Robert Kuhn : le concept de gouvernance de la Chine

Par : Lisa |  Mots clés : gouvernance de la Chine
French.china.org.cn | Mis à jour le 13-10-2017


Le nouveau concept de gouvernance

 

M. Kuhn a rappelé en diverses occasions que sa tâche de décrypter l'idéologie des leaders chinois pour un lectorat occidental représente un grand défi, car « ces politiques sont très difficiles à comprendre pour les Occidentaux ». « Je cherche à adopter une attitude neutre lorsque je présente les idées des dirigeants chinois au monde occidental. » Toutefois, il craint la plupart du temps de voir le public se méprendre et considérer ces idées comme étant « les siennes ».

 

Pour interpréter le plus justement possible la politique chinoise, M. Kuhn lit à volonté les œuvres et discours des hauts responsables chinois, reste attentif aux changements survenant dans leurs théories et aux mutations observées dans la société chinoise, et trouve divers moyens d'échanger ses vues avec des érudits et des fonctionnaires en poste à différents échelons. En 2015, l'émission Closer To China with R. L. Kuhn a été lancée sur CCTV. On peut y voir Robert Kuhn discuter de toutes sortes de thèmes avec des décideurs politiques, passant ainsi en revue les histoires diversifiées que la Chine contemporaine peut nous conter.

 

Dans le livre Xi Jinping : la gouvernance de la Chine, M. Kuhn a trouvé des réponses aux interrogations qu'il avait à ce sujet. « Cet ouvrage présente la philosophie politique de l'actuel président chinois, souligne à quel point il a su rapidement s'imposer comme un dirigeant fort et expose pleinement sa façon de penser, témoigne Kuhn. Il met l'accent sur l'amélioration du niveau de vie de la population, l'approfondissement intégral de la réforme, la promotion intégrale de l'État de droit et l'application intégrale d'une discipline rigoureuse dans les rangs du Parti. » Ces projets sont connus sous le nom des « Quatre intégralités ». Et de l'avis de M. Kuhn, celles-ci représentent le volet le plus important parmi les réflexions de Xi Jinping sur la gouvernance de la Chine.

 

« Beaucoup d'étrangers pensent que la Chine se contente de crier des slogans, sans agir par la suite. Mais les ‘‘Quatre intégralités'' sont véritablement des objectifs pratiques. Qui refuse de s'intéresser aux ‘‘Quatre intégralités'' rate certainement une occasion de comprendre la Chine, commente Kuhn. Chaque ambition affichée assume une fonction différente. La ‘‘moyenne aisance'' sur tous les plans est un objectif ; ‘‘l'approfondissement de la réforme'' est un moyen ; la promotion d'un État de droit, un principe ; ‘‘l'application d'une discipline rigoureuse dans les rangs du Parti'', une action ou une priorité. » Par ailleurs, d'après M. Kuhn, l'origine de chaque ‘‘intégralité'' peut être trouvée dans les politiques des précédents chefs du PCC. La construction in extenso d'une société de moyenne aisance a été proposée en 2002 ; la « réforme », en 1978 ; l'« État de droit », en 1997 ; et la « discipline rigoureuse dans les rangs du Parti » remonte dans un certain sens à 1921, année de la création du Parti.

 

Selon M. Kuhn, ces quatre aspects dans lesquels Xi Jinping recherche l'« intégralité » forment un tout à un certain degré. En d'autres termes, « il faut les observer avec du recul et dans le contexte de la nouvelle normalité pour les comprendre ». M. Kuhn signale encore : « La construction in extenso d'une société de moyenne aisance laisse entendre que toute la population bénéficie des fruits du développement. On ne peut parler de société de moyenne aisance si encore des millions de personnes vivent au-dessous du seuil de pauvreté. Quant à l'approfondissement de la réforme, la promotion de l'État de droit et l'application d'une discipline rigoureuse dans les rangs du Parti, ce sont des domaines qu'il convient de normaliser, notamment en démantelant les groupes jouissant de privilèges. »

 

En outre, à en croire M. Kuhn, les cinq concepts proposés par Xi Jinping et qui doivent qualifier le développement économique de la Chine, ainsi que l'initiative des Nouvelles Routes de la Soie qui reflète l'interaction entre la Chine et le reste du monde, seront également des sujets mis à l'ordre du jour lors du XIXe Congrès du PCC.

 

Le rôle de la Chine dans le monde

 

M. Kuhn estime qu'avant de pouvoir comprendre les idées de Xi Jinping sur la gouvernance et le développement de la Chine, il faut savoir pourquoi M. Xi est devenu le noyau dirigeant du Comité central du PCC. Cette consécration a été proposée et définie lors de la sixième session plénière du XVIIIe Comité central du Parti, tenue en octobre 2016. « À l'heure où Xi Jinping est devenu le noyau dirigeant du Comité central du PCC, la Chine faisait face à des défis majeurs, tant à l'intérieur du pays (surcapacités de production, pollution atmosphérique et inégalités sociales), que sur le plan international (régionalisme, terrorisme, conflits géopolitiques). Pour surmonter ces défis, poursuit M. Kuhn, il fallait raffermir la solidarité et la cohésion au sein du Parti, mais aussi s'engager vers la continuité et l'institutionnalisation des politiques.

 

Juste avant le XIXe Congrès du PCC a eu lieu le Sommet des BRICS. M. Kuhn estime que la Chine s'intègre aujourd'hui dans le monde de manière active et par conséquent, « ce mécanisme multipolaire revêt une grande importance ». « Tous les mécanismes incluant la Chine, du G20 aux réunions des BRICS, sont révélateurs des ajustements intervenus dans la diplomatie chinoise, des ajustements qui devraient se poursuivre. Cette diplomatie non seulement répond aux intérêts du développement économique de la Chine, mais aussi propose des solutions à certains problèmes touchant le monde entier », commente M. Kuhn.

 

D'après lui, le mécanisme des BRICS est une expérience en matière de gouvernance mondiale. « Le PIB de la Chine est supérieur de 6 % au cumul des PIB des quatre autres membres des BRICS. Pourtant, dans le dispositif de la Nouvelle banque de développement des BRICS, chaque pays possède un poids égal, puisque chacun dispose d'une part de 20 % des droits de vote. » Bien que la Chine se classe parmi les premières entités économiques au monde, sa voix ne compte pas plus que les autres pays. Comme le souligne M. Kuhn, « c'est un signe envoyé par la Chine, un signe très positif. »

 

Au sein de l'AIIB, une approche similaire est adoptée. « Le gouvernement chinois tient à envoyer un signe de coopération, déclare M. Kuhn. Xi Jinping avance un objectif de taille pour l'avenir en considérant que la Chine est un citoyen mondial et doit activement prendre ses responsabilités, tant dans les opérations de maintien de la paix que dans la lutte contre la piraterie maritime. »

 

Pour ce qui est de l'initiative des Nouvelles Routes de la Soie, M. Kuhn la voit comme un projet grandiose, affirmant que « notre monde en a besoin ». Mais d'après lui, la Chine pourrait parler plus ouvertement des « avantages que ce grand projet lui apporte », car cela permettrait d'écarter les malentendus résultant de l'asymétrie d'information.

 

Ces dernières années, M. Kuhn a décrit la Chine au travers d'articles pour de nombreux médias et d'interviews ciblant différents pays. Il a également fait paraître quelques livres, dont The Inside Story of China's 30-Year Reform: How China's Leaders Think and What This Means for the Future of the World et How China's leaders think. Pour son émission Closer to China with R. L. Kuhn, il a réalisé un épisode spécial intitulé Interpréter le Parti communiste chinois, qui présente ce parti sous tous ces aspects : ses théories, ses politiques, son organisation et son modèle de gestion. En effet, pour lui, il faut d'abord connaître et comprendre l'idéologie du parti au pouvoir pour se faire une nette idée du développement de la Chine.


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Source:La Chine au Présent

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