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Sénégal : l'édition des oeuvres en langues nationales demeurent encore un véritable challenge (INTERVIEW)

Par : LIANG Chen |  Mots clés : sénégal
French.china.org.cn | Mis à jour le 20-01-2014

L'édition en langues nationales demeure encore un véritable challenge au Sénégal, estime Seydou Nourou Ndiaye, directeur général des éditions Papyrus Afrique, dans une interview accordée à Xinhua.

Raison de la difficile percée de ce genre d'édition : le français reste la langue officielle dans l'administration et dans l'enseignement au Sénégal, plus de 50 ans après l'indépendance.

"Soucieux" de faire émerger des talents dans tous les genres littéraires et une presse digne de ce nom en langues nationales, ce Sénégalais de 59 ans, disciple de l'égyptologue sénégalais Cheikh Anta Diop, a fondé en 1996 sa maison d'édition et l'a installée dans sa propre concession située à Guédiawaye (banlieue de Dakar).

"Je me suis installé chez moi parce qu'en réalité, c'est la volonté qui compte pour faire du bon travail. Le fait d'éditer des oeuvres de qualité ne dépend pas de l'endroit où on est installé. Il ne suffit pas de s'installer dans un quartier résidentiel pour faire du bon travail", martèle-t-il.

Dans sa concession, il a aménagé deux pièces pour faire son travail d'éditeur, sans trop se soucier du vacarme extérieur ou des visites répétées du voisinage.

A l'intérieur de ses bureaux, on aperçoit juste un ventilateur, du matériel informatique et quelques armoires et cartons remplis de documents. C'est là qu'il reçoit régulièrement des écrivains en langues nationales à la recherche d'un éditeur.

Les éditions Papyrus Afrique, souligne son directeur général, sont parvenues avec leurs "faibles moyens" à éditer au total 130 titres et dispose actuellement de plus de 75 manuscrits déjà validés, en instance de publication, faute de moyens.

"Conscient" de l'atout des langues nationales pour un pays, M. Ndiaye juge qu'il est "impossible" de développer les Etats africains où les langues étrangères sont utilisées pour l'essentiel dans l'administration, contrairement à plusieurs pays émergents de l'Asie.

"Des pays comme la Chine, la Corée du Sud, le Vietnam etc, travaillent tous avec leurs langues nationales. Ces pays nous ont montrés qu'il est impossible de se développer dans la langue d' autrui. Ce n'est pas possible et c'est même un paradoxe qu'un pays soit administré dans une langue étrangère", estime-t-il.

M. Ndiaye déplore qu'au Sénégal, la langue d'instruction dans les établissements scolaires soit le français et non les langues locales et que la quasi-totalité des maisons d'édition éditent des oeuvres de langue française.

"En réalité, ceux-là qui ont envie d'écrire en langue nationale, finalement, n'ont plus le courage de le faire parce que leur travail n'est pas valorisé. Ils se disent que ce n'est pas valorisant d'être poète en langue locale", explique-t-il.

A son avis, pour corriger ce manquement, il faut d'abord une volonté politique, mais surtout montrer que c'est possible d'écrire en langues locales et d'être édité.

Le directeur général des éditions Papyrus Afrique assure que les ouvrages édités en langues locales par sa maison sont lus en Gambie, en Guinée-Bissau, en Mauritanie, au Burkina Faso et par la diaspora africaine.

"Cela veut dire qu'il existe un marché important, mais malheureusement, il n'y a pas de volonté politique de mettre en valeur les écrivains en langues nationales. Il n'y a que des théories, des supputations", déplore-t-il.

"En 2014, si nous décrochons un appui consistant, nous allons publier énormément de nouveaux auteurs dans toutes les langues", car argumente-t-il, "il y a énormément de personnes dans son pays qui ont écrit dans leur langue, mais qui n'arrivent pas être publiés et de nombreux autres qui savent lire dans leur langue mais n'ont rien à lire.

Selon lui, les éditions Papyrus Afrique sont en partenariat avec des maisons d'éditions de même sensibilité en Afrique, notamment en Tanzanie, au Rwanda, au Mali, en Algérie, en Côte d'Ivoire, en République de Guinée, en Guinée-Bissau, au Burkina Faso, et à Madagascar. F

Source: Agence de presse Xinhua
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