Sénégal : des juristes étalent leurs divergences sur la dépénalisation de l'avortement

Par : Lisa |  Mots clés : news
French.china.org.cn | Mis à jour le 13-08-2015

Des réactions divergentes ont été notées suite aux recommandations des Nations Unies adressées au Sénégal sur la dépénalisation l'avortement.

Le Comité des Nations Unies aux droits de l'homme estime que le Sénégal doit réviser sa législation afin de dépénaliser l'avortement et de l'autoriser légalement.

Cette autorisation devrait intervenir "en cas de danger pour la vie ou la santé de la femme enceinte, de viol, d'inceste ou de déficience fœtale grave", précise le comité.

Cet avis est partagé par la présidente de l'Association des juristes sénégalaises (AJS), Fanta Gueye Ndiaye. "Si le Sénégal dépénalise l'avortement, il ne fera que se conformer à ses engagements régionaux et internationaux", affirme-t-elle.

"Notre pays a ratifié en 2004 le protocole de la Charte africaine relatif à la santé de la reproduction qui, dans son article 14, dit que l'avortement doit être autorisé en cas de viol ou d'inceste suivi de grossesse ou quand il y a menace très grave sur la santé de la femme ou du fœtus", rappelle-t-elle.

"Nous ne parlons pas de meurtre mais de droit à la santé de la personne qui porte un enfant", explique-t-elle.

Fatou Kiné Camara,docteur d'Etat en droit et enseignante à l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, renchérit en soulignant que "le taux de viol des fillettes est effarant" et que "64 % des filles de 13 à 18 ans sont en prison pour des causes d'infanticides".

"Des études ont montré que l'interdiction de l'avortement n'empêche pas les femmes à recourir à cette méthode d'autant plus qu'il y a 51.000 cas d'avortement clandestin par an", ajoute-t-elle sur les antennes d'une radio internationale.

"Quand les femmes font recours à des méthodes d'avortement clandestines ce sont des complications très graves qui surgissent après et des morts atroces ou des maladies comme la fistule", soutient-elle.

"Nous sommes allés voir les grands leaders religieux du Sénégal pour leur expliquer qu'il ne s'agissait pas d'être contre les religions mais juste de sauver la vie des femmes et des enfants", conclut-elle.

La position de ces spécialistes du droit tranche avec celle de l'avocat Ousmane Sèye du Barreau de Dakar.

Selon Me Sèye, "le droit à la santé de la reproduction est un droit fondamental et la loi sénégalaise punit sévèrement l'interruption de grossesse considérée comme un crime".

"Dès le 180ème jour de la grossesse, l'avortement devient un assassinat. Il est interdit sauf quand c'est autorisé par la loi", affirme-t-il.

"Il faut que trois médecins musulmans ou chrétiens attestent que la grossesse menace la vie de la mère pour qu'il y ait un avortement médicalisé", explique-t-il.

"L'Afrique n'est pas représentée au Conseil de sécurité et quand un démembrement de l'ONU fait une recommandation, on dit que les pays africains sont obligés d'appliquer cette recommandation", dénonce-t-il.

"Le continent n'a pas voix au chapitre dans cette institution. Ces genres de décisions, doivent être débattues avec toutes les religions avant d'être appliquées", estime-t-il.

De son côté, l'islamologue Mbaye Niang, député à l'Assemblée nationale, soutient que "la dépénalisation de l'avortement ne peut pas avoir lieu au Sénégal parce que c'est interdit par les deux religions qui y sont pratiquées à savoir le Christianisme et l'Islam".

"On ne peut pas justifier l'avortement par des engagements pris sur le plan international et régional", estime-t-il avant de considérer que "dans beaucoup de domaines on ne peut pas suivre les recommandations des Nations unies et des associations de droits de l'homme qui vont souvent à l'encontre de nos croyances".

Pour lui, "l'inceste et le viol ne constituent pas d'arguments suffisants pour justifier un avortement du point de vue religieux".

"En défendant l'avortement, les associations de défense de droits de l'homme sont en contradiction avec eux-mêmes puisqu'elles défendent en même temps l'abolition de la peine de mort", conclut-t-i

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Source: Agence de presse Xinhua
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