Kenya : apiculture, un outil de femmes pour combattre la faim et la pauvreté (REPORTAGE)

Quand la faim frappe les ménages, les femmes dans les communautés kenyanes portent souvent la plus grande charge de nourrir la famille. Mais pour les femmes dans la région de Marigat du comté de Baringo dans la région du Rift Valley, il n'y a pas que la pénurie alimentaire qui les trouble; la pauvreté et la sécurité de leurs investissements constituent une charge supplémentaire.

Néanmoins, elles ont appris des moyens pour aborder les problèmes et leur solution est désormais l'abeille.

Christine Lewatachum est la vice-présidente du groupe des femmes Sinyati qui a été formé principalement pour éliminer la faim et la pauvreté de leurs ménages.

"Nous avons voulu surmonter l'impact du vol de bétail dans cet endroit", a-t-elle expliqué. Certaines parties du comté de Baringo, y compris Marigat ont pendant de nombreuses années été en proie avec le vol de bétail où des milliers de vaches et de chèvres sont volées laissant les familles dans le désespoir.

Les résidents ici dépendent principalement de l'élevage pour leur survie. Mais c'est le défi de la sécurité qui a donné aux femmes une idée sous la forme d'une solution à leurs problèmes.

"Nous pouvons dormir affamés. Totalement affamés parce qu'il n'y avait absolument rien à manger", a indiqué Josephine Lemangi, un membre du groupe.

Avec le soutien de leurs maris, les 14 femmes ont commencé à élever les abeilles il y a six ans et avec des heures supplémentaires elles ont progressé pour devenir femmes d'affaires prospères capables de soutenir leurs familles.

Elles ont six produits à leur nom ; des produits dérivés des abeilles à savoir le miel, la cire d'abeille, la propolis, la gelée royale, le pollen d'abeille et les costumes d'abeilles.

Le prix du miel varie de 0,5 dollars à cinq dollars, selon la quantité.

Ils font des bougies, la crème pour le corps et le savon, avec la cire d'abeille.

Un kilogramme de bougies se vend à six dollars. Le savon est vendu en morceaux de 0,5 dollars et d'un dollar respectivement. Alors que 100g de crème pour le corps se vend à deux dollars et 0,5 dollars pour une bouteille de 50g.

"Nous utilisons ces produits et nous sommes en très bonne santé. Regardez notre peau, elles sont très lisses", a déclaré la vice-présidente avec des gestes cordiaux.

Elles utilisent la propolis pour produire un médicament appelé teinture de propolis qui pour sa part est utilisé pour traiter l'arthrite, les allergies ou les blessures. Une bouteille de 30ml se vend à trois dollars.

"Nos vies ont totalement changé. Nous pouvons maintenant nourrir nos enfants, payer leurs frais de scolarité et répondre aussi à nos besoins individuels", a déclaré Mme Lewatachum.

Pour récolter le miel, elles utilisent les costumes d'abeilles fabriqués à partir de sacs de fibres. Un ensemble complet comprend un pantalon et un haut à manches longues avec un couvercle de la tête, qu'elles vendent d'ailleursz à 10 dollars la pièce.

Elles disent qu'elles ont un grand marché local car les gens ont continué à apprécier leur travail et ce qu'elles offrent.

Au lieu de partager les bénéfices, les femmes réinvestissent leurs gains dans le groupe comme des économies grâce à la table bancaire et les membres peuvent emprunter de l'argent pour booster leurs projets individuels.

"Si vous empruntez 20 dollars, vous revenez avec deux dollars supplémentaires. La plupart de nos membres utilisent l'argent pour lancer ou développer leurs entreprises", a expliqué la vice-présidente.

"Nous avons ceux qui ont commencé des jardins potagers et d'autres sont entrées dans l'élevage de volailles". Les membres achètent aussi le miel d'autres femmes pour répondre à leurs demandes.

"C'est une bonne chose de voir ces femmes faire quelque chose pour échapper à la faim. Si vous nous avez vu au cours des années précédentes, nous étions si pâles et souffrant de la malnutrition à cause de la faim. Nous sommes heureuses aujourd'hui, nous avons la nourriture pour nourrir nos familles", a affirmé la vice-présidente.

Actuellement, au moins 1,3 million de personnes souffrent de la faim au Kenya, en particulier dans les régions septentrionales et côtières, et le gouvernement cherche des moyens pour répondre suffisamment à leurs besoins alimentaires.

Au cours des dernières années, il y a eu des efforts accrus de la part des partenaires gouvernementaux et de développement pour encourager les femmes à participer activement dans la production alimentaire, en facilitant leur accès au crédit, à l'information agricole et au savoir-faire.

Le pays a mis en place le Fonds Uwezo, le Fonds pour l'entreprise des femmes et le Fonds pour le développement des entreprises des jeunes dont les femmes âgées de moins de 35 ans peuvent accéder au financement pour démarrer ou accroître leurs activités.

Les femmes sont considérées comme les piliers essentiels pour éradiquer la pauvreté et l'insécurité alimentaire, en particulier dans les pays en développement où l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) affirme que leur implication peut augmenter la productivité alimentaire de jusqu'a 30% par an. F