concerne
directement la production agricole. La réduction des recettes
issues de l'activité agricole porte naturellement atteinte au
dynamisme des fermiers.
Wang Zailin, fermier du district de
Lintao, au Gansu, a dû chercher un emploi en ville. « La culture de
la terre nous offre juste de quoi manger. Les frais d'études de mes
deux enfants, l'achat d'engrais chimiques et d'articles courants,
tout demande de l'argent. Comment faire si je ne travaille pas en
ville ? »
Wang gagne un peu plus de 2 000
yuans par an en ville. Même avec l'aide de son frère aîné qui
travaille à Urumqi, la famille de Wang n'a pas suffisamment
d'argent liquide. Son fils est en dernière année du secondaire. Ses
frais d'études, de manuels, de nourriture et de logement montent à
1 800 yuans par an. Sa fille, en 3e année du secondaire premier
cycle, a besoin de 600 yuans par an. Avec les frais médicaux des
parents âgés de Wang, les investissements agricoles et les dépenses
courantes, il faut au moins 5 000 à 6 000 yuans par an. Wang
emprunte souvent de petites sommes à des proches et voisins. La
dette familiale atteint actuellement 8 000 yuans.
Dans son village, dit Wang, la
plupart des hommes de 18 à 50 ans sont partis travailler en ville.
Ce qu'ils gagnent constitue la principale source financière de leur
famille.
En effet, c'est le cas de nombreuses
familles rurales. Entre 2000 et 2002, 47,8 % de la hausse des
recettes provenait du travail à l'extérieur.
Depuis 2000, la production
céréalière a continué de baisser en Chine, de même que la
superficie ensemencée ; en 2002, seulement 100 millions d'ha, soit
une réduction de 15 millions d'ha par rapport à 1998.
Dans les conditions actuelles
d'économie de marché, on ne peut plus obliger les fermiers à
cultiver des céréales par ordre administratif. Donc, pour mobiliser
leur dynamisme, il faut que l'activité leur permette de gagner
assez d'argent. Même pour augmenter la productivité céréalière et
assurer un ravitaillement stable, on doit régler le problème de
hausse de revenus des fermiers.
Le 8 février, le comité central du
PCC a rendu public le document no 1 de l'année, dans lequel il a
accentué l'importance de majorer les revenus des fermiers.
Lin Hejie, fermier de Jinjiang, dans
la province du Fujian, a loué 71 ha de champs. En 1997, il a vendu
le plus de céréales dans la province. « Enfin, les 900 millions de
fermiers ont de l'espoir », dit-il. Apprenant que le gouvernement
accorderait des subventions à la vente de céréales et à l'achat de
grandes machines agricoles, malgré la trentaine de machines qu'il
possède, Lin veut en acheter d'autres et prendre en charge
davantage de champs.
Pei Lianggeng, 53 ans, a rendu les
champs qu'il avait pris à forfait. « Les politiques que le PCC
applique maintenant sont plus favorables aux fermiers,
constate-t-il. La situation où beaucoup de fermiers ne voulaient
pas cultiver la terre, qui a régné dans notre village pendant bien
des années, a changé. Si j'ai encore l'occasion de me faire
attribuer des champs, je ferai un bon travail, comme dans le passé
! »
Le document no 1 formule l'idée
d'accroître les revenus des fermiers, notamment dans les régions
productrices de céréales et les régions pauvres.
Le document prescrit aussi les
mesures à prendre pour élargir le marché des produits agricoles,
augmenter l'investissement dans l'agriculture et les régions
rurales, et approfondir la réforme rurale.
Fixer la hausse des revenus des
fermiers comme objectif fondamental du travail rural reflète un
changement d'esprit du gouvernement.
D'abord, cet objectif représente la
détermination du gouvernement de travailler pour le compte du
peuple. Les fonctions fondamentales de l'agriculture consistent à
approvisionner la société en aliments. Mais pour que l'agriculture
joue bien son rôle, on doit avant tout garantir les intérêts
économiques des agriculteurs. La production agricole ne peut se
développer de façon continue que quand les revenus des fermiers
augmentent constamment et que leur niveau de vie s'améliore sans
cesse. La réunion du Comité central du PCC sur les travaux ruraux a
mis l'accent sur l'encouragement de la production céréalière, mais
le document no 1 n'a point imposé aux fermiers à s'y lancer, mais
prescrit une série de mesures autour de la hausse des revenus des
fermiers dans les principales régions productrices de céréales. Ces
mesures font preuve du respect des intérêts économiques et de
l'autonomie des fermiers dans l'exploitation.
Ensuite, il témoigne d'un concept
correct du travail des autorités centrales. Les véritables
performances de travail ne se traduisent pas par un taux de
croissance économique élevé, ni par le nombre de projets réalisés,
mais par l'amélioration constante du niveau de vie des fermiers qui
représentent la majorité de la population nationale. C'est aussi un
point clé de la modernisation du pays.
China.org.cn 2004/03/01
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