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De nouvelles voies vers la modernisation

Par : Laura |  Mots clés : modernisation,Forum Chine-Afrique des Think Tanks,Dar es Salaam,Tanzanie
French.china.org.cn | Mis à jour le 29-03-2024
Chinafrique | 29. 03. 2024

Lors de la 13e Réunion du Forum Chine-Afrique des Think Tanks, qui s’est tenue à Dar es Salaam, en Tanzanie, des intellectuels chinois et africains ont publié le Consensus entre les groupes de réflexion africains et chinois sur le renforcement de la coopération mondiale pour le développement. Également appelé Consensus de Dar es Salaam entre l’Afrique et la Chine, ce document appelle la communauté internationale à approfondir la coopération au développement sur la base des principes de respect mutuel, de solidarité, de coopération gagnant-gagnant, d’ouverture et de prospérité commune. Il propose que les pays adoptent une approche du développement centrée sur le peuple et créent un environnement institutionnel sain permettant à chacun de mener une vie meilleure. 

En outre, le consensus met en lumière la nécessité d’un dialogue renforcé entre différentes civilisations, en opposition aux conflits, et insiste sur le respect de l’histoire, de la culture, des traditions et des conditions spécifiques à chaque nation. Il encourage les pays à embrasser un chemin vers la modernisation qui soit en accord avec leurs besoins de développement spécifiques et qui reflète les particularités de leur culture. 

Le Consensus de Dar es Salaam constitue une démarche importante des penseurs chinois et africains pour approfondir les échanges culturels et intellectuels, offrant un modèle pour la Chine, l’Afrique, et d’autres nations en développement, pour remettre en question l’association automatique entre modernisation et occidentalisation. La Chine et l’Afrique ne pourront revitaliser leurs cultures et civilisations respectives et promouvoir la construction d’une communauté de destin pour l’humanité qu’en adhérant à des voies de modernisation basées sur leurs différentes caractéristiques culturelles et leurs besoins de développement. 

Les limites du néolibéralisme 

Le Consensus de Dar es Salaam illustre la tentative avortée des pays occidentaux de promouvoir de manière insistante le modèle néolibéral au-delà de leurs frontières. 

Dans les années 1980, sous l’égide du Premier ministre britannique Margaret Thatcher et du Président américain Ronald Reagan, le néolibéralisme s’est répandu mondialement, impactant lourdement l’Afrique. Les programmes d’ajustement structurel, imposés par le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale, ont conduit à une réduction moyenne du PIB de l’Afrique subsaharienne de 1 % par an entre 1980 et 1997. La part des pays africains dans le commerce mondial a continué à diminuer sous l’impact de ces politiques néolibérales. La proportion des exportations des pays africains est passée de 2,53 % en 1990 à 1,78 % en 2000, tandis que le volume total des exportations mondiales a augmenté d’environ 85 % au cours de la même période. Les politiques néolibérales ont accru la dette de l’Afrique subsaharienne, passant de 2 à 331 milliards de dollars entre 1970 et 2012, soit une multiplication par 165. 

Aujourd’hui, un cycle renouvelé de réformes néolibérales en Afrique cause de nouvelles difficultés, exacerbées par la crise économique de 2008, la volatilité des prix des matières premières, la pandémie de COVID-19 et les hausses des taux d’intérêt occidentaux. Les économies africaines sont plongées dans une crise profonde. 

Dans le but d’obtenir des prêts de la Banque mondiale et d’autres institutions, les principales économies africaines comme le Nigeria, l’Égypte, l’Angola et l’Éthiopie ont accéléré les privatisations et les réformes axées sur le marché et le néolibéralisme. Ces réformes touchent divers secteurs tels que l’agriculture, l’électricité, l’énergie, les ressources minérales, les infrastructures, les transports, la finance et d’autres domaines essentiels pour la population. 

En Égypte, le gouvernement a lancé un programme de privatisation massive pour combler le déficit financier. Le gouvernement espère générer 5 milliards de dollars de recettes entre octobre 2023 et juin 2024 en vendant des parts dans 35 entreprises publiques. Cette démarche s’inscrit dans le cadre de l’obtention d’un prêt de 3 milliards de dollars du FMI. Cependant, malgré cette privatisation accélérée, l’économie égyptienne ne s’est pas redressée, avec un taux d’inflation proche de 30 % et un déficit net des actifs étrangers de 29 milliards de dollars. 

De même, au Nigeria, la privatisation du secteur électrique n’a pas réussi à améliorer la production et la stabilité du réseau, ce qui a poussé certains experts à remettre en question la stratégie de privatisation. En Angola, le plan de privatisation des télécommunications a été annulé en juin 2023 en raison des mauvais résultats. L’économiste Carlos Rosado de Carvalho estime que le plan de privatisation angolais est en deçà des attentes et que le secteur public est encore plus problématique depuis le début de la privatisation. 

Le consensus formé par des penseurs chinois et africains critique fortement les politiques de développement néolibérales encouragées par les États-Unis et d’autres nations occidentales, qui non seulement ont échoué à promouvoir un développement durable en Afrique, mais ont également exacerbé les défis économiques et sociaux auxquels le continent est confronté. 

Des valeurs communes pour l’humanité 

Le Consensus de Dar es Salaam propose des solutions communes pour les défis mondiaux, transcendant le Consensus de Washington. Il promeut des valeurs universelles, embrassant la diversité culturelle. 

Au cœur de ses principes fondamentaux, ce consensus souligne l’importance d’une coopération mutuellement bénéfique et d’un développement partagé, contrastant avec l’approche occidentale traditionnelle qui tend à avantager ses propres intérêts au détriment des nations moins développées dans la hiérarchie industrielle et économique. 

En matière de gouvernance mondiale, le consensus préconise un monde multipolaire équitable et organisé, ainsi qu’une mondialisation économique universellement bénéfique et inclusive. Il reflète les intérêts et les exigences de la grande majorité. 

En théorie économique, il privilégie la nouvelle économie structurelle plutôt que le Consensus de Washington. Il résout ainsi le conflit entre gouvernement et marché, rejetant le néolibéralisme et les tentatives occidentales de politiser les questions économiques. Il refuse également d’imposer des implications en matière de sécurité aux questions économiques et commerciales.  

Ce cadre favorise un développement centré sur les personnes et la protection de leurs droits à la subsistance et au développement. Il souligne la valeur fondamentale du développement dans une perspective idéologique. 

Le consensus est le fruit d’une consultation, d’une contribution conjointe et d’un partage entre intellectuels chinois et africains, incarnant une réelle égalité souveraine et un respect mutuel.  

Le Consensus de Dar es Salaam marque une avancée dans les échanges entre la Chine et l’Afrique sur le développement. Il montre comment poursuivre l’indépendance des idées et des principes, offrant un exemple pour le Sud global. 

L’auteur est chercheur adjoint du Département d’études sur les pays en développement, Institut chinois d’études internationales à Beijing.  

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Source: Chinafrique
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