Brexit : quelles conséquences pour la Chine ?
Des bénéfices en perspective pour les étudiants chinois
Selon des experts en études à l'étranger, les étudiants chinois qui souhaitent faire des études au Royaume-Uni pourraient récolter quelques avantages à court terme à la suite du vote britannique pour quitter l'Union européenne.
Liu Fengjie, directeur de la division britannique de Chivast Education International, une société dont le siège est à Beijing et qui aide les étudiants chinois à étudier à l'étranger, estime ainsi qu'après le Brexit, étudier au Royaume-Uni et y travailler pourrait être plus facile.
« Je pense aussi que certaines personnes originaires des pays membres de l'UE pourraient quitter le Royaume-Uni et l'emploi qu'ils y occupent, ce qui pourrait fournir des opportunités aux étudiants chinois qui cherchent du travail », a-t-il déclaré.
Selon le gouvernement britannique, plus de 450 000 étudiants étrangers sont venus faire leurs études en Grande-Bretagne l'année dernière, dont 130 000 en provenance de Chine.
He Chugang, directeur général de la région Chine du Sud chez Amber Education, une agence de conseil en études à l'étranger, est du même avis que M. Liu et pense aussi que le coût des études au Royaume-Uni sera moins élevé.
Il a été surpris par la forte participation au référendum, ajoutant néanmoins que de nombreuses caractéristiques du Royaume-Uni -son économie, sa culture et d'autres- sont étroitement liées à l'UE.
« Quitter l'UE n'est d'aucune utilité pour le pays », a-t-il souligné, ajoutant que « les autres effets sur l'éducation internationale restent à voir ».
La sortie de l'UE pourrait stimuler le tourisme
Selon les experts, le Brexit pourrait attirer davantage de touristes chinois en raison de la baisse de la livre sterling.
« L'impact le plus important sur les touristes chinois sont les fluctuations monétaires possibles », a ainsi déclaré Jiang Yiyi, directrice de l'Institut international de développement du tourisme.
Si la monnaie britannique continue à baisser face au renminbi, le pouvoir d'achat du yuan va augmenter. « Voyager au Royaume-Uni pourrait devenir moins cher, et les touristes chinois seront plus disposés à y aller », dit-elle.
D'après les chiffres du gouvernement britannique, quelque 270 000 touristes chinois ont visité la Grande-Bretagne l'année dernière, en augmentation de 46% par rapport à l'année précédente.
Mme Jiang estime par ailleurs que la politique de visas envers les Chinois ne devrait pas connaitre de grands changements après le Brexit, parce que le Royaume-Uni n'a pas adopté le visa Schengen. En revanche, la Grande-Bretagne a conclu des accords de visa bilatéraux avec certains pays européens. Par exemple, elle a signé un accord avec la Belgique pour permettre aux titulaires du visa de chaque pays d'entrer librement dans l'autre. « Mais après le Brexit, nous ne savons pas si la situation va changer », a-t-elle souligné.
Xu Xiaolei, chef de marque chez Aoyou.com, un site de réservation en ligne, estime également pour sa part que la baisse de la livre pourrait rendre les voyages au Royaume-Uni moins chers et que cela pourrait également offrir des opportunités d'achat d'actifs touristiques britanniques aux capitaux chinois.
Des complications possibles pour les entreprises
Selon un initié, après que le Royaume-Uni ait voté pour quitter l'Union européenne, les entreprises chinoises qui utilisent la position de la Grande-Bretagne en tant que passerelle pour développer leurs activités dans d'autres pays européens pourraient faire face à des défis.
Andrew Yuan, directeur général d'Hytera Communications UK, pense ainsi que les entreprises chinoises en Grande-Bretagne pourraient voir leurs activités touchées par le vote, car beaucoup d'entre elles utilisent leur siège du Royaume-Uni pour couvrir leurs activités dans d'autres pays de l'UE.
« Prenez mon entreprise comme un exemple. Environ 45% de notre chiffre d'affaires de l'année dernière est venu de pays européens extérieurs au du Royaume-Uni. Je crains que près d'un tiers de nos activités puissent être réduites si le Royaume-Uni quitte effectivement l'UE ».
Hytera, une société basée à Shenzhen, dans la province du Guangdong, est spécialisée dans la conception et la fabrication d'équipements de communications radio mobiles. Elle a ouvert un bureau de représentation au Royaume-Uni en 2005, qui a évolué en un quartier général couvrant les marchés de l'Europe de l'Ouest et du Nord.
Zeng Gang, chercheur à l'Institut des finances et de la banque de l'Académie chinoise des sciences sociales, estime pour sa part que le Brexit aura des conséquences sur la livre sterling, ce qui provoquera un impact négatif sur les actifs liés à la livre en Grande-Bretagne.
« Les entreprises chinoises possédant des actifs en Grande-Bretagne vont devoir réajuster leurs stratégies et chercher à diversifier leurs investissements dans d'autres pays européens si elles envisagent d'étendre leur influence en Europe », a-t-il expliqué.
Le Royaume-Uni devrait poursuivre la conclusion d'un accord de libre-échange avec la Chine
Les experts estiment que s'il veut rester compétitif, le Royaume-Uni devra tôt ou tard suivre les traces de la Suisse et de la Norvège et entrer dans des discussions sur des accords de libre-échange commerciaux avec la Chine après son retrait de l'Union européenne.
La Suisse, pays riche membre non-membre de l'UE a ainsi signé un accord de libre-échange avec la Chine en 2014, et la Norvège est actuellement en pourparlers avec la Chine pour parvenir à un accord de libre-échange bilatéral.
Ma Yu, chercheur à l'Académie chinoise du commerce international et de la coopération économique à Beijing, pense quant à lui que le Royaume-Uni est la destination d'investissement européenne préférée des entreprises chinoises et qu'il a de solides relations diplomatiques et commerciales avec la Chine.
« Dans ce genre de circonstances, il ne devrait pas falloir beaucoup de temps pour terminer les pourparlers de l'accord de libre-échange Chine-Royaume-Uni si les deux parties veulent que cela se fasse dans un bref délai », a-t-il souligné.
Cependant, a déclaré He Wenwei, directeur du centre de recherche en études européennes et américaines à l'Association chinoise du commerce international à Beijing, « parce que le Royaume-Uni avait une voix puissante à Bruxelles, son retrait de l'UE va augmenter les coûts de la Chine en termes de temps et de ressources dans les négociations de l'accord de libre-échange Chine-UE et d'un accord global d'investissement UE-Chine avec l'UE sans le Royaume-Uni ».
Selon l'Administration générale des douanes, le commerce de marchandises entre la Chine et l'Union européenne s'est élevé à 564,85 milliards de dollars US (508 milliards d'euros) en 2015, tandis que le commerce entre la Chine et le Royaume-Uni a atteint 78,54 milliards de dollars US (70,64 milliards d'euros).
Un stimuli pour les centres offshore en RMB
D'après les experts, le statut de Francfort, Luxembourg et Paris comme centres offshore en renminbi devrait s'améliorer de façon significative après le choix du Royaume-Uni de quitter l'Union européenne.
Wen Bin, chercheur en chef chez China Minsheng Banking Corp, estime que le statut de Londres en tant que centre financier mondial sera affaibli après le départ de la Grande-Bretagne de l'UE : « cela va déclencher une augmentation de la taille et du volume des transactions transfrontalières en renminbi dans les trois autres centres offshore en renminbi d'Europe, qui remplaceront Londres, alors que la Chine encourage ces opérations dans le cadre de l'initiative 'Une ceinture et une route' », a-t-il souligné.
Il prévoit également que le renminbi chutera légèrement par rapport au dollar américain, mais demeurera relativement stable par rapport à un panier de devises.
Zong Liang, directeur adjoint de l'Institut de finances internationales à la Banque de Chine, pense quant à lui que la sortie britannique conduira également les banques chinoises qui étendent leurs activités dans le monde entier à réajuster leurs stratégies mondiales en accélérant leur déploiement dans les pays comme l'Allemagne et la France, un point de vue que Wen Bin approuve, disant que d'énormes opportunités d'affaires émergeront pour les banques chinoises en Europe, alors que leurs activités à Londres pourraient ralentir.
Sun Yu, président de la succursale de la Banque de Chine à Londres, a pour sa part déclaré que « Le Brexit va faire naitre des incertitudes pour ... les grandes banques internationales. Son impact sur Londres en tant que centre financier mondial aura une incidence sur la stratégie future des banques. Auparavant, toutes les banques européennes utilisaient. Londres comme leur centre d'affaires ».
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