Migrations : l'aide européenne insuffisante pour résoudre les problèmes, selon des dirigeants africains (ANALYSE)
Certains responsables africains ont jugé insuffisante l'aide de 1,8 milliard d'euros promise par les pays européens pour aider l'Afrique à s'attaquer aux racines des migrations massives.
Le président sénégalais Macky Sall a ainsi jugé en marge du Sommet de La Valette (Malte) sur les migrations que la dotation de ce "fonds d'affectation spéciale" était "absolument insuffisante". Pour lui, l'Europe et l'Afrique doivent renforcer l'immigration légale, notamment pour permettre aux jeunes Africains de venir étudier en Europe. Son homologue nigérien Mahamadou Issoufou a jugé sur RFI que ce fonds "ne suffira pas".
Le sommet de La Valette "n'a donné aucun résultat", affirme pour sa part Marie-Roger Biloa, présidente du groupe de presse Africa International. La Camerounaise relève que l'Union européenne discute de cette question depuis des années et que les Africains ont eux-même soumis plusieurs propositions, mais que rien n'avait changé.
Dans un entretien exclusif à Xinhua, Mme Biloa note que l'UE a certes promis de débloquer 1,8 milliard d'euros pour aider les gouvernements africains à conserver leurs populations au pays, mais que les Africains n'ont sans doute pas envie de voir se construire à l'infini des camps de réfugiés et de migrants.
"Si vous voulez vraiment investir de l'argent dans quelque chose d'important, il en faudrait beaucoup plus que ça. Et il y a aussi la question est de savoir qui va gérer cet argent, où ira-t-il et pourquoi. A l'évidence, ce n'est pas clair", s'interroge-t-elle.
Si les Européens semblent vivre ce flux migratoire venu d'Afrique, mais aussi du Moyen-Orient, comme une "catastrophe", Mme Biloa relève que l'Afrique est plus calme sur cette question, alors même que certains pays africains, bien plus pauvres qu'en Europe, accueillent parfois "plus de migrants que certains pays européens".
Un sentiment partagé par le président ivoirien Alassane Ouattara. "En Afrique de l'Ouest, 25% de la population d'un pays vient d'ailleurs. Ils sont bien intégrés et ça se passe bien", a-t-il dit en faisant remarquer qu'il n'y avait pas de migrants ivoiriens car la situation économique et politique dans son pays était très bonne.
"On a organisé ce sommet parce que l'Europe est dans une sorte d'état de choc en raison de cette vague migratoire venue essentiellement de Syrie via des pays comme la Turquie", dit Marie-Roger Biloa en assurant que les migrants africains ne composent qu'une petite part de ce flux.
Le principal problème, selon elle, est que ces pays connaissent des problèmes à la fois économiques et de bonne gouvernance, tous facteurs d'exil. "Certains problèmes viennent de ce que les pays africains ne reçoivent pas assez d'investissements pour créer des emplois et ne sont pas traités équitablement lorsqu'ils exportent leurs biens, par exemple", déplore-t-elle.
"Alors, on nous dit aujourd'hui qu'on a un fonds, mais à quoi sert-il? C'est superficiel. Il n'est pas à la hauteur du problème qu'il est censé résoudre", conclut l'éditorialiste et dirigeante de presse.
A l'issue de deux jours de discussions à La Valette, 63 chefs d'Etat et de gouvernement européens et africains, ainsi que des représentants d'organisations internationales et régionales, ont décidé, outre la création du fonds d'urgence, d'un plan d'action comprenant 16 initiatives, notamment dans les domaines de la coopération, du développement socio-économique, de la bonne gouvernance, de la migration légale (étudiants, chercheurs, artistes et entrepreneurs) ou encore de lutte contre le trafic d'être humains.
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