Un pont entre continents

Par : LIANG Chen |  Mots clés : Chine, Afrique
French.china.org.cn | Mis à jour le 04-12-2023
french.china.org.cn | 04. 12. 2023

L’année 2023 marque le 60e anniversaire des liens diplomatiques entre les deux nations. Durant cette période, la Chine et le Kenya ont bâti une relation basée sur la confiance mutuelle, le respect et une coopération étroite dans de multiples secteurs. À l’occasion de cet anniversaire significatif, le magazine CHINAFRIQUE a eu le privilège d’interviewer Dennis Munene, directeur exécutif du Centre Chine-Afrique de l’Africa Policy Institute. Il a partagé ses perspectives éclairées sur l’évolution et l’impact des relations sino-kényanes et plus largement sino-africaines. Voici des extraits choisis et édités de cette entrevue: 

CHINAFRIQUE: Quels ont été, selon vous, les développements les plus significatifs dans les relations entre le Kenya et la Chine au cours des 60 dernières années, et comment ces relations devraient-elles évoluer? 

Dennis Munene: Ces 60 années de relations diplomatiques sino-kényanes se caractérisent par une transformation notable, illustrée par de multiples projets d’envergure et d’autres plus modestes. Ces projets, touchant des secteurs variés tels que le logement, la manufacture, la santé, l’économie numérique et les énergies renouvelables, ont contribué significativement à la modernisation durable du Kenya. 

Un exemple emblématique est l’autoroute Thika, inaugurée le 9 novembre 2012, qui a joué un rôle clé dans la transformation du Kenya en une puissance économique régionale majeure. Cette autoroute est devenue un axe de transport essentiel au sein du pays. 

Nous avons aussi assisté à la concrétisation de l’autoroute de Nairobi, longue d’environ 27 km, reliant l’aéroport international Jomo Kenyatta au quartier central des affaires de Nairobi. Cette autoroute à péage, première du genre au Kenya, est le fruit d’une collaboration sans précédent entre la Chine et le Kenya dans le domaine du développement des infrastructures, sans recours à l’endettement. D’autres projets notables incluent l’expansion de la rocade extérieure de Nairobi, ainsi que la construction des autoroutes Kibwezi-Usueni et des contournements sud et nord. 

En plus de moderniser et d’élargir le réseau routier au Kenya, la Chine a joué un rôle clé dans la renaissance et la modernisation du projet ambitieux d’un réseau ferroviaire transcontinental. Ce projet, essentiel pour connecter les ports des côtes de l’océan Indien, de l’Atlantique, de la mer Rouge et de la Méditerranée, s’inscrit dans le cadre de l’Agenda 2063. Cet agenda vise à métamorphoser l’Afrique en une force mondiale de l’avenir. Le rêve de bâtir un réseau ferroviaire continental moderne, catalysant l’intégration régionale et amplifiant la compétitivité de l’Afrique dans un contexte globalisé, a donné naissance au système ferroviaire à écartement standard (SGR) du Kenya. 

Le SGR, un projet clé pour un transport efficace, relie Mombasa à Naivasha avec une ligne de 600 km. Il offre un transport de passagers abordable, confortable, rapide et sécurisé, ainsi qu’une circulation efficace des marchandises. Avec six trains quotidiens, il transporte 7 000 à 10 000 personnes par jour, équivalent à 145 bus. Le trajet Nairobi-Mombasa, de huit à douze heures en bus, se fait maintenant en cinq à six heures en train. 

La coopération sino-kényane ne se limite pas à l’infrastructure. Elle s’étend à la coordination politique, à la promotion commerciale, à la connectivité financière et aux échanges culturels. L’établissement du Centre commun de recherche sino-africain, de l’Institut Confucius de l’Université de Nairobi, du Centre international de langues de l’Université Kenyatta, du Laboratoire commun Kenya-Chine pour la biologie moléculaire des cultures à l’Université d’Egerton et de l’Atelier Luban à l’Université de Machakos témoigne de cet enrichissement mutuel. 

Pour l’avenir, le Kenya et la Chine doivent se concentrer sur l’achèvement du tronçon restant du SGR, de Naivasha à Malaba, afin de maximiser les retombées économiques. Une compréhension approfondie et un respect mutuel de leurs cultures uniques sont essentiels pour renforcer leur coopération stratégique bilatérale et prévenir tout conflit. 

Quelle est l’importance des projets de construction d’infrastructures représentés par le SGR Mombasa-Nairobi dans la promotion du développement économique global du Kenya? 

Le SGR Mombasa-Nairobi a non seulement stimulé la croissance économique mais a également généré des emplois, amélioré l’efficacité et renforcé les secteurs manufacturier et industriel. 

En 2022, le SGR a enregistré une croissance notable en générant 95,5 millions de dollars de revenus, une augmentation significative par rapport aux 91,8 millions de dollars de 2021, selon les statistiques de la Kenya Railways. Cette progression a contribué à hauteur de 1,5 % à la croissance du PIB kényan. Le SGR s’est révélé être un moteur essentiel dans l’accélération de la Vision 2030 du Kenya, un plan ambitieux visant à transformer le pays en un pôle de développement et de croissance économique. Selon Philip Jamuhuri Mainga, directeur général de la Kenya Railways, le SGR pourrait contribuer entre 2 et 3 % au PIB national. 

Le SGR joue un rôle clé dans l’industrialisation et la revitalisation du secteur manufacturier au Kenya, notamment dans des domaines variés tels que l’acier, le ciment et l’agriculture. En tant que moyen de transport rapide, efficace et économique, le SGR facilite le transfert des marchandises depuis le port de Mombasa vers d’autres régions du Kenya et les pays limitrophes. Le volume de fret traité par le SGR a connu une croissance constante, passant de 2,93 millions de tonnes en 2018 à 6,26 millions de tonnes en 2022. Pour 2023, on prévoit un volume de fret d’environ 6,8 millions de tonnes. 

Ces améliorations ont eu un impact considérable sur la croissance économique du Kenya, plaçant le SGR au cœur du développement durable du pays. Depuis son inauguration en juin 2017, il a créé des opportunités d’emploi pour environ 2 700 Kényans. Quelque 2 285 professionnels issus de divers domaines travaillent dans les 33 gares ferroviaires et sur les trains de voyageurs et de marchandises, sans compter les nombreux emplois indirects générés. Le projet SGR a créé un total de 30 000 emplois, et pendant la phase de construction, le tronçon Mombasa-Nairobi a employé plus de 46 000 locaux. Plus de 1 000 entreprises locales ont été impliquées à différents niveaux dans la construction de cette infrastructure ferroviaire, ce qui a eu un effet direct et positif sur l’économie kényane. 

Outre son impact économique, le SGR a également stimulé le tourisme. Devenu une attraction en soi, il attire des touristes, tant locaux qu’internationaux. Ce mode de transport, reconnu pour son accessibilité, sa sécurité et sa rapidité, est très prisé par les visiteurs. Le trajet offre une vue imprenable sur le mont Kilimandjaro et la faune sauvage du Parc national de Tsavo, permettant aux passagers d’admirer ces merveilles naturelles tout en se rendant confortablement de Nairobi à la ville côtière de Mombasa. 

Quelle est la perception du public kényan de l’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR)? 

Vue comme un « bien public » mondial, l’ICR s’est imposée comme un fervent promoteur de l’égalité entre les civilisations, en particulier dans un contexte où de nombreux pays du Nord privilégient des politiques altermondialistes et nationalistes. Cette tendance a été particulièrement évidente durant la crise sanitaire de la COVID-19, période où la Chine a joué un rôle de premier plan en fournissant une stratégie claire et une direction efficace pour combattre la pandémie. Cela inclut la promotion de la Route de la soie de la santé et la distribution de vaccins à des pays en développement comme le Kenya. 

C’est pour cette raison que les Kényans ont salué et apprécié l’impact de l’ICR depuis son lancement en 2013 par le Président Xi Jinping. Grâce à cette initiative de transformation, le Kenya a connu des résultats positifs et fructueux au cours des 10 dernières années. Aujourd’hui, le Kenya bénéficie de projets d’infrastructures de haute qualité tels que l’autoroute de Nairobi, construite par une entreprise chinoise dans le cadre d’un modèle de partenariat public-privé. Cela a démystifié la propagande du piège de la dette. Le Kenya a également vu la construction d’un certain nombre de projets importants, comme indiqué précédemment. Ces projets ont permis au Kenya de devenir une frontière du développement durable dans la région. 

La plupart des Kényans comprennent l’ICR à travers les projets de développement d’infrastructures qui ont considérablement transformé le pays. 

Quelle est l’importance de l’ICR pour aligner l’initiative sur le plan Vision 2030 du Kenya? 

La Vision 2030 du Kenya est un projet de développement ambitieux, visant à élever le Kenya au rang d’économie intermédiaire et industrialisée d’ici 2030. Ce projet repose sur des piliers économiques, sociaux et politiques essentiels. 

Parallèlement, l’ICR, lancée par le Président Xi, vise à relier l’Asie, l’Afrique et l’Europe par des réseaux terrestres et maritimes. L’objectif est de favoriser l’intégration régionale, d’accroître les échanges commerciaux et de stimuler la croissance économique. Ces deux stratégies ont significativement contribué à la croissance et au développement économique du Kenya. Par exemple, grâce à l’ICR, le Kenya a bénéficié d’un développement infrastructurel de premier ordre, favorisant ainsi sa croissance économique et l’alignement sur les objectifs de sa Vision 2030. 

Quels sont vos commentaires sur l’Initiative pour le développement mondial (IDM) proposée par la Chine? 

L’IDM joue un rôle essentiel dans le soutien de la communauté internationale et des Nations unies pour atteindre les Objectifs de développement durable de 2030. Elle aide également l’UA dans la mise en œuvre de son Agenda 2063, actuellement dans sa dixième année, et soutient les gouvernements régionaux dans la réalisation de leurs programmes nationaux, comme la Vision 2030 du Kenya. L’IDM s’attaque aux conséquences désastreuses de la pandémie de COVID-19 sur le développement, confronte les défis liés à la dégradation environnementale et au changement climatique, et favorise une reprise écologique. Elle promeut également les principes d’une civilisation écologique, visant à harmoniser le développement avec la préservation de l’environnement naturel. 

Les pays africains embrassent l’IDM, reconnaissant que le développement est intrinsèquement lié à la liberté et à la justice. Inspiré par le panafricanisme et la Renaissance africaine, l’Agenda 2063 propose 20 objectifs ambitieux pour transformer l’Afrique en une puissance mondiale de l’avenir. L’IDM a le potentiel de transformer ce rêve panafricain en réalité. 

Combinée avec l’Initiative pour la sécurité mondiale et l’Initiative pour la civilisation mondiale, l’IDM se positionne comme une solution clé pour promouvoir un développement durable, bénéfique tant pour l’Afrique que pour le monde entier. 

Suivez China.org.cn sur Twitter et Facebook pour rejoindre la conversation.
Source: french.china.org.cn
Retournez en haut de la page