La présidente de la BCE avertit que les hausses des droits de douane américains alimentent une situation perdant-perdant, appelant au dialogue et à la coopération (INTERVIEW)
La présidente de la Banque centrale européenne (BCE) Christine Lagarde a lancé un avertissement sérieux contre la montée du protectionnisme commercial, affirmant que les récentes mesures des droits de douane américaine créent de l'incertitude, compromettent la confiance et l'investissement, et posent des risques pour la croissance mondiale.
Dans un récent entretien accordé à Xinhua, Mme Lagarde a décrit la tendance actuelle à la fragmentation économique comme une situation "perdant-perdant", appelant à l'adhésion aux règles multilatérales et à un dialogue soutenu pour sauvegarder l'économie mondiale interconnectée.
"Le niveau d'incertitude provoqué par les annonces ou les menaces de décisions freine l'investissement", a-t-elle déclaré. "Il conduit toutes les institutions à revoir à la baisse leurs prévisions de croissance pour l'économie mondiale (...). C'est vraiment une situation perdant-perdant que nous connaissons actuellement".
Elle a souligné que la dispersion de l'incertitude et la conclusion d'accords - notamment sur les barrières tarifaires et non tarifaires - profiteraient à toutes les parties.
La directrice de la BCE a également mis en garde contre le fait que l'incertitude elle-même peut devenir un frein à la performance économique, pour les entreprises comme pour les investisseurs, ainsi que pour les banques centrales qui tentent de prévoir et de mettre en œuvre une politique efficace.
"Les acteurs économiques, les investisseurs et les employeurs ont beaucoup de mal à gérer l'incertitude", a-t-elle déploré. "Il en va de même pour nous, en tant que banques centrales (...) si nous sommes confrontés à cette grande incertitude, cela nous rend la vie vraiment difficile.
Notant que tous les pays sont "intrinsèquement liés par des chaînes d'approvisionnement", Mme Lagarde a rappelé que la fragmentation économique, qu'elle soit due à des droits de douane ou à un découplage stratégique, constitue une menace pour la prospérité partagée.
Elle a ajouté qu'une incertitude non résolue pourrait forcer les entreprises à réexaminer leurs chaînes d'approvisionnement, ce qui entraînerait une fragilité accrue, une croissance plus lente et d'éventuelles pressions inflationnistes.
"Si la situation n'est pas résolue de manière satisfaisante et que l'incertitude n'est pas levée, les entreprises repenseront leurs chaînes d'approvisionnement (...) ce qui entraînera une plus grande fragilité et une période d'incertitude au cours de laquelle la croissance sera probablement ralentie, ce qui pourrait entraîner des pressions inflationnistes", a-t-elle expliqué.
Alors que cette année marque le 50e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et l'Union européenne (UE), Mme Lagarde a exprimé l'espoir que les deux parties restent attachées au dialogue et à la coopération fondée sur des règles.
"J'espère vivement que la Chine et l'UE continueront à coopérer, poursuivront le dialogue, seront franches l'une envers l'autre et respecteront les règles qu'elles ont toutes deux acceptées", a-t-elle souhaité. "Je pense que la détermination à dialoguer, à coopérer et à trouver des solutions gagnant-gagnant continuera d'être partagée.
Elle a également souligné l'importance de la coopération entre la BCE et la Banque populaire de Chine (la banque centrale chinoise).
"Nous partageons certaines des mêmes préoccupations, certains des mêmes défis et nous avons un dialogue fort et profond", a-t-elle reconnu, ajoutant que "Nous sommes toutes deux très attachées au cadre réglementaire et à la supervision qui soutiendront la stabilité financière". F








